Chapitre 2: Ne jamais me laisser sur une chaise sans surveillance.

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Lorsque j'apprends qui va être mon binôme, je manque de m'étrangler. Je vais jouer du Roméo et Juliette avec Sébastien!

Une fois qu'il a fini de nommer les groupes, le professeur, avec un sourire de sadique, nous demande de nous asseoir par binôme et de commencer à choisir sur quelle partie nous allons travailler. Et que puisque nous avons deux heures devant nous, on a largement le temps de commencer à récrire notre extrait.

Je me dis que si mes yeux pouvaient vraiment envoyer des éclairs, Mr Dupont serait actuellement décédé.

Le bel italien -devinez qui- s'installe à mes côtés. Il me fait son sourire. LE sourire. Celui qui fait fondre toutes les filles et même les gays. Je détourne le regard, devenue rouge tomate.

"Allez, je m'encourage mentalement. Dis lui quelque chose de cool! Quelque chose d'intéressant !"

- Tu savais que pour qu'un homme ne perde pas ses cheveux, le seul moyen est qu'il se fasse castrer?

Vraiment? J'avais vraiment dis ça? Je vois Sébastien me dévisager bizarrement.

-Ah bon? demande-t-il visiblement curieux et à la fois perplexe.

"Allez Cassandre, c'est le moment de te rattraper!" je songe.

-Oui! Mais ça doit faire mal! Comme quand une fille à ses règles!

Pendez moi immédiatement. Ou poussez moi par la fenêtre. Mais faut faire quelque chose là. Contre toutes attentes, Sébastien se met à rire.

-Tu sais que tu es bizarre toi?

Je ne réponds pas, de peur de sortir une nouvelle bêtise. Je m'éclaircis la gorge avant de lui demander quelle partie il souhaiterait qu'on travaille. Il semble réfléchir. Pendant ce temps, je me balance doucement sur ma chaise. Ça me rappelle le rocking-chair dans le salon de ma grand-mère.

-J'aimerai bien qu'on fasse le moment sur le balcon quand Roméo et Juliette s'annoncent leur amour réciproque.

Ça me surprend tellement qu'il dise un truc pareil que sur le coup, j'oublie de me rattraper et... BOUM! Je tombe en arrière, ma tête heurtant le bureau derrière moi.

Je serre les dents pour éviter de crier.Une douleur aiguë se diffuse dans mon crâne. Bien sûr tout le monde a vu la chute et la classe entière rit à mes dépends. Lorsque je me relève, je me rends compte que j'ai tapé par accident la table de Mélissa. Grrrrh. Elle se moque de moi. J'avale ma salive et retiens de justesse le flot d'insultes que j'ai envie de lui déverser dessus.

Je me remets sur ma chaise, les joues en feu et le crâne me faisant souffrir.

-Ça va? me questionne Sébastien, visiblement remis de ses émotions.

-Oh tu sais, je viens de me ridiculiser devant toute la classe et je vais avoir une bosse de la taille d'une boule de bowling. Ah et aussi, ce matin je suis tombée devant tout le monde et j'ai appris que mon raccourci était en travaux, ce qui va m'obliger à me lever plus tôt chaque matin! Donc oui ça va très bien oui! je lance, ma voix imprégnée d'ironie.

Il plonge ses yeux dans les miens et passe sa main autour de ma nuque.

-J'espère que ça va aller. Désolé si je suis maladroit avec les mots!

Mélissa, qui depuis ma chute ne cessait de ricaner, s'arrête d'un coup. Je l'imagine, à deux doigts de péter un câble. Le sourire revient naturellement.

Soudain, Sébastien se raidit et me demande où est-ce que j'habite. Je lui indique mon adresse, le coeur prêt à lâcher.

- Ça te dis que ce soir je vienne chez toi pour qu'on bosse la pièce?

Je n'en reviens pas. Sébastien Gauci vient de me dire qu'il veut venir chez moi? Enfin bon, c'est pour travailler, mais après, c'est pas grave. J'accepte donc, le sourire aux lèvres.

- Vers 17h30, ça te convient?

-Parfaitement ! répond-il, heureux lui aussi.

Du moins, je l'espère.

Pendant le reste du cours nous passons notre temps à récrire le texte, le rendant aussi moderne et poétique que possible. Avant que la sonnerie ne retentisse, Mr Dupont nous prévient que dans dix jours, il nous fera passer pour la pièce. Au moment où la délivrance sonne enfin, Jeanne se rue vers moi pour que je lui raconte tous les détails de ces deux dernières heures.

-Oh et il vient chez toi ce soir? C'est génial! Mais tâche de dire moins de débilités cette fois!

J'acquiesse puis lui demande avec qui elle s'est retrouvée.

- Avec Alexandre.

-Nan?

Aussi loin que j'éprouve des sentiments à l'égard de Sébastien, Jeanne a un faible pour Alexandre. Ce gars est effectivement très mignon: grand, musclé, le teint hâlé, les yeux noisettes et les cheveux noirs ondulés. Ils sont dans la même troupe de théâtre depuis deux ans. Ils se connaissent donc un peu.

-Et tu vas faire quelle scène avec lui? je demande, ma curiosité piquée au vif.

-La scène du suicide de Roméo puis de Juliette. Et toi?

-Celle du balcon.

Et avant qu'elle ne me pose plus de questions, je saute sur mon vélo et je vais dans un petit coin de paradis. Chez ma mamie Grandy.

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