Chapitre 23 - The Other Promise (EPILOGUE)

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« La couleur est partout.

Elle est dans les arbres, les saisons, la poussière, le cœur, les regards, les histoires, les enfants, les légumes et les morts. J'vous dis ça, parce que je peux le dire. J'ai été mort un jour, quinze ans, huit ans, et sans couleurs.

Enfin, je le croyais. Parce que ce qui importe, c'est ce qu'on croit. Pas vrai ?

Même quand on se noie dans soi, dans le noir, on pourrait croire que tout est foutu. Le monde est en suspens et il n'y a rien que vos cris déchirants qui résonnent, et le vide. Et on voit rien. Je voyais rien. Et vous savez pourquoi ? Parce que tout ce temps, je me suis menti, je me suis aveuglé tout seul, volontairement, crevant à petits feux jusqu'à mon grand point d'orgue, un putain de feu diusculaire, comme une super nova qui glisse vers le néant et qui, soudainement, s'éteint. Je pourrais vouloir des réponses, exiger orgueilleusement quelque chose de moi-même, revenir à avant, refouler tout, encore un petit instant, une minute, une seconde.

Fuir.

Comme un homme à l'âme grise, au cœur noir et aux yeux blancs.

Mais je referais plus ça. Je veux plus me cacher comme un enfant qui a peur de son propre reflet dans la glace mouchetée du placard. J'ai buté ma mère, mon père et en taule à cause de moi et je suis incroyablement seul. Je vais devoir, sûrement un jour, répondre de mes actes. J'ai foiré ma vie. Mon Ange est mort. J'assume.

J'ai pas écrit ces mots mais maintenant, je les dis. Enfin, j'essaye. Je peux, à nouveau. Regardez ce journal. Il est sur mes genoux, recroquevillé sur lui-même par de la morve et des larmes, moitié carnet, moitié fou. Ah... Ca me crève le cœur de me dire que Roxas ne reviendra plus. J'vous voit, avec vos yeux ronds, vous mourrez d'envie de savoir aussi, d'avoir toutes les réponses à ce bordel. Mais la vérité c'est que je les ai pas, ces réponses. Si je feuillète le journal, encore et encore, je vois que des mots, de l'encre, du sang, les abîmes et Roxas.

Quoi, c'est qui, Roxas ? Roxas, c'est Roxas. Une page sur une autre, je l'ai écrit.

Roxas, c'était mon âme. Mon Ange gardien, le miroir de mon histoire à moi. Parfois, fébrilement, en grinçant des dents et en fermant les yeux, je lis toutes ces choses que j'ai...inventées. Elles sont tellement, tellement réelles, que je n'arrive pas à me dire qu'elles sont fausses, et que ça me fait du bien. Je saurais jamais si c'étaient des conneries, des hallucinations, ou un long choc traumatique. Et je m'en fous. Elles font parties de moi. Et Lui aussi.

Lui surtout. Il est partout, il est tout, il est la couleur de mon monde. Il a recoloré mon âme et ma lumière d'espoir dans la pénombre, c'était lui. Ca l'est toujours.

Je nage encore, mais je ne coule plus dans la mer de mes os, dans les abysses de ma tête. Je vais mieux, et si parfois j'ai envie de tout envoyer en l'air parce que ça sonne faux, je jette un œil aux pages du journal et je chiale. Parce que je vais mieux. C'est con.

Au dos de mon journal, quand je suis arrivé ici, j'ai écrit quelque chose.

« Trouver c'est perdre et perdre c'est trouver. Axel, souviens t-en. »

Parce que c'est à moi que je m'adresse. On s'adresse tous qu'à soi, de toute façon. Mentez pas. Les gens s'écoutent parler, et personne voit rien, mais on peut rien y faire. Toi, et vous, et moi. On cherche des tas de trucs, on les perd tous, on se perd même tout seul. Je suis un bel exemple, tiens.

Mais ce qu'on retrouve, on le garde toujours un peu avec soi. On se recompose comme un tableau, une toile jamais blanche où l'on crache et on balance, et où on fait choir et voler toutes les couleurs du monde. Notre monde juste à nous, avec les autres autour qui nous regardent jusqu'à ce qu'on recommence l'œuvre, ou bien qu'on crève. Moi, si je meurs encore, je sais que je reverrai mon Ange. Et on fera et l'amour et la paix. Et tout reviendra à la fois en place et en bordel, et je serais plus aveugle de moi, je serais juste humain et c'est tout. Plus jamais un enfant parce que j'ai plus de mère, mais plus jamais en train de vouloir comprendre tout comme un adulte. Jamais.

Kingdom Hearts - Tu Colores mon ÂmeWhere stories live. Discover now