Vingt-sept.

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Je reconnais les pavés sous mes pieds, en pilote automatique je suis revenue à l'appartement. Je n'ai plus envie de rester ici.

La moto. Sa moto est là.

Assis par terre à coté de la porte d'entrée, il fume une cigarette. Un monticule de mégot à coté de lui me fait comprendre qu'il est là depuis un certain temps.

Le bruit de mes pieds qui trainent le fait réagir dans ma direction. Il se relève précipitamment.

 - Liv, putain t'es là ! on te cherche partout!

 - Je suis là.

J'entends cette voix sans forme qui sort de moi, j'ai l'impression qu'une autre personne répond à ma place.

Vu sa tête, lui aussi.

 - Qu'est-ce que tu veux Magnus ?

Il déglutit l'excès de salive qu'il a dans la bouche, il se donne du courage ?

 - Juste m'assurai que tu étais en sécurité.

 - Je vais bien.

Il avance d'un pas, approche sa main de moi, sans me toucher ;

 - Je ne pense pas.

Je n'ai pas envie qu'on me touche, je croise les doigts pour qu'il garde ses distances avec moi.

- Ce n'est pas contre toi, mais je n'ai pas envie de parler.

Je le vois démuni, triste, mais aussi en colère. Sa mâchoire se crispe dangereusement, comme s'il luttait contre lui-même, pour ne pas hurler ;

 - Chérie je suis tellement désolé ...

 - Pas plus que moi.

Je passe devant lui et ouvre la porte.

 - Est-ce que je peux monter ?

 - J'ai envie d'être seule.

Ses poings se contractent durement. Je sais qu'il ne me fera aucun mal, mais dans mon ventre c'est un red flag qui prend l'air.

 - Je vais prévenir les autres que tu es là.

 - Ok.

Une fois dans le couloir, je l'entends taper contre je ne sais quoi, crier.

Je monte et referme la porte méticuleusement derrière moi, comme si elle allait me couper du monde.

Tout est à sa place, propre, rangé. Mon odeur a moi.

Je bute dans les sacs que Malia a laissés, merde vas falloir que je gère ça aussi. Mon cerveau fonctionne tout seul, je range mon sac, prend une douche. Enfile un jogging.

Allume une bougie, met un vinyle. J'ai laissé celui que je comptai lui offrir dans sa chambre, je ne sais même pas s'il va comprendre que ça viens de moi.

Mon téléphone est sur silencieux, mais l'écran ne cesse de s'allumer. Je le retourne.

Roule un gros so-per. Allume, me cale sous le plaid.

J'ai toujours cru que le jour ou la vérité sur cette soirée éclaterait je m'effondrerais en millions de grains de rien. Au lieu de quoi, je suis là, incapable de pleurer.

La clé grince dans le barillet de la porte. C'était évident qu'il allait venir, il est chez lui après tout. Il reste à l'entrée de la cuisine. Je ne sais même pas combien de temps il reste immobile.

 - Liv ...

Sa petite voix d'enfant transperce l'air. Je continue de fumer, l'observe avancer à tâtons. Comme si j'étais une bestiole sauvage dangereuse.

#1 Ne pleure pas trop fortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant