ACTE III - SCÈNE 5

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Chan, Jeongin.
Samedi.



- Tout se passe bien ? demanda Madame Jung en s'installant sur l'un des sièges.

Chan et Jeongin se trouvaient dans la même salle de répétition qu'ils avaient l'habitude de côtoyer depuis deux bonnes semaines déjà, et c'était la première fois que quelqu'un se permettait d'entrer.

Les deux jeunes hommes acquiescèrent. Tout se déroulait à merveille. Jeongin s'en sortait très bien, il s'était complètement débarrassé de sa timidité auprès de Chan, il se sentait parfaitement en confiance.

- Ce serait bien que vous commenciez à répéter avec nous la semaine prochaine.

Jeongin s'en était douté. Après tout, c'était normal. Leurs deux personnages n'étaient pas mis en scène qu'ensemble, mais avec bien d'autres personnes. Il fallait que ces autres scènes soient interprétées. Et puis, il fallait qu'ils s'habituent au plateau, aux décors... Il fallait que Changbin, San et Madame Jung leurs fassent des retours pour les aider à s'améliorer... En bref, Jeongin savait qu'il fallait qu'il trouve le courage de répéter devant les autres. Tôt ou tard, c'était bien normal que ça arrive. Il acquiesça donc, sous les yeux calmes et impassibles de Chan. La professeure le remercia et lui sourit gentiment, ravie. Et rien que ça, ça le rassura dans l'idée que ça allait aller, bien qu'il était très inquiet.

La femme les congédia ensuite, et très vite, la fin de la répétition sonna. Jeongin et Chan quittèrent la salle ensemble après que le plus jeune ait dit au revoir à ses amis et se dirigèrent immédiatement vers l'arrêt de bus qui menait à la projection.

Ils s'installèrent côte à côte, partagèrent un Tupperware de fruits frais préparé par la mère du plus jeune en guise de repas, histoire de ne pas avoir faim durant l'après-midi. Le voyage fut assez calme, aucun des deux n'était très bavard, mais au lieu de leur apporter une certaine gêne, ils profitèrent plutôt d'un moment paisible. Jeongin observait tantôt le paysage, tantôt les passagers, et Chan n'avait mis qu'un seul écouteur histoire de rester attentif à ce qui se trouvait autour de lui, ou même à Jeongin, si celui-ci venait à s'adresser à lui.

Le soleil était haut dans le ciel. Ce n'était pas le moment le plus chaud de la journée, mais il diffusait tout de même une douce chaleur qui traversait les vitres de l'autocar et réchauffait leur peau avec légèreté. Lorsque les deux garçons arrivèrent au bon arrêt, ils n'eurent pas à chercher longtemps pour trouver l'observatoire qui se trouvait assez proche de l'arrêt de bus. C'était agréable, car ce n'était pas trop bondé. Ainsi, ils purent entrer assez vite, ne comptant pas un trop long temps d'attente.

Les deux garçons visitèrent tranquillement les différentes salles où étaient exposés quelques objets afin de passer le temps jusque l'heure de début de la projection. Ils s'arrêtaient très souvent, enfin, Chan s'arrêtait pour contempler les différentes expositions ou en lire le paragraphe associé. Jeongin découvrait un tout autre personnage. Il était bien moins calme qu'à l'habituée. Bien qu'il ne se précipite pas non plus, ses pas se pressaient légèrement plus que d'habitude lorsqu'il devait traverser l'espace séparant deux objets. Il était véritablement passionné, et c'était superbe aux yeux du plus jeune.

La langue du noiraud se délia d'elle-même, expliquant certains textes à son cadet, ou lui faisant part d'anecdotes ou de savoir qu'il avait déjà. C'était très scientifique, Jeongin comprenait à peine une phrase sur trois prononcées par son aîné, mais son visage confus lui provoquait des sourires mi-amusés mi-attendris, au lieu de l'agacer. Ils passèrent une trentaine de minutes dans les galeries, puis une heure et demie dans la salle où avait lieu la projection. Ils étaient installés dans des sièges sous un grand dome sur lequel étaient projetées différentes images. Contrairement à ce à quoi Chan s'attendait, Jeongin ne s'était pas du tout ennuyé. Il avait trouvé ça passionnant, toute cette science, toute ces étoiles. Il aimait observer, écouter. C'était son spectacle à lui. Et puis, il adorait les étoiles.

Une fois qu'ils eurent terminé, ils reprirent le bus en direction de la maison de Chan. Il n'habitait pas très loin de leur lycée, un petit peu plus de la maison de Jeongin, mais c'était largement faisable à pieds. Ses parents n'étaient pas là, mais selon ses dires, ils n'allaient pas tarder à rentrer. Ils avaient sans doute dû aller au cinéma, ou quelque chose comme ça, ils aimaient bien faire ça le samedi.

Le plus jeune découvrit avec des yeux pétillants le lieu de vie de son aîné, qu'il se complut à détailler des yeux avec précision. C'était une maison relativement simple, comportant deux chambres, celle de Chan et celle de ses parents. C'était très bien rangé, chose que l'on pouvait noter. Chez Jeongin, ce n'était pas aussi soigné que ça. Il n'y avait pas un grain de poussière qui traînait, les meubles brillaient, comme le sol. Même le vase avait l'air parfaitement au centre de la table à manger. C'était amusant. Les cadres aux murs rendaient l'atmosphère un peu plus familiale, intime, c'était agréable, ça réchauffait le cœur.

Ils se dirigèrent dans la chambre de Chan, qui était aussi bien rangée que le reste de la maison. C'était une chambre assez basique, mais pas assez pour être impersonnelle. Effectivement, on retrouvait çà et là, des petites figurines, des photos, des LEDs, en bref, Chan avait parsemé sa petite touche de façon presque discrète.

Ils s'installèrent sur le lit du noiraud et entamèrent une partie de Uno. Ce ne fut qu'après une écrasante défaite pour le plus vieux et un fou rire des deux jeunes hommes qu'ils s'arrêtèrent. Sans chercher à ranger, ils s'étaient tout simplement couchés sur le dos. L'un dans un sens, l'autre dans l'autre, leurs visages côtes à côtes. Ils observaient le plafond en discutant, et ce moment était d'une douceur infinie. Chan se tourna vers Jeongin pour l'observer pendant qu'il racontait une anecdote sur son enfance, un grand sourire collé aux lèvres. C'était beau à voir. C'était comme une peinture, dont les couleurs s'illuminaient lorsque le souvenir qu'elle provoquait refaisait surface.

En l'observant briller ainsi contre son iris, Chan remarqua que depuis qu'il le connaissait, il n'avait jamais vu Jeongin comme autre chose qu'une œuvre d'art. Qu'il s'agisse d'une poésie, de la chanson que créait sa voix mélangée à ses émotions ou une peinture, il était son œuvre d'art, sa si sublime attache, cette œuvre qui était si particulière à ses yeux. Et, alors que la lumière dorée du couché progressif du soleil se reflétait contre sa peau et ses yeux déjà brillants, Chan se rendit compte du battement de son cœur. C'était doux, mais rythmé, c'était rapide, mais agréable. C'était chaud, mais ça le rendait heureux. C'était peut-être tôt, ou peut-être tard, mais il se rendit compte que ce jeune homme face à lui, n'était pas juste plaisant à ses yeux, qu'il était plus que ça, qu'il lui faisait ressentir plus que ça.

Il le plongeait dans l'art, le romantisme, l'amour.

Il le faisait vivre.

Il faisait battre en lui des sentiments aussi doux que le baiser de deux âmes sœurs.

𝗥𝝝𝗠𝗘𝝝 & 𝗝𝗨𝗟𝗘𝗦 ; jeongchanWhere stories live. Discover now