Chapitre 14 : Médium

17 3 4
                                    


- Je sais pas ce que tu as bu, mais tu tires une tronche, c'est fantastique, s'exclama Jo, lorsque j'entrai dans la cuisine pour me servir un grand verre d'eau.

J'aurais aimé dire que mes traits et mes cernes étaient du à une énième nuit blanche mais c'était avant de savoir que l'inverse était encore plus éreintant.

- Il est quelle heure ?

- 17h, le soleil commence à se coucher, tu nous as fait un coma total. Adèle sortie de son étagère une boite d'aspirine et me tendit un cachet.

ML avait son casque et restait concentrée sur son ordi tandis que les deux autres entamaient un goûter « detox x grosse dalle » mélangeant le sucré-salé avec l'intention de faire passer les anglais pour des gourmets. J'avalai le médicament d'un coup et m'assis en face d'elles, savourant d'avoir réussi à sortir du sommeil.

- T'es partie où hier ? Tu t'es barrée en courant et impossible de te retrouver en bas.

- Quelqu'un est mort.

- On sait, on était là quand c'est arrivé. Il respirait encore quand les pompiers sont intervenus, mais son coeur s'est arrêté avant qu'ils l'emmènent.

Je me repassais laborieusement les évènements en mémoire, j'avais seulement vu l'homme s'effondrer, puis cru les mots de Tariq lorsqu'il m'avait dit que l'individu été décédé.

- Vous avez vu Tariq ? Demandai-je alors que les images réelles se reconstituaient peu à peu dans ma tête.

- Non, il n'était pas là non plus. On croyait que tu étais rentrée avec lui.

Jo me fit un clin d'oeil, se retenant de déverser le flot de questions qui lui grattait la gorge.

- Surtout que tu es une femme libre maintenant, compléta Adèle.

- Je suis rentrée avec Mathias.

- Ah.

- Merde.

Je n'avais pas envie de raconter le reste de ma nuit. Tout était déjà suffisamment confus pour que je parvienne à y mettre de l'ordre par moi-même.

- Quelqu'un est passé pour toi tout à l'heure, intervint Marie-Lou en retirant un coussin de ses oreilles.

- Qui ça ?

- Jamais vu, une blonde. Elle n'a pas laissé de message, ni son nom d'ailleurs. Elle a simplement dit qu'elle repasserait plus tard. Bizarre.

Bizarre n'effleurait même pas la surface du sentiment que je ressentais. Et s'éloignait sans doute encore plus de la réalité dans laquelle je m'engouffrais.

Je prétextais avoir besoin de prendre l'air, de marcher et de sentir le froid sur mes joues pour me rassurer. En passant la porte cochère, j'en inspectais les angles, espérant y voir des traces d'usure, de brûlure mais rien. Je ne me souvenais pas de ma nuit, plutôt de ma journée endormie, je gardais seulement le ressenti d'avoir été prisonnière de mon propre sommeil, incapable de m'échapper de ma propre tête. Marcher en rond pendant presque une heure n'arrangea rien, et je finis par m'arrêter dans un café encore ouvert près de la place du capitole. Alors qu'il faisait quasiment nuit, je posai le plaid proposé sur mes genoux, faisant face au reste de la rue.

D'abord l'incendie qui ne semblait avoir jamais eu lieu, puis mon passage dans l'Entre, le retour à la maison, la voix de Kaori dans ma tête ?! Je n'étais même pas certaine qu'il s'agissait de lui. Les cauchemars ? Enfin Tariq qui essayait de me faire la cour ? Et puis quoi encore ? J'allais me mettre à voir des esprits et recevoir des messages de l'Univers ?

Poids plumeWhere stories live. Discover now