22 - DILEMME - Partie 1/2

200 15 163
                                    

Lyria se réveilla en sursaut. Pendant un court instant, elle eut l'impression d'entendre la voix de Kyeran résonner dans sa tête, puis sa poitrine la brûla, l'obligeant à se rouler en boule avec un gémissement. Aux confins de sa conscience, son dragon s'agitait et rugissait de douleur. Cet étrange phénomène se manifestait régulièrement depuis trois jours et un mauvais pressentiment commença à l'envahir. Quelque chose de grave avait dû arriver à l'exterminateur et elle se maudissait intérieurement de ne pouvoir agir.

Suite à sa désertion prolongée, les Red Skulls l'avaient confinée dans un débarras aux murs décrépis qui lui servait de chambre. Aucune décoration n'ornait les cloisons et en guise de couchette, on lui avait donné un matelas dont les ressorts avaient percé le tissu usé à certains endroits.

Lorsque la douleur s'estompa enfin, elle se redressa et hasarda un regard vers le fond du local. Parmi les empilements de malles et de cartons trônait un miroir. C'était là l'unique objet de cette pièce qui demeurait en bon état. Le reflet lui renvoya l'image d'un tatouage sombre circulaire gravé à même sa peau, juste à la naissance de sa poitrine dévoilée.

Dans des temps anciens, on réservait ce sceau aux esclaves, et Séréna n'avait pas hésité à lui infliger ce honteux sortilège afin qu'elle ne puisse plus s'éloigner sans son consentement. Le simple souvenir de la torture provoquée par cette effroyable magie noire lui laissait encore un goût amer dans la bouche.

Quelqu'un frappa à la porte.

— On se réveille, là-dedans ! Séréna te demande.

C'était la voix de Sid. Cet enfant des rues avait rejoint les Red Skulls deux ans plus tôt et depuis le retour de Lyria à la guilde, il avait été assigné à sa surveillance. À présent, elle ne pouvait se rendre nulle part sans être flanquée de ce sale petit humain vicieux. Aussi rusé et perfide qu'un serpent, le garçon usait de son éther pour se dissimuler dans son ombre quand la situation le nécessitait. Ainsi, il pouvait la suivre en toute discrétion sans qu'elle s'en rende compte. Ce n'était donc pas le genre d'individu auquel elle pouvait facilement échapper. De plus, grâce à ses capacités, les Red Skulls savaient désormais que Kyeran possédait l'un des pendentifs recherchés et qu'elle avait échoué à leur rapporter.

— Oh ! Tu t'amènes ? la relança Sid.

— Oui, c'est bon, j'arrive, râla-t-elle en se levant.

Pendant qu'Oz regagnait sa place favorite, elle reboutonna sa chemise. Impuissant face à cette situation, le pauvre xéobrat la fixait de ses grandes prunelles d'obsidienne et émit un couinement anxieux.

Le cœur pincé face à la détresse de son petit compagnon, elle le rassura d'une caresse.

— T'inquiètes pas, j'trouverai une solution pour nous sortir de là, je te l'promets.

Malheureusement, cet espoir lui paraissait futile, car Séréna ne lui accordait plus autant de confiance depuis cet échec et un bon moment s'écoulerait avant que cette dernière ne lui délègue une nouvelle mission. Pourtant, elle s'obstinerait à la convaincre de lui redonner sa chance, juste pour une mince échappatoire.

Après un soupir désabusé, Lyria sortit de la pièce et Oz s'affaissa pour mimer l'apparence d'une simple écharpe. Sid l'attendait, adossé contre la cloison, les bras croisés. L'adolescent de seize ans releva sur elle un regard excédé sous ses cheveux blond sale et lui désigna du menton l'extrémité du couloir.

— La cheffe veut te parler.

Talonnée par son surveillant, elle arpenta le long corridor où des appliques murales diffusaient une lueur jaunâtre. Plus le lieu indiqué se rapprochait, plus son nez se fronçait face aux effluves qui en émanaient. Quand elle poussa les portes battantes, elle déboucha dans la pièce principale et le silence laissa place à une musique assourdissante. Ce son désagréable l'étourdit et les odeurs d'alcool, de tabac, de drogue ou encore de transpiration ne tardèrent pas à lui provoquer la nausée. Elle aurait donné n'importe quoi pour faire demi-tour et regagner le calme de sa chambre désuète. Les oreilles cachées sous ses mains, Lyria parcourut d'un regard écœuré la vaste salle éclairée par des lustres à la lumière tamisée.

MÉMORIA ZÉROOù les histoires vivent. Découvrez maintenant