ACTE V - SCÈNE 4

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Jules, Roméo, San, troupe de théâtre.
Représentation de Roméo & Jules.



Le spectacle s'ouvrait sur un duel entre les pères Capulet et Montague, autrement dit, Choi Beomgyu et Jung Wooyoung. Loin du combat d'épée plein de rage que l'on pouvait retrouver dans la pièce, ils se chamaillaient à coup de critiques basses et rabaissantes, jusqu'à ce que l'un ne finisse par donner un coup à l'autre et qu'ils ne se fassent séparer. Ils s'en allèrent ensuite et laissèrent la place à Roméo et son cousin.

Jeongin observait tout depuis les rideaux, caché du côté cour. Il avait la chance de ne pas apparaître dans la première scène, ni dans la seconde, et de pouvoir se mettre en condition. Observer Chan jouer était d'un captivant rare. Lui qui aimait être spectateur, il réalisait qu'il n'aimait rien regarder comme il aimait regarder Chan. Il avait cette chose différente, qui accrochait ses yeux et faisait battre son cœur d'une façon qui lui faisait un bien fou.

La troisième scène arriva bien trop vite à son goût. Bien qu'il n'ait que très peu de texte, le moment où il dut entrer fut très difficile. Ce fut Chan, qui appuya doucement contre la chute de ses reins pour l'inciter à y aller. Il lui murmura que tout allait bien, et qu'il restait derrière lui.

Jeongin avança à peine, il se contenta de rester près du rideau. C'était légèrement embêtant, surtout pour San, le chorégraphe de la pièce, qui semblait rouspéter depuis le côté jardin, mais bon, ce n'était pas très déstabilisant. Il fallait de toute manière s'y attendre.

Par chance, la lumière des douches qui brillait directement vers le visage du personnage principal l'aveuglait s'il tentait de regarder le public, ce qui, quelque part, l'aidait à ne pas voir le nombre de personne sans doute affolant qui se trouvait devant lui.

Jeongin se retrouvait avec Shin Yuna, qui interprétait sa mère, et Felix, sa nourrice et aussi son confident. D'ailleurs, le blondinet se permit de s'approcher et d'attraper avec douceur les mains du garçon qui restait complètement figé. Il l'incita sans le brusquer à avancer, et bien que Jeongin était complètement effrayé, il se laissa faire. Felix modifia légèrement sa réplique, de sorte à rappeler au jeune homme qu'il se devait de prononcer la sienne. Alors, bien qu'il hésita, et que sa voix fut tremblante, il parla :

- Je suis là, mère. parla Jules.

Puis, les répliques des deux autres s'enchaînèrent naturellement. Felix ne lâcha la main de Jeongin que lorsqu'il n'en eut pas le choix, et heureusement, c'était à la fin de la scène.

Jeongin sortit. Son cœur battait si fort qu'il le sentait frapper contre sa cage thoracique. Dès que la lumière fut éteinte, il se précipita vers Chan, qui l'entoura de ses bras.

- C'est super, continue comme ça. Tu t'en sors très bien... il lui murmura.

Mais Jeongin avait l'impression de faire n'importe quoi. Chan devait rejoindre le plateau pour la scène suivante, mais il resta quelques secondes encore avec le garçon.

- Tu te souviens quand on avait joué tous les deux, quand tu t'entraînais ?

Le plus jeune hocha la tête.

- Tu avais peur de jouer devant moi, et puis tout doucement, tu t'es laissé emporter par le rôle. Fais pareil ici, ce n'est pas Jeongin qui est sur scène, c'est Jules.

- Chan ! gronda San, et le garçon s'écarta de son cadet.

- Tu es superbe. il lui répéta encore avant de le laisser pour de bon.

Jeongin observa le garçon jouer parfaitement son rôle, et, ses mots raisonnants en lui, il tenta de s'en servir pour réguler le rythme de sa respiration qui s'affolait. La scène du bal approchait, et il n'allait pas pouvoir échapper à ses répliques. Chan avait raison, quand il se laissait emporter dans son personnage, il ne voyait plus que lui, seulement, Jeongin n'avait réussi cet exploit qu'en présence de son partenaire de jeu et avec personne autour. Il s'efforçait sincèrement de faire au mieux, mais c'était difficile.

Chaque fois que quelqu'un passait à côté de lui, on le félicitait ou l'encourageait. C'était adorable, bien que ça ne suffise pas à le rassurer, ça lui faisait plaisir.

La scène cinq sonna, et Jeongin entra, au bras de Felix. C'était difficile de ne pas regarder Chan, qui entra peu après. Mais c'était ce que la pièce exigeait. Jeongin aurait presque rougit en l'entendant parler de lui ainsi, pourtant, ils l'avaient déjà répété des milliers de fois.

Puis, Roméo s'approcha, et prit la main de Jules. Ce fut comme la toute première fois, les yeux de Jeongin se perdirent dans ceux du brun, et le doux touché de leurs doigts joints apaisa son cœur.

- Si j'ai profané avec mon indigne main cette châsse sacrée, je suis prêt à une douce pénitence : permettez à mes lèvres, comme à deux pèlerins rougissants, d'effacer ce grossier attouchement par un tendre baiser.

Jeongin ne put s'empêcher de sourire doucement. Puis, tout naturellement, il répondit :

- Mais enfin, que dites-vous ?

Chan lui offrit un sourire discret, il était fier de lui.

À partir de ce moment-là, ce fut comme s'il n'y avait plus qu'eux. Les répliques semblaient s'enchaîner avec un naturel parfait.

Et c'en fut de même pour le reste de la pièce. Jeongin apprit tout doucement à combattre la peur de faire le premier pas sur la scène, et au fur et à mesure, il réussit à mettre de côté ses angoisses et à se laisser entraîner. Il arriva même à en oublier le public, lorsque les lèvres de Roméo embrassèrent celles de Jules.

Le baiser final tant attendu arriva et celui-ci fut différent. Ils ne l'avaient que très peu répété car ça avait visiblement très vite été satisfaisant.

Jules et Roméo étaient permis de se retrouver après que leurs parents aient décidé d'enterrer la hache de guerre en la faveur de leurs deux fils amoureux.

Leurs mains ne se quittaient plus, et leurs sourires faisaient briller leurs prunelles.

Non loin, Thomas, le nouveau Tybalt, qui n'avait pas été tué durant cette pièce, venait de faire la cour à Léon, donc Felix, le confident de Jules. Ils les observaient avec un regard doux. De même, leurs parents respectifs observaient la scène silencieusement.

- Je vous aime, doux Jules.

- Je vous aime d'autant plus, mon Roméo..

Puis, ils s'embrassèrent. Peut-être pas de la façon dont ils étaient supposés le faire, et peut-être qu'inconsciemment, ils firent même un peu trop durer le baiser, mais lorsqu'ils se séparèrent, Jeongin jura que ce n'était plus Roméo et Jules qui se regardaient avec tout l'amour du monde, mais bien Chan et Jeongin.

𝗥𝝝𝗠𝗘𝝝 & 𝗝𝗨𝗟𝗘𝗦 ; jeongchanWhere stories live. Discover now