Chapitre 16 - Partie 1

396 37 14
                                    

Ma tempe contre la vitre de la voiture, je répondis à la dizaine de messages que Rylan m'avait envoyés. Le paysage défilait sous mes yeux ; maussade et gris. À l'image de mon humeur. Je ne parvenais même pas à profiter de Nantahala National Forest que nous traversions. La bruine brouillait la route et les nuages gris si bas qu'ils avalaient la cime des arbres dénudés. Les essuies glaces dansaient inlassablement. La radio grésillant parfois. Isaac monta le son lorsqu'une alerte météo coupa le programme.

« Des vents violents sont à prévoir sur une grande partie de la côte Est ainsi que de fortes averses. Sont concernées la Floride jusqu'au Sud de la Virginie, des bourrasques allant jusqu'à 150km/h sur la côte et encore à 120km/h dans les terres. Restez vigilent. La tempête traversera les Etats depuis le Sud. Elle touchera la Floride cette nuit et devrait finir sa course entre la Coraline du Nord et la Virginie d'ici dimanche soir. Nous recommandons aux... »

— Pourquoi tu coupes ? Tu ne voulais pas écouter ?

— Je préfèrerais qu'on parle.

Oui, bien sûr. Ce n'était pas comme s'il cherchait à le faire depuis avant-hier. Gaby – de son prénom entier Gabrielle – et Rylan avaient exaucé mon souhait : me conduire chez Isaac. J'avais bien cru que Rylan allait enfoncer sa porte d'entrée tant elle s'était acharnée dessus. La suite avait été confuse. Entre Rylan impossible à calmer, Isaac exigeant des explications et Gaby, adorable, qui m'avait conduit à l'intérieur et aider à me démaquiller, les voisins avaient menacé d'appeler la police si nous ne nous baissions pas d'un ton. Je supposai que Rylan avait donné les grandes lignes à Isaac. Assez pour qu'il supporte mon silence. Au moins une journée. Suffisante pour me convaincre de passer le reste de mon week-end avec lui, chez ses parents – précisément vers là où nous roulions depuis une heure et demie déjà.

J'appuyai un peu plus ma tête contre la vitre, retenant un soupir.

— Je n'ai pas envie de parler.

Ce que je répétais depuis ce matin. Et comme toujours, Isaac n'insista pas.

Le trajet se poursuivit dans un silence que la radio entrecoupait lorsque les arbres ne bloquaient pas les fréquences. Les alertes météos s'enchaînaient et à mesure que nous nous rapprochions de notre destination, le vent se calmait sans pour autant que le ciel ne se dégage. Les beaux jours étaient dernière nous et l'hiver s'approchait inexorablement.

La route sinueuse obligea Isaac à lever le pied. Des arbres, des arbres et encore des arbres. Je savais que les parents d'Isaac avaient déménagé pour leur retraite dans un endroit reculé, mais ça me dépaysait toujours. Le paysage aurait pu être époustouflant si le crachin n'estompait pas toutes les couleurs de l'automne. À la place de couleurs vives, allant du vert au rouge en passant par toutes les nuances de jaune et de brun, tout était fade, grisâtre. Vraiment déprimant.

Isaac ralentit, clignotant en marche, et s'engagea sur une route étroite, encadrée de végétation. Je me décollai de la vitre, les amortisseurs ne suffisant plus à assurer mon confort. Au bout de ce qui me sembla une éternité, un grand chalet en bois foncé s'érigea devant nous. Isaac se gara sur le côté, à la gauche du pickup déjà présent. Le froid me fit frissonner lorsque je sortis de la voiture. Il n'y avait pas à dire, Owl Creek était vraiment un paumé.

— Lee.

Je récupérai mon sac que m'envoya Isaac depuis le coffre. Nous n'avions pas pris grand-chose puisque nous repartions lundi matin, si la soi-disant tempête nous le permettait.

De l'extérieur, le chalet semblait grand ; les balcons entouraient chaque étage, protégés sur le côté par une extension du toit. Un escalier longeait la bâtisse, tout contre la bute où nous nous étions garés. Le porche d'entrée se trouvait derrière. Nous nous y abritâmes et la porte s'ouvrit à la volée.

Nos Amours aux Parfums de GlaceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant