17. Ricochet (1/2)

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L'arrêt sur image sur la télévision du grand salon hypnotise les candidats. Instinctivement, Achille et Diane se sont écartés de Maxime. Dorothy se relève, les yeux baignés de larmes.

– Pourquoi il nous montre ça ? Demande-t-elle, péniblement entre deux sanglots.

Maxime déglutit, sous les regards qu'il sent accusateurs. Il se défend :

– Je...je ne sais pas. Ce type est cinglé ! Alors, quoi, j'ai la gagne, et alors ?

Mais l'atmosphère s'alourdit encore davantage.

Ziad sait qu'ils doivent être prudents. Il l'observe, tente de lire son regard, scanne ses traits comme on le lui a appris. Maureen et Lilia restent près de Dorothy, espérant la calmer. Mais les deux jeunes femmes commencent sérieusement à flipper. Maxime leur apparaît sous un tout nouveau jour. 

Maureen se surprend à revivre leur rencontre aux premiers jours des auditions. Elle lui avait trouvé une tête de «petit con ». Voilà que cet étrange ressentiment  revenait décuplé.

– Le tueur a forcément un complice ! 

Achille les surprend tous. Il bondit sur Maxime et le saisit pas le col.

– C'est toi le barjot ! On a tous bien entendu ! Rugit-il.

Le jeune homme, apeuré, se tortille et parvient à se libérer de son emprise, glissant comme une anguille entre ses mains. Il s'empare d'un tesson de bouteille et menace :

– N'approchez pas !

– Non mais t'as fait quoi ?! s'écrie Diane. Non, mais calme-toi ! Écoutez, il était avec nous en haut. Il aurait pu nous faire du mal ! Hein, Dorothy ?

Mais la jeune femme le fixe de son regard d'ombres, sans pouvoir rejoindre l'avis de la candide blonde.

– Je n'ai rien fait ! Rien !

Achille se rapproche, le tesson fouette l'air.

– On se calme, doucement ! tempère Ziad comme s'il voulait apaiser un étalon en furie.

Maxime serre si fort le verre qu'un filet de sang goutte de son poignet, et son attitude de dément ne lui rend pas justice. 

Tous n'y voient plus qu'un homme vulnérable, démasqué, et donc dangereux.

– C'est évident, quand on y pense, poursuit Dorothy. Pourquoi le tueur ne t'a rien fait à toi ? Tu étais seul quand tu es venu nous chercher ! Qu'as-tu fait ?

Diane craque et se plie finalement à l'avis de Dorothy.

– Qu'est-ce que vous nous voulez ? hurle-t-elle.

– Vous êtes fous ! Vous êtes fous !

Maxime hurle, rouge de panique et de colère mêlées. 

– Il vous embobine la tête ! C'est ce qu'il veut ! Réfléchissez ! Putain, réfléchissez...

Maureen et Lilia retiennent leurs larmes devant cette scène qu'elles trouvent toutes deux insoutenables.

– Mais on t'as tous grillé ! Tous ! C'est bien de ta bouche que sont sortis ces mots ! C'est bien toi, là, sur l'écran, putain d'enfoiré !

– Ah ! Me touchez pas !

Maxime s'agite frénétiquement, et fait siffler le tesson de bouteille alors qu'il attaque. Malgré  la menace, Achille, Diane, puis Dorothy tentent de s'approcher.

– Dégagez ! Dégagez ! Je vais vous plantez !

Il touche Achille. Le jeune homme recule, puis revient à la charge, sans hésiter. Il lui arrache le tesson en frappant sa main avec la tringle, un bruit d'os cassé se fait entendre en même temps que le hurlement de Maxime. 

Dorothy se jette sur lui, il tombe à la renverse. Puis Ziad et Achille immobilisent du mieux qu'ils peuvent ses bras et jambes, évitant les coups.

– Laissez-moi, pitié, laissez-moi ! Vous vous trompez ! Argh !

Dorothy presse ses épaules au sol, il donne un coup de tête et un filet de sang coule de l'arcade de la jeune femme.

– Enfoiré !

Achille l'assomme. Diane, révulsée, ferme les yeux.

– Ne le tuez pas ! crie Maureen.

– Faut l'attacher ! 

Achille se masse les phalanges puis défait les cordons des rideaux du grand salon, Maxime est alors saucissonné.

– Ça va ?

Dorothy répond par l'affirmative. Diane appuie son t-shirt sur sa blessure.

– On l'enferme ici !

– Attendez !

Dorothy tire sur le rideau et recouvre le corps refroidi de son frère.

– Je ne peux pas le laisser comme ça, affirme-t-elle.

Son coeur est lourd alors que Ziad referme les portes du grand salon et immobilise la poignée.

– Comment crois-tu qu'il puisse ouvrir, pieds et poings liés ? lui demande Dorothy.

– Je me méfie de tous. N'oublions pas que le tueur est toujours dans les murs.

Puis ils sortent de la maison et se posent sur les bancs de la terrasse, frissonnants malgré l'air caniculaire.

LE MAESTROWhere stories live. Discover now