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-Bonne nuit les enfants, faites de beaux rêves!

Mes parents, comme tous les soirs, viennent m'embrasser avant la nuit. Malgré cette phrase censée me réconforter, ça fait bientôt 4 ans que l'insomnie capture mes rêves. Certain disent que c'est à cause d'un choc émotionnel que les insomnies apparaissent, mais je pense plus que c'est héréditaire, de toute façon je me suis résolu a ces nuits vides, et je ne ferai rien pour changer ça : je n'en ai pas l'envie. Je ne veux pas que l'insomnie me quitte, je veux pouvoir lui parler encore un peu, pour changer de la solitude qui m'étouffe en permanence. Mes parents ferment la porte, puis éteignent la lumière du couloir. Je soupire, enlève mes habits pour d'autres, puis fais semblant d'aller me coucher, au cas ou les parents apparaîtraient. Dans quelques minutes, tout le monde dormira, et je pourrai enfin cracher ma peine au monde.

Une petite heure est passée puisque je me permet d'allumer mon ordi. La soudaine lumière de mon écran m'aveugle, et cela me prend quelques secondes pour m'apercevoir que je n'ai aucune notification, rien. Qu'est ce que j'espérai exactement ? Qu'un soudain ami virtuel apparaisse ? Je n'ai même pas de compte sur Youtube, et je n'utilise aucune autre application, n'y trouvant aucune utilité. Je regarde des vidéos revues encore et encore, des sujets qui ne m'intéresse pas, espérant quand même me divertir un minimum. Qu'est ce qui m'intéresse en fait? Je n'en ai aucune idée, je n'ai même pas de matière préférée à l'école. En parlant d'école, l'envie d'y retourner demain ne m'enchante pas du tout. Les gens de mon école sont des poisons, incapable de dire autre chose que des horreurs, ils sont dénués d'empathie. Mais bon, je n'ai pas trop le choix; si je n'y vais pas, je vais rater mes études, et je ne pourrais jamais vivre correctement, c'est ce que mes parents me rabâchent chaque jours. Mon ordi s'éteint. Tellement inactif et inintéressant que même lui en a marre. Il me laisse seul dans le noir, là où toutes mes pensées négatives refont surfaces, mais je me sens à l'aise dans mon malheur intérieur alors cela ne me dérange pas tant que ça.

Je sors finalement de ma chambre avant de me diriger dans celle de ma soeur. Je marche le pas lourd, me souvenant qu'elle devra retourner a l'hôpital la semaine prochaine, et que sa maladie la tue un peu plus chaque jours. J'ouvre la porte de sa chambre tout en veillant à ne pas faire de bruit, pour la regarder dormir, mélancolique. Elle ne peut même plus venir à l'école, je m'ennuie sans elle. Je m'ennuie de ne plus la voir me défendre devant les autres élèves, je m'ennuie de ne plus la voir se prendre des heures de colles à cause de moi et ma faiblesse, ou encore de la voir se battre pour mon honneur et crier pour ma fierté.

Il est 4h du matin. Je préfère de loin aller prendre l'air plutôt qu'errer dans ma demeure comme un zombie. J'enfile des chaussons, et quitte la maison. Je marche dans les rues, sans vraiment de destination, jusqu'a ce que je me souvienne du parc où j'allais étant petit. Les étoiles m'accompagnent, me rassurant avec leur douce lumière, soutenues par la lune et mon insomnie, et je finis par arriver devant le parc, objectif atteint. Éclairé par le lampadaire jaune, je vois deux enfants courir en riant: moi et ma soeur dans notre enfance. Cette époque me manque beaucoup, on était si insouciants, mignons, on travaillait bien, on avait ni maladie ni problème, c'était la belle époque. Je m'assois sur la balançoire, tout en continuant de dessiner le passé. Je me balance doucement, la tête sur la main gauche, et je pense, à tout, à rien, à ce qui me passe par la tête, je regarde le ciel, profitant de la vue que m'offre cette nuit sans nuages. Si seulement ma vie pouvait être aussi belle et dégagée que le ciel ce soir-là...

-Toi aussi t'es insomniaque? Ou bien t'es un psychopathe qui vient faire je ne sais quoi dans un parc à 4h30 du matin? 

Une jeune homme, de mon âge je dirais, se tient debout derrière moi. En pyjama lui aussi, des babouches aux pieds, il me pointe du doigt avec un sourire malicieux.

-Si j'étais un psychopathe, tu ferais quoi?

-Je te dirais que moi aussi.



That's why we are friends now. 

ѕσυℓ мαтєѕWhere stories live. Discover now