La menace

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Le premier plat avait été servi. Je me retrouvais devant une soupe fumante à la couleur orangée. C'était une soupe de courge accompagnée d'éclats de marron. Elle fût délicieuse et réconfortante. Une fois terminée, une servante me débarrassa de l'assiette creuse.
J'étais restée sage dans mon coin, écoutant les conversations qui se croisèrent à l'intérieur du chapiteau.
Une autre course avait lieu: celle de la distribution du deuxième plat. Une salade de crudités avait été posée devant chaque convive. Une salade verte composée de carottes et de courgettes râpées accompagnée de champignons tranchés en fines lamelles.
Des rires montèrent dans les airs, provenant de la table de Legolas. Tous riaient des grimaces de Gimli. D'après ce que je pouvais entendre et voir, j'avais compris que la verdure n'était pas sa tasse de thé.

_ "Où est le porc caramélisé? Vous ne servez pas d'aliments qui se mangent. Connaissez-vous la viande?" Il avait pris une feuille de salade et l'avait jetée dans son assiette avec un air de dégoût.

J'étirais mes lèvres et rigolais des frasques du maître nain.
L'insouciance régnait à cette table.
Les discussions des grands seigneurs étaient barbantes et ennuyeuses. Je rêvais discrètement d'être installée à la table du nain. Ils avaient l'air de bien s'amuser.
Le train-train du service avait recommencé: débarrassage et service d'un autre plat. Du gibier était au menu.

Je regardais mon assiette avec beaucoup d'appréhension. Je commençais à saturer, prête à exploser. Je picorais deci-dela dans l'assiette.

_ "Thranduil!"

Il se pencha vers moi afin de m'écouter.

_ "Va-t-il y avoir encore beaucoup de choses à manger? Lui demandais-je.

_ "On nous a présenté: la soupe, la salade et le gibier. Y compris ce plat, il reste encore quatre plats."

_ "Que reste-t-il à manger?"

_ "Tu as devant toi du gibier; ma foi, parfaitement cuit. Ensuite, viendra la viande ou la volaille, tout dépend de ce que les hôtes ont décidé. Puis il y aura du poisson et enfin le dessert pour clôturer le repas."

Avec la pointe de la fourchette, je ne faisais que jouer avec les aliments contenus dans mon plat.
Suite à l'énoncé du menu, j'avais posé mes couverts. Je ne voulais plus rien mettre dans ma bouche. Bien sûr, je gardais une petite place pour le sucré.

Le vin coulait à flot. Les esprits étaient détendus. Certains convives s'étaient enivrés du délicieux nectar. Trois couples dansèrent au milieu de la salle. Ils avaient abandonné l'idée de se substanter. Les danseurs se donnèrent corps et âmes à la fête. Ils virevoltèrent avec légèreté au gré de la musique. Ils étaient beaux à regarder. Leurs pas étaient légers et leurs gestes remplis de grâce. La piste de danse fut vite remplie; d'autres elfes les avaient rejoint assez rapidement.

La journée toucha à sa fin. Le Soleil atteignit l'horizon. Il céda sa place à la Lune. L'astre incandescent lui avait remis la clé des cieux. La myriade d'étoiles nocturnes semblaient veiller sur nous.

Un soldat se glissa sous la tente. Personne ne fit attention à lui dans toute cette cohue. Il chercha du regard le capitaine de la Lórien. Une fois trouvé, il se dirigea vers lui. Il se pencha et murmura quelque chose à l'oreille de Haldir. Toute joie avait quitté son visage. Il était concentré sur les propos du soldat. Il avait pris un air sérieux. Le capitaine jeta un regard sombre à Legolas et à Erestor. Ils se levèrent tous les trois, simultanément, et ils quittèrent rapidement la tente. Le nain les avait suivis dans leurs courses.
Thranduil avait remarqué l'arrivée du messager. Leur manège ne passa pas inaperçu auprès de mes voisins de tablée, qui avaient été les seuls à remarquer ce départ impromptu. Ils comprirent que quelque chose d'inquiétant se tramait. Discrètement, le grand roi Thranduil passa sa main sous la table et il vint la mettre sur mon ventre. Je fus agréablement surprise de cette marque d'attention. Instinctivement, je posa ma main sur la sienne et j'admirais tous les traits de son visage. J'étais étonnée de ce geste si intime, fait en public. Son regard avait une étrange lueur. Il me regarda droit dans les yeux. J'avais soutenu son regard.
L'espace d'un court instant, nous nous étions retrouvés dans une bulle hermétique aux événements extérieurs à notre couple. Nous restâmes ainsi à nous fixer. Aucun bruit ne parvenait jusqu'à nous. Rien d'autre n'existait, à part nous deux. J'avais pu déceler de l'inquiétude de la part de mon époux.

LÉNA OU UN ETRE PEU ORDINAIRE Where stories live. Discover now