Chapitre 6

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- À quoi trinquons-nous ?

Nous sommes dans le lounge du restaurant d'Albert. Rien à voir avec mon hôtel, tout est moderne, les couleurs des tables changent, les tapas sont succulents, la musique est menée par un DJ.

- À la famille ?

Sonia est radieuse et de mon côté je ne suis pas en reste. Je savais que mon oncle était avant tout un homme d'affaires, mais je ne pensais pas que c'était à ce point. Nous ne détonnons pas au milieu de la jet set locale.

C'est alors qu'un jeune homme s'approche de nous, il me regarde avec attention et finit par me prendre la main pour y déposer un baiser. Je reste interdite et lance un sourire crispé.

- Salue, cousine, tu te souviens de moi ?

Je percute d'un coup.

- Non ? Francis ? C'est toi ? Mais je ne t'aurais pas reconnu, tu es si... si...

Il éclate de rire et se tourne vers Sonia, qui rougit lorsqu'il lui fait le baise-main. Puis il se laisse tomber littéralement dans un des canapés immaculés en face de nous. Il hèle alors une serveuse :

- Mademoiselle, un mojito s'il vous plait ?

Il se penche vers nous.

- Quand papa m'a dit que tu étais là, je n'ai pas pu m'empêcher de venir te faire une petite surprise.

- C'est génial, je me sens moins seule tout à coup.

- Bon, et cet hôtel ?

- Et bien justement, nous en parlions.

- Il parait que c'est la bérézina là-bas, enfin c'est ce qu'on raconte.

- Et bien, malheureusement je dois avouer que tu as raison, il y a tout à faire.

- Le personnel est visiblement incompétent.

- Quel gâchis. Tu vois, si j'étais en charge de cet établissement, je ferais tout pour le faire prospérer. J'imagine que les comptes sont en berne.

- Et bien, pas tant que ça. C'est étrange d'ailleurs...

- Ha ?

Mon cousin se tourne perplexe vers son père qui intervient.

- Oui, il parait qu'il y aurait même une petite trésorerie, mais bon, rien de folichon.

Je bois une gorgée de mon cocktail avant d'enchainer :

- Et toi, alors ? Tu fais quoi dans la vie ?

- Je suis justement dans l'hôtellerie de luxe.

- Ho, c'est dingue.

- Oui, c'est papa qui m'a mis le pied à l'étrier et je ne le regrette pas. C'est un métier dur, j'ai une trentaine de personnes qui travaillent pour moi.

- Tant que ça, tu dois avoir un sacré hôtel.

- Oui, en effet.

Il reste un temps muet et cela me permet d'imaginer comment il pourrait se débrouiller s'il était à ma place.

Clairement, bien mieux que moi...

- Mais au fait ? Tu veux le garder cet hôtel à l'abandon ?

Et je lance sans réfléchir.

- Non, je ne pense pas, j'ai un métier prenant et je n'ai pas les moyens ni financiers ni personnels de le gérer comme il faut.

Un sourire éclaire alors son visage.

- Et bien, si tu le souhaites, on te le rachète ?

Je regarde mon cousin et mon oncle qui sont suspendus à mes lèvres, ils attendent une réponse de ma part.

Tout est confus pour moi. Mon grand-père, son admiration pour moi, la confiance qu'il m'a accordée... et d'un coup, je ne sais plus trop où j'en suis.

Pourtant...

- Vous feriez ça pour moi ?

- Oui bien entendu. Comme ça, tu te débarrasseras de l'hôtel et des emmerdes qui y sont liés. Nous sommes prêts à te faire une proposition dès ce soir si tu veux.

- Mais, vous êtes conscient du travail que vous aurez pour remonter l'hôtel ?

- Ne te tracasse pas, nous faisons aussi ça pour la famille, tu sais. C'est ce qu'il y a de plus important.

- D'accord, je comprends.

Je vois alors mon oncle griffonner quelque chose sur une serviette en papier, la plier et me la tendre.

- Tu regarderas ça ce soir tranquillement. Maintenant, parlons un peu de vous, Sonia, que faites-vous dans la vie.

- Je suis journaliste.

Francis ne la quitte pas des yeux, on dirait qu'il a craqué pour elle.

- Quel domaine ?

Elle rigole en se grattant la tête comme si elle était gênée.

- Presse féminine.

- Je vois et vous connaissez mon adorable nièce depuis longtemps ?

- Oh oui, depuis l'université. Nous avions des cours en commun.

- Magnifique...

C'est étrange, je n'écoute maintenant plus vraiment la conversation, je regarde en biais la serviette pliée qui est dans mon sac. Je n'arrête pas de penser à William et à ce qu'il m'a dit cette nuit...

Il est 23h et je suis dans ma chambre.

Je n'ai toujours pas ouvert la serviette, assise sur mon lit, je ne sais plus quoi faire.

Mon grand-père, mon oncle, mon métier... l'hôtel.

C'est certain que je dois faire un choix. Impossible de tout garder.

Je soupire et finis par la déplier.

Ce que je vois est presque hallucinant, un montant à plus de six zéros est devant mes yeux. Je les cligne, est-ce que je rêve ? Tant que ça.

Je me lève, un peu sonnée, et me place devant la fenêtre, machinalement, je regarde vers le jardin. Il y a un homme qui s'y trouve, il est éclairé par la lumière de la lune.

William !

Je récupère la serviette et quitte ma chambre en vitesse.

Je dois avoir son avis tout de suite, c'est le seul qui me lie encore à mon grand-père et à ce château.

J'arrive en courant et calme mon pas quand je le vois non loin de moi.

- Bonsoir.

Haletante, je lui réponds.

- Il faut que je vous parle sérieusement.

Aussi, il se retourne pour me faire face.

- Je vous écoute.

Mais, finalement, au lieu de parler, je lui tends la serviette pour qu'il la lise. Il me regarde sans bien comprendre.

- 5 millions ?

- Oui, c'est le montant que mon oncle et mon cousin me proposent pour racheter l'hôtel. Je souhaitais avoir votre avis.

Il froisse nerveusement le tissu en papier avant de me répondre et la place dans sa poche.

- Que voulez-vous que je vous dise ?

- Je ne sais pas, ce que vous en pensez ?

- Je n'en pense rien... Vous devez prendre seule cette décision.

Je me poste devant lui et cherche son regard, mais il le fuit.

- William, vous connaissez mon grand-père, il vous respectait et il vous faisait confiance. Que dois-je faire ?

C'est alors qu'il me saisit la main tout en disant.

- Suivez-moi.

MB MORGANE - Mon gérant est un pauvre #%@$! [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant