Chapitre 30

44 15 26
                                    

« Il était temps ! »

Loïs se tourne vers Ana qui regarde ses deux amis enlacés. Elle semble attendrie par la scène qui se joue sous ses yeux. Elle a raison. Depuis tout ce temps où leurs sentiments dansent comme des flammes, leur léchant le cœur et les joues, il était temps qu'ils se retrouvent. Il est heureux pour eux. Ils ont l'air si bien ensemble, moins tourmentés, plus forts. Leurs corps vibrants à l'unisson de leurs cœurs accordés.

Puis, soudainement, ils semblent se rendre compte que le temps ne s'est pas arrêté autour d'eux. Ils pivotent vivement vers leurs amis qui les observent. D'un échange de regard, ils se décident à les rejoindre. Quand Éridan arrive à sa hauteur, Loïs lui envoie un léger coup dans l'épaule. Il ne parvient même pas à simuler l'agacement tellement le sourire qui s'est installé sur ses lèvres est grand. Puis, la soirée reprend comme si de rien n'était et les cinq amis se dirigent sur la piste de danse, enjoués et prêts à oublier l'existence du temps.

Un autre groupe a pris la relève et commence à faire sonner les accords du synthétiseur. Rapidement, l'énergie tombée durant l'entracte se réveille et les fêtards se remettent à s'agiter. Ils sautent au rythme de la mélodie, chantent les refrains qu'ils connaissent si bien. Loïs voit ses amis s'amuser et rire comme ils en ont l'habitude. Entre deux flashs de stroboscopes, ils se déhanchent et tentent des mouvements de plus en plus loufoques. Mutuellement, ils se font rire dans la sphère enchantée qu'ils ont créée autour du petit cercle formé par leurs corps déchaînés. Ils sont essoufflés et transpirants. Pourtant, ils ne peuvent s'arrêter. Ils se laissent aller à cette symphonie de rires et de musiques pop.

Puis inévitablement, le spectacle prend fin et les artistes descendent de scène. Loïs a l'impression que la soirée n'a duré qu'une poignée de secondes. Pourtant, quand ils sortent, la nuit est tombée depuis longtemps. La lune diffuse aux étoiles sa douce lumière. De nombreuses voitures attendent les lycéens devant l'établissement. Sur les trottoirs bordés de lampadaires, il voit les adolescents disparaître dans des véhicules ou au loin au bout des rues.

Leurs corps arrêtés sur le devant du trottoir, ils le comprennent, aucun d'entre eux ne souhaite rentrer. Ils sont encore pleins des notes de musique et des percussions. Ils n'ont pas sommeil, pas faim, pas soif. Ils se sentent juste vivants, nourris par l'énergie de l'ambiance étrange et unique de cette soirée d'été. Leurs pas les mènent sur les pavés de la ville comme instinctivement. Cinq aimants attirés par une destination encore inconnue.

Au bout d'un moment, plus un chat ne les entoure. Ils se sont trop éloignés de l'établissement et de la foule. Seuls les astres les observent de haut. Parfois, les phares d'une voiture solitaire révèlent ce groupe hétéroclite et bruyant. En tête de file Ana encore pleine d'énergie, trottine sur les dalles froides, ses escarpins dans une main et les pans de sa robe dans l'autre. Elle sautille se retourne vers ses amis dans des pirouettes irrégulières. S'exclamant et riant aux éclats à une blague ou une discussion. Charlie avec son éternelle guitare sur le dos avance en continuant à chanter sous les demandes d'Ana. Romane l'accompagne en riant, perchée sur le dos d'Éridan. Loïs se fait par moments entraîner dans les danses de ses amis. Ce petit groupe transporte avec lui les dernières lueurs de la fête en espérant la prolonger encore un peu.

Loïs sent son cœur exploser de plénitude et de bonheur à chaque rire et chaque pas en la compagnie de ses joyeux partenaires de soirée. Il a l'impression que dans leur marche nocturne, ils pourraient très bien faire le tour du monde. S'échapper vers des horizons nouveaux. Parcourir le globe, s'enfuir vers une autre dimension. Ils sont invincibles dans le faible éclairage urbain.

Puis finalement, les rues leur deviennent familières. Ils reconnaissent dans halo grésillant l'entrée d'un parc, l'entrée du parc.

Le chemin de gravier n'est éclairé que sur les premiers mètres grâce à la lumière de la ville. Puis au-delà, la pénombre s'est installée. Ce lieu si familier dégage une ambiance totalement différente de d'habitude. Étrange. Peut-être même féerique. Les branches se joignent à la danse des adolescents à chaque mouvement du vent.

Jusqu'à s'envolerWo Geschichten leben. Entdecke jetzt