CHAPITRE 17

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« Là où j'étais le plus heureuse, c'était quand il venait juste s'allonger à côté de moi et que je sentais presque le poids de son corps contre le mien. Sa présence faisait taire ne serait-ce que quelques secondes le crépitement de l'angoisse qui faisait grincer mon sang contre mes os et l'espace d'un instant je me sentais fondre, comme si j'étais toute molle. »





Je quitte la maison à 15h27. Dehors il pleut un peu, mais ça me fait du bien, de sentir l'eau sur mon visage. J'ai l'impression de ne pas avoir senti l'air extérieur depuis une éternité... Alors que ça ne fait que deux jours. Deux long jours.

On ne va pas dire que j'ai passé un week end désastreux. C'était désastreux. Pire que désastreux même. Je déteste Hortense, je déteste son « colocataire » et je déteste mes sœurs de ne rien comprendre à la situation. Je me déteste aussi, mais moi c'est habituel.

Au final, la seule personne que je ne déteste pas pour le moment, c'est Harry. Après mon coup de fil en pleine nuit, il m'a envoyé des messages. On a un peu parlé. C'était bien. Je me sens bien, quand je lui parle, et je crois que lui aussi. Je lui ai demandé pourquoi il voulait me dessiner, et il a dit que c'était comme ça, qu'il y avait des choses dans la vie qui ne se décidait pas et que lui avait besoin de faire mon portrait. Si tout le monde avait ce genre de rêves simples, la vie serait amusante.

J'ai dit oui en tout cas. C'est pour ça que je suis dehors maintenant. Harry m'a dit qu'il m'attendrait devant le parc, et qu'on irait dans son atelier. Il a un atelier. Je trouve ça cool. Je l'imagine avec un pinceau derrière l'oreille, dans une jolie véranda, avec pleins de toiles autour de lui, et une odeur d'acrylique. Peut être même qu'il aurait des traits verts sur la joue, qu'il se serait fait sans faire exprès, dans un élan incontrôlé d'inspiration.

Mon portable vibre dans ma poche mais je suis presque certain qu'il s'agit de Tess alors je répondrais après. Elle m'envoie toujours des messages le lundi, pour que l'on se retrouve le soir. C'est le seul jour où elle finit tôt, mais je n'ai pas envie d'aller chez elle aujourd'hui. Et puis Harry est déjà là de toute façon, devant le portillon du parc, alors j'oublie bien vite le message. Il a un jean délavé, un pull gris et sa veste noire, mais contrairement à d'habitude, il porte un parapluie et je ne peux pas m'empêcher de penser qu'il a l'air ridicule là dessous. En règle général, je trouve que les parapluies sont de toute façon des objets ridicules. Je préfère les capuches.

Je m'approche de lui et il sourit légèrement, mais je sens qu'il est simplement terriblement tendu. Moi aussi, je le suis.

" Bonjour. Tu vas bien ?

Je hausse les épaules.

- Oui, ça va.

- Ok.

Il se mordille la lèvre et je déteste ce silence là. Plein de gêne. Je ne veux pas être gêné avec lui, ça n'est pas normal. Le problème c'est que je ne sais pas quoi lui dire.

- Il faut prendre le bus.

- Ah ? D'accord...

Il me sourit à nouveau, et il a un air très mignon. Comme un gamin. Je crois qu'il est vraiment content, je ne comprends pas trop pourquoi, mais ça me fait plaisir.

On marche jusqu'à l'arrêt de bus et il me propose de venir sous son parapluie mais je refuse. Il n'insiste pas, je me mets à fixer la chaussée. On est pas sur la ligne à laquelle je m'attendais. Je pensais qu'il habitait de l'autre côté de la ville, quartier résidentiel, mais apparemment on va se diriger vers la zone nord. Je ne suis jamais allé par là, mais je sais que Jeanne a déjà bossé dans un restaurant de ce coin, et elle devait prendre cette ligne de bus.

Sensations - Larry StylinsonWhere stories live. Discover now