29. Obstacle (2/2)

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Dans sa maison de campagne, Alexis veille, tout comme ses potes.

Il a bien essayé de trouver le sommeil, mais rien à faire, il a envie de s'arracher les cheveux.

Loin de partager les contenus obscènes, affligeants, que médias licites ou illicites balancent depuis des heures, si lui regarde le Live de la Résidence, c'est pour trouver une solution.

Il est déjà marqué par ce qu'il a vu et sait que ça restera gravé dans sa mémoire à tout jamais.

Avec ses deux meilleurs amis, voisins de département, ils échangent leurs théories sur un groupe privé, alimenté également par des internautes du monde entier. Mais c'est surtout les avis des français qui l'intéresse, puisque le lieu de la Résidence est forcément sur le territoire.

Chaque scène est analysée, découpée.

Alexis se triture les méninges pour trouver l'indice qui les mènera sur la bonne voie. Un des internautes, géologue, affirme que le granit vu dans le jardin et dans le grand salon a toutes les chances de provenir de Bretagne, région où le jeune homme vit.

Rivé sur son ordinateur depuis des heures, il ouvre une vingtième page dans son navigateur. Depuis que les nuages ont libéré la Lune, il scrute les captures d'écran du jardin. Sur son téléviseur, il a réussi à brancher le Live qu'il suit également.

La lumière de l'aube commence à pointer.

Maureen apparaît à l'écran, investissant le jardin en premier. Il ne sait pas pourquoi elle le touche. Sa force de vivre, son caractère dans cet enfer, ne peuvent que lui faire honneur.

Alexis se sent investi d'une mission. Il ne peut se résoudre à la voir mourir et veut les sauver.

Sur les réseaux, les internautes s'excitent.

Le tueur est calme depuis longtemps et joue avec les nerfs de tous. D'autres lancent des paris, sur la prochaine victime, sur le ou les survivants potentiels. Les sommes atteignent des monts astronomiques.

D'autres crient au complot, mais Alexis en est convaincu : aucun acteur ne peut jouer comme ça, et aucun effet spécial ne peut être si cru, si réel. Et puis les politiques et les médias n'auraient aucun profit à tirer de cette catastrophe.

– Je frappe depuis deux minutes. Encore debout, Alex ?

Son père entre dans la chambre.

– Je suis déphasé, répond-t-il sans arrêter.

Son père s'assoit sur le lit en désordre. Il ouvre la boîte de pizza mais elle est vide.

– T'es encore là-dessus. Ecoute, je sais que t'es adulte, et que je ne suis que ton vieux père, mais ça ne me plaît pas trop.

– On doit pouvoir faire quelque chose... On ne va pas laisser faire ce connard de cinglé de pourri d'enflure !

Il hoche la tête, résigné devant l'attitude de son fils. Sa main rencontre la télécommande, il monte le son.

Mélissandre écoute Lilia :

Le monte-charge descend jusqu'à la plage, explique-t-elle en lui indiquant la direction.

Ziad ferme la marche avec Rocco. Maureen et Lilia réexpliquent le plan prévu.

Alexis jette un œil sur son père qu'il découvre absorbé.

– C'est... bizarre.

Il se lève pour voir l'écran de plus près, détaille des yeux la pinède.

– Quoi ? Quoi ? Tu connais ? demande Alexis avec vigueur, bien que peu optimiste sur la réponse.

Son père s'approche de lui, et se penche.

– Dis-moi, Alex, t'as d'autres photos du jardin ?

– Oui, des centaines, des milliers ! Regarde !

Alexis fait défiler les captures d'écran, son doigt virevoltant sur la touche d'avance rapide. Son père scanne chacune d'elle, sans oublier de vérifier la télévision où les quatre malheureux progressent dans le jardin.

– La fontaine et le kiosque bordent une piscine ? demande-t-il.

– Oui, oui !

– Là ! crie-t-il.

Alexis fait pause. Pour lui c'est une pinède simple. Pour son père, c'est le pin d'écorce douce, celui qu'il a pu sauver après la tempête de 1999.

– Putain, je sais où c'est : la Villa Dolorès. J'ai rénové le jardin après la tempête !

Leur respiration se bloque.

Puis ils découvrent sur le Live, l'homme-silhouette sortant de sa tanière et savent que le temps est compté.

Ils dévalent les marches.

– Attends, tu vas faire quoi ?

– Préviens les flics ! Je prends le zodiaque !

Alexis arrache les clés du portant et fourre le téléphone dans la main de son père.

– T'es cinglé, Alex ! Non !

Il l'implore :

– Papa, faut y aller ! Le temps qu'ils interviennent, il sera peut-être trop tard !

LE MAESTROOù les histoires vivent. Découvrez maintenant