Vingt-Deux ~ Tara Lazico

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-T'sais que Paper Towns va bientôt sortir au cinéma? J'ai trop trop hâte! s'exclame Anna à côté de moi.

Elle parle avec Julia. J'écoute la discussion d'une oreille en me dirigeant vers la salle d'allemand, qui est en face de celle d'espagnol.

L'année dernière on devait choisir une nouvelle langue vivante et on devait choisir entre espagnol et allemand. Bien sûr, vu que j'suis espagnole d'origine et que je parle couramment, mes parents m'ont obligée à prendre l'allemand.

Au fond, j'aime bien l'allemand. La plupart des gens trouvent que c'est une langue de barbares, mais en fait, le seul truc compliqué c'est les déclinaisons. Moi aussi au début j'ai râlé comme pas possible parce que mes parents m'avaient imposé ce choix, mais bon j'ai positivé, pour reprendre l'expression de Léo!

Heureusement, beaucoup de mes amis ont choisi l'allemand donc j'me sens pas trop seule. La seule chose que je regrette c'est qu'il n'y ait pas Anna. Dans tous les cours on est ensemble, inséparables. Une heure sans elle en devient presque un calvaire.

Quand j'y repense, c'est vrai que ça ne fait pas si longtemps que ça qu'on est très bonnes amies toutes les deux. Même pas six mois. Enfin, on s'en fout un peu de la date. Tout c'que je sais c'est qu'on a commencé à vraiment se rapprocher quand elle venait de casser avec Axel, et qu'on a découvert qu'on habitait pas loin l'une de l'autre.

Je soupire en me rappelant comment on a découvert ça.

C'était un soir en hiver, je rentrai chez moi presque en courant -car j'ai une peur bleue de marcher toute seule en ville- et sans regarder devant moi. Trop occupée à regarder si quelqu'un ne me suivait pas, je suis rentrée dans la personne devant moi. Puis, quand elle s'est retournée, je l'ai tout de suite reconnue. Vous l'aurez deviné, c'était bien Anna.

Je m'en souviens comme si ça s'était passé il y a deux secondes seulement.

On était un dimanche soir, il faisait presque nuit, et Anna était plantée là, sur le trottoir. Elle ne bougeait pas, et je voyais qu'elle était totalement frigorifiée; j'en conclus qu'elle était là depuis un bon bout de temps. Elle avait les yeux rouges et gonflés, comme si elle venait de pleurer.

À ce moment-là, je n'étais pas encore au courant. Elle avait plaqué son copain le jour d'avant.

Je lui avais proposé de venir chez moi pour se réchauffer. Elle a accepté sans un mot. On est montées dans mon petit appartement extrêmement moderne du point de vue architectural. Pour la petite anecdote, mes parents, tous deux architectes, ont rénové cet appart' miteux en un truc classe.

Après lui avoir préparé un chocolat chaud, je l'ai emmené dans ma chambre. On s'est assise sur mon lit, puis on n'a plus rien dit pendant une bonne demie-heure. C'était vachement gênant. Puis je lui ai demandé si elle voulait parler de quelque chose en particulier, n'osant pas trop lui demander ce qu'elle faisait toute seule dans la rue.

Elle a marmonné trois mots incompréhensibles avant de me dire d'une voix chevrotante qu'elle devait y aller. Avant de partir, elle m'a dit qu'elle habitait une rue plus loin et qu'elle me remerciait pour la boisson. Ensuite, elle est partie.

Après ça, j'ai appris la nouvelle de sa rupture, on s'est souvent croisées dans la rue, et on a même finit par faire le trajet jusqu'à l'école ensemble. Ça faisait longtemps que je n'avais plus fait de trajets jusqu'en cours avec des amis depuis mon déménagement.

Ah, le déménagement. Mes parents, toujours avides de changements, voulaient à tout prix déménager. Sans penser que mon frère de onze ans et moi n'aurions plus aucun de nos potes qui habitaient dans le même quartier que nous. On est donc partis dans un autre quartier.

Une classeWhere stories live. Discover now