La Dernière Éclipsal - La Prophétie

XXVIII - Chapitre 28

     J'avais l'impression de suffoquer. Ysmereth nous guidait depuis déjà un bon moment dans un éternel dédale de tunnels sombres et humides. Plus nous nous enfoncions dans la montagne, plus je sentais que l'air ne pénétrait plus mes poumons. Un coup d'œil rapide aux deux femmes devant moi me fit comprendre que j'étais la seule à éprouver cette désagréable sensation.

     Une énorme boule se forma alors dans le creux de mon estomac et des bouffées de chaleur me montèrent au visage. Il faisait pourtant assez froid dans le tunnel. Assez pour que notre souffle se transforme en petits nuages de vapeur. De gros frissons me parcoururent les bras et je les frottai de mes mains.

     En plus du stress qui me rongeait de l'intérieur, je ressentais des petits chocs, mais j'ignorai ces derniers pour me concentrer sur le chemin. Plus on se rapprochait, plus ils devenaient forts. Si fort que je laissai mon genou tomber sur le sol, empoignant fermement ma poitrine d'une main. Ma vision se brouilla, mais je fis mon possible pour me remettre debout malgré la douleur.

     Les deux femmes se retournèrent vers moi en entendant mon genou heurter le sol. Je levai les yeux vers Lexie et malgré ma vue floue, je fus tout de même en mesure de discerner l'inquiétude dans les yeux de mon amante.

     Lexie passa son bras derrière moi pour m'aider à me relever et me soutenir. Elle s'apprêta à parler, mais Ysmereth la coupa, "Ne t'en fais pas : c'est tout à fait normal. C'est le sceau qui réagit avec la présence du grimoire."

     Elle acquiesça, puis m'aida à marcher. Je n'étais plus totalement lucide, mais en plus de la douleur qui m'empêchait de bouger comme je le voulais, je ressentais une vibration familière. Vibration que j'avais éprouvée deux fois seulement lorsque ma magie menaçait de se manifester contre mon gré.

     Les deux femmes se mirent à parler, mais je n'entendais plus rien. Pourquoi le sceau réagissait de la sorte ? Pourquoi Lexie tremblait autant et n'émettait plus de chaleur ?

     "Encore une fois, je ne peux pas aller avec vous, mais vous n'avez qu'à suivre le couloir pour arriver dans une immense caverne truffée de pièges. Ils ne déclencheront pas, mais faites tout de même attention," annonça l'elfe avec une expression de regret.

     Les rouages dans ma tête se mirent en marche malgré mon état. Si Lexie pouvait venir, mais pas Ysmereth c'est qu'il y avait une raison. Avais-je raison de penser que nous possédions un certain lien ? Ou était-ce tout simplement parce que je n'étais pas en mesure de me déplacer correctement ? Les questions restèrent en suspens dans mon esprit.

     Le couloir s'étira pendant encore un petit moment avant de déboucher sur une immense caverne éclairée comme en plein jour. Ysmereth avait raison.

     En sortant du tunnel, c'est comme si la pression qui était exercée sur mes poumons fut levée. Je pus respirer un peu plus, mais la douleur qui me tordait toujours n'aidait en rien.

     Levant le regard avec difficulté, je vis que la caverne était en fait les ruines d'une ancienne civilisation qui avait vécu sous terre. Il y avait tant de piliers entourés d'escaliers, de portes et de maisons en ruine que je ne savais pas où regarder. Des nuages de poussière se soulevèrent du sol à chacun de nos pas, obstruant nos vues.

     "Où penses-tu que nous devrions aller ?" me questionna Lexie en soutenant mon regard de ses billes embrasées.

     Simplement tenter de parler me faisait souffrir, mais je parviens tout de même à répondre à sa question. "On pourrait peut-être commencer par la porte là-bas," lui dis-je en pointant vaguement une porte délabrée au loin.

     Je n'avais aucune idée où nous allions, mais il fallait bien trouver notre chemin dans ce dédale de ruines. Ysmereth aurait pu nous guider un peu plus. Lexie lâcha un peu sa prise sur mon épaule pour me permettre de marcher quelques pas. Je tenai à peine debout et faisait probablement pitié à voir. Cela me rappelait lorsque j'avais eu mes ailes plusieurs mois auparavent. Voyant que je pouvais pas me déplacer sans elle, Lexie se replaça pour continuer à me soutenir.