L'ennui de Kuroro

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Et s'il arrivait une fois, une seule fois, que les plus grands méchants ne trouvent plus aucun plaisir à faire le mal ?

S'ils se laissaient aller à l'ennui ?

Avachi sur son lit de fortune, fait de planches couvertes d'un matelas rapiécé à l'allure minable, Kuroro somnolait. Les mains derrière la tête, ses cheveux d'ébènes s'étalant autour de son crâne comme une auréole, il gardait les yeux clos et sa respiration semblait profonde et régulière.

Il faisait juste une sieste.

Cependant, une brise fraiche vint caresser son visage et il ouvrit distraitement un œil, dévoilant l'une de ses prunelles sombres. Il n'en fut pas plus dérangé et tenta, malgré l'air frais qui entrait dans la pièce, de se rendormir. Pourtant, il se redressa rapidement lorsqu'il sentit son visage s'humidifier rapidement ; les premiers flocons de l'année commençaient à tomber.

« Enfin ! »

Le noiraud se leva complètement et s'approcha de la fenêtre cassée de sa modeste chambre puis se pencha par-dessus le rebord. Un sourire enfantin étira ses lèvres et il tendit le bras au-dehors, accueillant les flocons sur sa peau d'albâtre, la paume de sa main se trouvant à plus d'une trentaine de mètres du sol.

Complètement détendu par les mouvements circulaires qu'effectuaient les flocons lors de leur descente, Kuroro resta accoudé à sa fenêtre durant plusieurs heures, observant la ville se couvrir d'un fin manteau blanc qui contrastait avec la noirceur du ciel, dépourvue d'étoiles.

Lorsqu'il rouvrit les yeux, il se pencha sur un vieux réveil qu'il avait dérobé au premier horloger trouvé et ne fut que plus satisfait en s'apercevant que la nuit était déjà bien avancée. D'un pas rapide, il quitta son antre et dévala les marches en béton de l'immeuble désaffecté qu'il occupait depuis plusieurs mois. Arrivé dans le hall d'entrée, qui ne comportait plus de concierge, il s'empara de son manteau et l'enfila rapidement avant de sortir, affrontant la basse température de ces derniers jours. La brise embrassait son visage et faisait virevolter ses cheveux sombres qu'il n'avait pas coiffés de son habituel bandeau blanc ; celui qui camouflait le tatouage en forme de croix situé au milieu de son front.

Il était tard, personne ne prendrait la peine de sortir. Surtout à cette heure si tardive.

D'un pied ferme, Kuroro foulait le sol comme s'il était à la recherche de quelque chose, ou de quelqu'un. Mais malheureusement, ce n'était pas le cas.

Ça ne l'était plus depuis longtemps.

Le chef de la Brigade Fantôme s'ennuyait fermement depuis plusieurs mois. Le monde semblait s'être laissé recouvrir d'une paix ravageuse. Mettant fin aux crimes et aux stratagèmes douteux organisés par les mafias ou autres acteurs. Il n'y avait plus d'enchères qui tournaient à mal, plus d'hommes en recherche de pouvoir, en quête de nouvelles sensations. Tout était devenu calme, paisible.

Les combats entre pratiquants du Nen n'étaient devenus qu'une mascarade, un passe-temps qu'il avait cessé de continuer. La tour Céleste n'était plus qu'un ramassis de débutants plus ou moins prometteurs. Les arènes underground ne lui convenaient plus non plus.

Était-il devenu trop adulte ?

Pourtant, il y a quelques années de cela, il n'aurait jamais rechigné à l'idée de remporter une belle somme d'argent, ou d'expérimenter ses nouveaux pouvoirs qu'il avait arrachés à leur propriétaire d'origine.

Mais non... Kuroro ne se réjouissait plus des mêmes choses. Il ne se réjouissait plus, tout simplement.

Le jeune homme sortit de ses pensées lorsqu'il aperçut les panneaux publicitaires lumineux du plus grand carrefour de la ville ; celui de Yorkshin City. Certains clignotaient, promettant des réductions inédites, d'autres arboraient des couleurs criardes qui transperçaient la rétine. Kuroro protégea ses yeux à l'aide de sa main et traversa le croisement désert en silence. Pas une voiture à l'horizon, ni même un civil solitaire. Non. Ils étaient tous là-haut, dans leur appartement, à fêter le réveillon.

À Chacun Son Réveillon [A Hunter X Hunter Story]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant