Le trouble des faibles

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Arrêt à Baclann.

La ville semblait déserte. Pas l'ombre d'un passant à l'horizon.

Pansy posa un pied sur l'asphalte, le cœur battant à tout rompre. Il fallait qu'elle mange avant qu'il ne soit trop tard. Qu'elle fume aussi ; c'était une question de vie ou de mort.

Le corps vacillant, elle se rua hors de la voiture et abandonna ses compagnons de route pour gagner l'épicerie qui se trouvait à quelques pas de leur emplacement.

Merde, elle n'avait rien pour payer ! Peu importe ! Elle devait se remplir l'estomac, le combler avec ce qu'elle trouverait.

Lorsqu'elle entra dans l'échoppe, diverses odeurs emplirent ses narines et son ventre se mit à gronder sévèrement, comme si elle n'avait pas mangé depuis des lustres. Encore consciente, elle se retourna vers la vitrine pour s'assurer que Hisoka et Irumi l'attendaient ; ce qu'ils semblaient faire plus ou moins.

- Elle n'a rien pour payer.

- Je sais...

- Tu vas aller l'aider ?

- Aucunement – le magicien sourit – il faut qu'elle apprenne à réfréner ce genre de... trouble.

- Tu joues au psy, maintenant ?

- Pas vraiment, non... Mais si elle est un peu maligne, peut-être arrivera-t-elle à s'accaparer quelque chose sans avoir besoin de le payer !

Assis sur le capot de la berline noire, Hisoka observait avec intérêt la silhouette chancelante de Pansy qui menaçait de tomber à tout moment. S'il ignorait d'où elle venait, il aurait pu jurer qu'elle n'était qu'une âme en peine, mendiante et désespérée, en recherche d'un endroit où loger.

Mais Pansy n'était pas de ceux-là. Son âme, à elle, s'était évaporée depuis longtemps.

Une vibration sonore arracha Hisoka de ses songes ; il sortit son téléphone de sa poche et ouvrit le message reçu : Otis.

Il réprima un sourire puis toussota légèrement, comme pour se reprendre, avant de ranger son cellulaire comme si de rien n'était. Irumi, dont rien n'échappait à ses orbes abyssaux, se contenta de garder le silence, conscient du trouble qui avait frappé de plein fouet la face sournoise de son acolyte.

***

Otis s'extirpa de son lit avec difficultés. Tout son corps n'était que douleur, et l'absence de réponse chez son destinataire n'arrangeait rien.

Il avait disparu ; à nouveau.

Le jeune homme soupira, ses yeux bleus voilés par la fatigue. Lentement, il gagna le rebord de sa fenêtre pour s'y assoir et laisser sa tête reposer contre la vitre fraiche, fixant le ciel brumeux et obscur. La lumière du réverbère illuminait la pâleur de son corps, toujours aussi frêle ; sa peau marbrée de plaies ici et là.

C'était ce qu'il aimait le plus chez lui. Sa peau aussi claire que la sienne, mais unie ; dénuée de cicatrices disgracieuses ou de marques bleuâtres qui ne disparaissaient jamais entièrement. Otis aimait cette chair épaisse, bouillonnante et ferme sur laquelle il avait pu se reposer autrefois. Ce corps imposant auquel il s'était si souvent raccroché, ces épaules qu'il avait si souvent embrassées, et ce regard, perçant, lumineux, qui l'avait couvé durant tout ce temps.

L'air bienveillant qu'il était persuadé d'être le seul à connaitre.

Mais aujourd'hui, Otis savait qu'il ne reverrait pas Hisoka avant longtemps. Que dans quelques jours, la haine qu'il lui vouait l'habiterait à nouveau. Et que les seuls contacts qu'il tolèrerait avec lui ne seraient plus que des coups.

À Chacun Son Réveillon [A Hunter X Hunter Story]Where stories live. Discover now