Chapitre 20

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Juste devant son nez, on claque des doigts.

Après avoir cligné des yeux plusieurs fois, Loïs lève son regard vers celle qui l'a sortie de ses pensées. Cette dernière, alors penchée au-dessus de la table, se rassoit et pose sa tête au creux de sa main. Ses sourcils fins sont haussés dans une moue agacée. De son autre main, elle joue avec un stylo. Elle attend quelque chose et au vu de son regard insistant, il se doute que cette chose doit venir de lui.

« Hum... Oui ? »

Elle soupire d'exaspération. Puis retire sa joue de sa main.

« J'ai l'habitude de parler dans le vide, mais tu mets mes capacités à rude épreuve.

– Je suis désolé, Ana. Je suis un peu fatigué.

– T'as divorcé avec Éridan plutôt...

– J'ai quoi ? » bredouille-t-il, surpris.

Qu'avaient-ils tous à lui parler de divorce aujourd'hui ?

« Nan, mais sérieux, si Éridan n'était pas sorti avec Romane. J'aurais mis ma main à couper que vous étiez ensemble ! Toujours fourgués à côté, vous passez votre vie chez l'un ou l'autre, vous avez même un langage commun que personne ne comprend ! Quand t'es pas là, Éridan s'inquiète comme un malade et puis quand vous vous disputez, on dirait que c'est la fin du monde. Vous êtes louches, les gars ! » énonce-t-elle malicieusement.

Loïs reste de marbre.

« Allez, au moins un sourire, c'était pour rire, reprend-elle. Bon, il s'est passé quoi avec Éridan ?

– T'as fini ton équation ?

– Essaie pas de contourner la question, ça marche pas avec moi.

– L'équation ? » réitère-t-il, ennuyé.

Elle soupire et continue de faire tourner son Bic entre ses doigts. Loïs la regarde réfléchir. Son cerveau à lui tourne dans le vide. Éridan l'a évité toute la matinée, ne laissant aucune occasion de clarifier les choses. Puis, à midi, il est parti le téléphone collé à l'oreille avec un mouvement vague de la main en guise de salutation. Loïs rumine sa frustration. Il aimerait tellement rentrer chez lui, s'enfermer dans sa chambre et ne plus bouger jusqu'au lendemain en espérant se réveiller d'un mauvais rêve. À la place, il passe un regard circulaire sur la salle d'étude étouffante. Ils sont presque seuls, rien ne semble assez intéressant pour le distraire à part l'expression concentrée d'Ana, alors, il la dévisage à la dérobée.

En réalité, il pourrait se la représenter les yeux fermés. Ses joues rondes ponctuées de taches de rousseur presque imperceptibles sur sa peau bronzée. Ses yeux noisette toujours pétillants de vie. Son nez en trompette qu'elle déteste alors qu'il lui va si bien. Les vagues dans ses cheveux châtains, qui lui cachent l'œil gauche la plupart du temps. En cet instant, il ne manque la fossette dans sa joue droite quand ses lèvres s'étirent dans un sourire. Juste l'observer l'apaise un peu.

Soudainement, elle gribouille son cahier rageusement.

« Loïs, il s'est passé quoi avec Éridan ? Pas savoir m'empêche de réfléchir ! s'exclame-t-elle.

– Ils s'est rien passé. Termine tes maths, réplique-t-il, peu amène à aborder le sujet.

– On s'en fiche des maths ! Et puis j'en ai plus qu'assez, se lamente-t-elle. Si j'avais su, j'aurais fait comme Charlie. En L, on le torture plus à coup de suites et de logarithmes !

– C'est toi qui m'as demandé de t'aider et je compte bien le faire jusqu'au bout. L'équation va pas se résoudre toute seule.

– Mon cerveau en a trop fait pour aujourd'hui ! Je déclare la session terminée, affirme-t-elle solennellement. Maintenant, raconte-moi le problème avec Éridan.

Jusqu'à s'envolerحيث تعيش القصص. اكتشف الآن