Chapitre 14

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Inwë écouta son époux quitter sa chambre, le dos tourné, faisant semblant d'être assoupie. Finwë exultait depuis l'arrivée de Meij et les promesses de conquête que cela augurait. S'il avait la moindre preuve quant à son rôle, Inwë savait qu'elle ne ferait pas long feu sur cette terre. Peu importe qu'il éprouvait de l'affection pour elle ou non, si on lui prouvait qu'elle cherchait à ruiner ses plans, il la ferait exécuter sur la place publique.

Elle avait risqué gros, un peu plus tôt dans la soirée, en adressant ses doutes à Meij. Restait à savoir s'il l'écouterait ou en ferait mention à Finwë. Elle allait devoir se montrer très prudente dans les jours à venir.

Chassant ces idées de sa tête pour la nuit, la Fille de la Lune se releva, enfila un long déshabillé et se rendit sur son balcon pour profiter de l'air tiède. Le ciel nuageux laissait toutefois filer la Lune croissante. Elle apercevait les lumières de la ville, des tavernes, certainement, qui ne fermaient jamais, ou des boulangers, déjà à l'œuvre dans leurs fourneaux pour livrer du pain dès les premières lueurs.

Inwë perçut une silhouette en contrebas qui se déplaçait dans son jardin et elle sourit en la reconnaissant. Pieds nus, elle descendit et rejoignit l'herbe tendre et douce sous ses pas. Il s'agissait de Gabriel. Elle ignorait la raison de sa présence mais elle était heureuse qu'il soit là.

Assis sur le banc au pied du saule pleureur, il fixait le petit étang devant lui. Inwë vint s'asseoir à ses côtés.

— Qu'es-tu venu faire ici ?

— J'avais besoin de calme et de réflexion, je tournais en rond à l'intérieur.

— Tu veux que je te laisse ?

— Non, tu peux rester, lui dit-il d'une voix douce en se tournant vers elle.

Il passa son bras par-dessus son épaule et la rapprochant de lui. Elle posa la tête contre son épaule. Ils restèrent un long moment à ne rien dire, puis finalement Inwë reprit la parole.

— Tu n'aimes pas vivre ici, n'est-ce pas ? Tu préfères être en dehors de ces murs et voyager...

— Aller où je veux, pour moi, c'est la liberté. J'aime partir sans savoir où mes pas me conduisent ni ce que je vais découvrir. Même lorsque que j'étais plus jeune, j'aimais partir et explorer le monde au-delà des marais.

— Comment était ta vie là-bas ?

Cette nuit, il avait besoin de parler. Gabriel n'était pas d'un naturel bavard, alors Inwë était ravie de voir qu'il se confiait à elle et était même touchée de cette marque de confiance.

— Calme et simple. C'était une vie parfaite, en tout cas pour moi. Pourtant, j'avais déjà cette envie de partir toujours plus loin, le monde que je connaissais ne me suffisait pas. Mais c'était une belle vie.

— Comment était ta femme ?

— Elle avait les mêmes cheveux flamboyant qu'Alhyx. Cendhra était une femme merveilleuse, si douce. Elle m'a donné une fille magnifique.

— Je suis désolée que Finwë t'ait pris tout ça. C'est tellement injuste.

— Le plus drôle dans tout ça, c'est que j'avais fini par me dire que ça faisait partie de la vie. Je continuais à vivre et je le remerciais de m'avoir offert la possibilité d'avancer.

— Finwë arrive facilement à promettre des choses tant qu'elles sont dans son intérêt !

— Il m'a conduit jusqu'à toi et tu m'as conduit jusqu'à mon frère. Je suis très content de t'avoir trouvée, même si ça a pris du temps.

La légende des deux royaumes [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant