6. Sans avoir compris la vie, devoir saisir la mort.

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15 ANS

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15 ANS

— Mademoiselle Murphy ?

La porte de la chambre se referme doucement sur celle qui s'est présentée comme étant le commissaire Simms. Je n'ai pas besoin de la regarder pour savoir qu'elle s'approche de moi comme elle le ferait avec un animal blessé sur le bord de la route.

Non, mon attention reste focalisée sur le plafond, les yeux grands ouverts, craignant de les refermer un jour. Le bruit produit par la machine résonne dans mes oreilles, comme le ferait un requiem. Entendre mon cœur battre est presque aussi douloureux qu'avoir conscience que le sien n'aura plus jamais cette chance. J'ai mal, dans chaque parcelle de mon corps, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur, mais le pire sont les images dans ma tête, le chaos qui y règne et la nausée que ça me provoque.

— Comment vous sentez-vous ? demande l'inspecteur en s'asseyant près de moi.

Trop vivante.

Mais les mots refusent de quitter ma bouche. Ils restent là, posés sur ma langue, un goût âcre les accompagnant. C'est une question débile qui, dans tous les cas, ne mériterait aucune réponse.

— Je sais que vous vivez un moment difficile, mais nous avons besoin de votre aide.

Un ricanement vole dans les airs, je sais qu'il vient de moi, mais je ne parviens pas à le reconnaître. Difficile, dit-elle. Voilà certainement la définition même de l'euphémisme. Un instant Dimitri était sur le point de poser ses lèvres sur les miennes, la seconde suivante, il n'existait plus. Il ne vivait plus.

On l'a assassiné alors qu'il était sur le point de m'embrasser.

La pièce tourne autour de moi, mais je suis immobile, perdue dans un tourbillon de pensées confuses. Comment peut-on passer d'une intimité partagée à une scène macabre aussi rapidement ? Les souvenirs de la soirée, de sa voix, de son rire, me frappent comme des vagues déchaînées. Comment peut-on passer de la chaleur de sa peau à la froideur de son cadavre en un battement de cils ?

Les larmes menacent de déborder, mais elles n'y parviennent pas, enfermées dans cet étau de douleur trop violente pour que je puisse me laisser aller. Mon esprit répète en boucle la cruauté de la réalité, la soudaineté du vide laissé par sa disparition. Je voudrais pouvoir hurler, pleurer, laisser cette douleur exploser et se libérer. Mais je suis paralysée, clouée à cette réalité brutale.

La vie continue autour de moi, indifférente à ma peine, mais pour moi, le monde s'est figé dans l'instant où sa vie a été volée, là, chez lui, sous mes yeux impuissants.

— Jennie, nous devons comprendre ce qui s'est passé. Pouvez-vous nous dire quelque chose, n'importe quoi qui pourrait nous aider ?

Ma voix est un murmure rauque qui peine à s'échapper de ma gorge serrée.

Eagle Mountain Academy Tome 2 : Under Your ChaosWhere stories live. Discover now