Chapitre 9: Roméo et Juliette

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Je monte sur la scène, le coeur battant, un creux au niveau du ventre. Je stresse. Je déglutis avant de me souvenir des conseils de Jeanne: me vider l'esprit, inspirer et expirer et me glisser dans la peau du personnage.

Parfait. Je suis Juliette, la jolie nana qui se fait embrasser par DiCaprio dans le film "Roméo et Juliette" (média).

Non. Je suis Cassandre, la geek qui s'est fait embrasser par Sébastien dans la loge.

Une assurance dont je ne connaissais pas l'existence jusqu'à là se glisse en moi et me gonfle à bloc. Je monte sur la scène d'un pas assuré et rejoins mon partenaire, déjà en place.

Wow. Y a quand même du monde. Et Mélissa, qui me regarde d'un oeil triomphant. La colère gronde en moi. Parfait. Elle me provoque. Elle va en voir de toutes les couleurs.

Je commence à jouer. Miraculeusement, je deviens Juliette: je ressens, je pense comme elle. Cette fille déchirée par une guerre de clan. Qui aime le meilleur ami de son pire ennemi. Qui explique, le ventre serré, à son amant, Roméo, que jamais ils ne pourraient être ensemble.

Et Sébastien, si beau, si dramatique,qui essaye par tous les moyens de retenir sa Juliette. Jusqu'à ce qu'il change les répliques.

Il passe ses mains autour de ma taille et me place de façon à ce que mes yeux soient plongés dans les siens.

- Juliette, clame-t-il. Je t'aime. Rien ni personne ne pourra l'empêcher. Mon coeur battera toujours pour toi, quoi qu'il arrive. Ne crois pas ceux qui te disent des mensonges, pour nous séparer. Ils ne veulent que notre malheur. Ils veulent que nous versions des larmes inutiles, que nous nous disputions pour des broutilles. Quant à moi,je veux simplement avoir l'opportunité de te parler, de te toucher, de t'embrasser. Je veux avoir la chance de t'aimer.

Et pour souligner sa dernière phrase, il dépose un léger baiser sur mes lèvres. Nos camarades de classe se mettent alors à siffler, à applaudir et à crier, échappant au contrôle que Mr Dupont avait minutieusement prit le temps d'imposer.

Nous regagnons ensemble le fond de la salle, où ma meilleure amie et son partenaire sont installés. Nous passons devant Mélissa qui n'hésite pas à m'envoyer un regard noir et lourd de menace.

Mais je n'en ai rien à faire. Ce n'est qu'une peste. Rien de plus. Elle ne supporte pas le bonheur des autres.

Je m'assois à côté de Jeanne qui me félicite chaudement pour mon interprétation. Mais elle omet de complimenter mon petit ami sur la qualité de son rôle. Et lorsqu'il entoure mes épaules de son bras, elle me dévisage avec un mélange d'exaspération et de désolation. Il faudra que je pense à lui parler. Elle devient étrange.

Le temps passe. Les groupes aussi. Quand vient le tour de la peste au tie and dye rose, je m'attends au pire. Et j'ai bien raison.

Elle fait une sorte de copie de l'histoire que Sébastien et moi avons créé, mais en plus vulgaire et grossier. Elle gesticule comme une dinde, hurle, s'accroche à la chemise de Bryan, son partenaire, comme si elle voulait l'arracher. Et pour le final, ils s'embrassent. Pas comme nous durant la pièce, avec douceur, légèreté. C'est vulgaire, horrible.

Il a plaqué ses mains contre ses fesses et elle a glissé les siennes sous sa chemise et ils commencent à s'embrasser avec la langue. C'est dégoûtant. On verrait de la bave couler, on ne serait pas surpris. Du coin de l'oeil, j'aperçois le professeur de français prendre une drôle de mine. Je redresse mes lunettes, souriant intérieurement.

C'est au tour de Jeanne et d'Alexandre. Elle s'allonge au sol et lui arrive. Ça commence.

Le jeune comédien entre dans la peau d'un Roméo torturé, dévoré par les remords d'avoir laissé seule sa dulcinée. Une telle souffrance est gravée sur son visage qu'elle en est presque palpable. La salle entière est silencieuse, suspendue aux lèvres des deux acteurs sur scène.

Quand Roméo se tire une balle dans la tête, c'est le moment choisi par Juliette pour se réveiller, encore abrutie par les somnifères. Elle hurle en voyant le cadavre de l'homme qu'elle aime. Jeanne est totalement différente. J'en oublie presque que je la connais et qu'elle est ma meilleure amie. Elle crie, elle pleure, elle frappe le sol, la tête de Roméo bercée contre sa poitrine. Les joues baignées de larmes, elle demande pourquoi il a pensé qu'elle était morte, alors que non, qu'elle utilisait des somnifères à cause des cauchemars qui l'habitaient chaque nuit. Elle implore le ciel de le sauver, rien que lui, juste cette fois. Puis, voyant que personne ne répondra à sa prière, elle serre Roméo dans ses bras et se suicide. Ils restent allongés au sol, enlacés.

Mes yeux me piquent et je surprends de nombreuses personnes à essuyer discrètement une petite larme qui roule sur leur visage. Quand nous comprennons enfin que la scène est terminée, nous nous levons tous, et applaudissons de plus en plus fort. 

Alexandre et Jeanne se redressent et saluent le public, faisant redoubler les acclamations. Quand ma meilleure amie nous rejoint, je la serre dans mes bras, fière d'elle. La sonnerie retentit et nous quittons tous la salle en trombe, certaines personnes glissant quelques félicitations aux deux excellents acteurs. Dès qu'on nous laisse enfin tranquilles, j'entraîne ma meilleure amie dans un coin. Je lui demande de s'expliquer à propos de son attitude envers Sébastien. Elle soupire.

- Remémore toi les paroles de Mélissa. Tu verras que quelque chose est étrange. Et qu'il t'a menti.

Elle me laisse à mes pensées. Je tente de comprendre ses mots. Mon petit ami m'aurait menti. Je ne vois absolument pas ce que... Oh mon dieu, j'ai compris.

Mélissa avait dit "après qu'il soit partit de chez Cassandre...".

Et je sais pertinemment qu'elle ignorait cette information.

Alors? Bon chapitre? Héhé j'espère que ça vous a plu!!
Bon eh ben voilà voilà, vous aurez la suite dès que j'aurais 5 votes!

Bisous bisous!!

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