Poids plume

Chapitre 5 : Accrochage

Le Métronome était la seule personne que je distinguais suffisamment nettement pour pouvoir en distinguer les traits, les autres étaient flous comme si ma vue avait pris 60 ans en quelques minutes. Et encore je n'étais même pas sûre que c'était à ça que devait ressembler la myopie de ma grand mère, toujours est-il que les couleurs étaient fades et les lignes mouvantes, sans parler du son creux qui s'échappaient des silhouettes. Ils auraient été à quelques dizaines de mètres que je ne les aurais pas mieux entendu. 

 - Entre ? Entre quoi ? 

 - Vous êtes sûrs que vous voulez lui répondre ? 

La question ne m'était visiblement pas adressée mais j'avais aussi besoin de mon temps de réflexion. Est-ce que j'étais sûre de vouloir une réponse ? Le son sauté comme si la connexion était mauvaise et je n'arrivais pas à comprendre leur réponse. L'image devint encore plus floue et je sentie mon corps partir vers l'arrière avant d'être rattraper par une voix qui m'agressa les oreilles : 

 - Respire ! 

 Mais bordel je ne fais que ça ! 

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Kaori essayait de la garder avec nous tant bien que mal, mais je doutais que cela ne fonctionne longtemps. Et malgré l'arrogance d'Hiyan, je crois qu'il avait envie qu'elle rentre chez elle saine et sauve, mais pour ça aurait-il encore fallut qu'on sache par où la renvoyer. Amaris tomba à la renverse et son corps redevint une coquille vide tandis que sa lumière se mit a flotter de manière hasardeuse dans la pièce.  

 - Tu as déjà vu ça ? demandai-je à Kaori. 

 - Pas vraiment. Il faudrait retrouver son corps pour pouvoir la renvoyer. Je ne sais même pas comme elle est parvenue à entrer dans ce réseau. Vous avez cherché là où vous l'avez trouvé ? 

 - Il n'y avait que ça, répondit Hiyan. 

La lumière continuait de flottait, inspectant les angles arrondis de la pièce à la recherche d'une sortie. 

 - Qu'est-ce que tu comptes faire Isha ? 

 - Et pourquoi ça serait à moi de prendre une décision ? 

 - Parce que tu es la seule avec un contact avec les Extrémités. 

 - Hiyan aussi ! 

 - Tu sais très bien ce que je veux dire. 

La voix de Kaori était toujours ferme sans être blessante, il avait cette notion de justesse et ce recul qui m'agaçait profondément. Sûrement parce qu'il avait trop souvent raison. 

 - Il faut retrouver son corps, dis-je. Hiyan tu penses pouvoir chercher aux points de passages ? Je vais aller faire un tour dans sa ville et demander aux autres si elles ont trouvé quelque chose. Kaori, tu penses pouvoir la garder ? 

 - Je peux essayer. 

Les tâches n'enchantaient personne, nous avions tous autre chose à faire que nous occuper d'une âme perdue dans la mauvaise dimension. Mais il était question d'équilibre et malheureusement aujourd'hui, l'équilibre est prétexte à tout. 

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Je reprenais conscience quelques minutes seulement pour mieux repartir dans des rêves absurdes qui s'entre croisé et s'effondraient en quelques secondes. Mon corps me semblait si lourd, impossible à bouger, à contrôler, à supplier. La nausée me montait à la tête tellement tout tournait vite et mon estomac ne souhaitait qu'une chose ; rendre la dernière chose qu'on lui avait demandé de digérer. Sauf que j'avais l'estomac vide, le corps creux et la bouche sèche, donc rien à vomir, rien à pleurer, tout juste si j'arrivais à m'alimenter en air. 

Jusqu'à ce que je parvienne à attraper la lumière qui flottait autour de moi. Ce farfadet luminescent me suivait depuis le début de ces montagnes russes et au moment où je sentis que tout allait me lâcher, je m'accrochais à lui comme à une bouée de secours, convaincue que ma main le traverserait et que je tomberais de plus belle. 

Ce n'est pourtant pas ce qu'il se passa, et au moment où ma main entra en contact avec la chaleur de l'être de lumière le monde s'immobilisa d'un coup et mon corps s'interrompit dans sa mise à mort. Même si je ne pouvais pas les voir, je sentais désormais que je pouvais bouger les doigts, tourner mes chevilles et les poignets. Mes sensations me revenait peu à peu et la lumière se répandait alors que je gardais contre mon coeurs ma prise jusqu'à ce que mon corps veuille bien l'absorbait. 

 - Qu'est ce que tu as fait !? hurla une voix à mes oreilles. Si après ça je n'avais pas des acouphènes à vie, c'était un miracle. 

 - Comment.. Je ? Il te manque une case ? 

Le Métronome avait perdu tout le calme que je lui avais accordé lors de ma dernière prise de conscience. Ses mots étaient étouffés, paniqués et il ne me fallut pas longtemps pour comprendre que c'était sur moi qu'il criait. Je clignais des yeux suffisamment pour que du noir total je passai à un monde de couleur ternes et aux contours flous. 

 - Mes oreilles.. me plaignis-je en levant les mains pour couvrir ses dernières. 

 Non. non. non. non. non.. Ces mots tournaient en boucle dans ma tête sans que je comprenne qu'est ce qui les empreignait d'autant de de peur. Ils m'enroulaient littéralement de leur gravité alors que mon corps devenait de plus en léger et que la torpeur m'abandonnait. 

 - Kaori ? 

La voix était féminine mais ce n'était pas une que je connaissais. 

 - Kaori, qu'est ce qu'il t'arrive ? 

Je voyais les ombres s'agiter, le Métronome - Kaori visiblement - tenir d'une main sa tête et de l'autre sa poitrine. Bientôt, il y eut deux nouvelles personnes dans la pièce que je reconnus au fur et à mesure que ma vision s'éclaircit sans que les images ne gagnent beaucoup de couleur ou de netteté, mais suffisamment pour que je me repère dans l'espace. 

 - Comment c'est possible ? reprit la voix féminine que l'inquiétude avait également gagné. 

 - Je l'ignore. 

Quoiqu'ils ignoraient, ils ne pouvaient pas être plus perdu que moi alors leur inquiétude m'atteignait peu. De toute façon, je ne comprenais rien à rien de ces dernières heures/jours ou mois. 

 - Elle a quoi ?? Comment ça accroché ? 

 - Je ne sais pas ! 

Le calme n'était pas de vigueur dans la pièce et j'avais l'impression d'être la seule à pouvoir garder la tête froide.  

 - Amaris, qu'est ce que tu as fait ?