Crie mon nom

28.

London.

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Vos "tous les jours négro c'est friday" ne s'appliquent pas à ma mère, et encore moins à mon père. Dimanche c'est Dimanche, aka le jour du Seigneur. Alors me voilà là, les fesses sagement posées sur le banc du deuxième rang de la salle, tentant tant bien que mal de ne pas prêter attention aux messages salaces que s'amuse à m'envoyer cet idiot d'Alek, qui a pourtant connaissance de l'endroit où je me trouve. J'aimerais mieux ne pas vous décrire combien mes yeux se sont écarquillés à la lecture du tout premier message, j'ai dû éteindre mon téléphone, par mesure de sécurité. Quel comble pour une fille de pasteur, d'être tombée sous le charme du diable en personne...

- Range moi ça, me dit ma mère assise à ma gauche.
- Ouais, désolé, je chuchote en m'exécutant. D'ailleurs, je commence à parler un peu plus bas, c'est moi où elle a encore forcé sur le carolight tantine Bibiche, je lâche en lui adressant un signe de tête.
- Yaya, tu blagues, elle répond sans même avoir eu a regarder, elle va même aux toilettes avec, et je ne peux m'empêcher de rire tandis que des femmes derrière nous m'assoment de "chut".
- Oh ça va !, je chuchote en leur souriant insolemment.
- Aller, me dit ma mère amusée en me donnant une tape sur la cuisse, écoute ton père !

Grand, chauve, et noir ; il est le résultat d'un potentiel et audacieux mélange de Denzel Washington et de Michael Kyle. Souvent trop serieux et légitimement hostile à une ouverture d'esprit qui défierait les limites imposées par notre créateur, il répond au nom d'André Maya.
Mon père, cet éternel grand rhetoriqueur, que serais-je sans lui ? C'est ce que je me demande fréquemment quand je le vois, dimanches après dimanches, Bible à la main, témoigner haut et fort animé par cette assurance et cette aisance innée, de la parole de Dieu auprès de notre très chère communauté. Et j'avoue n'avoir jamais trouvé réponse à ma question, par ce qu'il faut dire que je me comporte un peu comme si j'en avais pas, de père. Mais ça, c'est pas à vous que je vais l'apprendre...

- Donny, où est ta soeur ?, me demande mon père quand il nous rejoint ma mère et moi à la fin de son serment. Ça fait longtemps qu'on ne l'a plus vu, tu peux me dire ce qu'elle fabrique ?

"Elle est chez moi, en train d'entamer son cinquième mois de grossesse."

- À la maison, elle se sentait pas très bien, je réponds simplement.
- Ah bon ?, il demande. Et c'est une raison pour déserter l'église aussi souvent ? C'est quoi son excuse pour ces derniers mois ?

"Hmm, eh bien je dirais que début novembre elle était trop occuper à se faire mettre enceinte."

- Faut pas trop lui en vouloir papa, tu sais, avec le travail et tout, elle sait plus trop où donner de la tête..., je continue.
- Mhm, il tique, elle a pas trouvé mieux comme foutaise ? Regarde toi, tu vas à la fac et pourtant rien ne t'empêche de venir prier au moins une fois par mois !

"En réalité ça fait près de deux mois que j'ai dû déserter la fac pour pouvoir me faire de la thune. Grâce m'a pistonné pour que j'obtienne un boulout de barista chez Starbucks et j'ai réussi à avoir 4 élèves en l'espace de 3 semaines après que j'ai régulièrement posté des annonces dans tout Paris pour donner des cours particuliers d'anglais aux collégiens et lycéens histoire de faire en sorte de subvenir à nos besoins, dans un premier temps, mais surtout de financer les futures dépenses en fringues et en mobilier pour bébé, le temps qu'on trouve les couilles de vous dire la vérité."

- Mais non, le prend pas comme ça papa !, je le rassure. C'est loin d'être c'que tu crois.

"C'est bien pire encore."

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