40

1.2K 159 5
                                    

Abel


— J'ai essayé de te joindre, m'informe t-elle, comme si je n'étais pas au courant.


Quand elle m'a appelé tout à l'heure, j'ai cru d'abord que c'était une erreur. Puis, il y a eu ce deuxième appel, où elle m'a laissé un petit message me disant qu'elle désirait me voir. Sincèrement, je ne savais pas quoi faire. Dois-je aller la voir ? Je me suis posé la question plusieurs fois, avant de me décider. Elle m'a tout de même zappé de sa vie pendant plus de quarante-huit heures. Hier, j'étais fou d'inquiétude, j'avais beau l'appeler, rien, lui envoyer des SMS, toujours aucun signe de vie, que j'ai demandé à mon père, oui, vous avez bien entendu, à mon paternel de se renseigner. La seule réponse qu'il a eue, c'est qu'elle n'était malheureusement pas en état de recevoir des visites, ce que je savais déjà. Pourquoi autant de mystère ? Vais-je enfin savoir le fin mot de l'histoire ?


— Tu n'as pas eu mon message ? insiste t-elle.

— Je suis passé chez toi et ta sœur m'a dit que tu étais sortie. Que tu devais certainement être dans les parages.

— J'aime cet endroit. J'adore voir les enfants courir et crapahuter partout dans le parc. J'aurais apprécié avoir un peu de leur innocence et pouvoir faire de même...

— Qu'est-ce qui t'en empêche ?

— Nous ne sommes plus des enfants ! On a des responsabilités !


Elle est sérieuse ? Elle croit vraiment qu'elle n'a plus le droit de se comporter comme une gamine, car elle est grande ? Foutaise ! On ne devrait jamais perdre son âme d'enfant, c'est trop triste. Moi, je suis un vrai gamin par moment, et j'adore ça !


— Qui a dit qu'on n'avait plus le droit de s'amuser, dès qu'on devenait adulte ?

— Je ne sais pas ! Mais en ce qui me concerne, j'ai très vite oublié comment c'était d'être une enfant. Je viens ici pour me le rappeler.

— Tu devrais jouer avec eux, au lieu de simplement les regarder !

— Je ne sais pas faire ça !

— Toi, qui veut devenir mère, tu ne sais pas comment t-y prendre avec les bambins, c'est ridicule !


Oups ! Son visage se contracte, je viens de dire le mot de trop. Pourtant, je m'étais promis de ne plus parler sans réfléchir. Mais que voulez-vous on ne se refait pas ! Il faut que je trouve un moyen de me racheter. Je n'ai pas le droit de la traiter d'idiote ! C'est quelqu'un de bien ! Elle a simplement oublié comment c'est d'être un chérubin, et je suis là, pour lui rappeler.


— Je vais t'apprendre !

— Toi ?

— Oui !


Elle rigole. Je suis cependant très sérieux. Et pour lui montrer, à quel point je le suis, je lui lance un ballon qui vient de tomber à mes pieds. Elle le rattrape et je demande aux petits garçons, si on peut jouer avec eux. Et comme je suis un veinard aujourd'hui, ils acceptent avec de grands sourires.


— Aller ! Viens ! On va montrer à ces petits gars qui sont les plus forts ! je la somme de me suivre.


Elle se fait un peu prier, mais finit par se lever de sa balançoire. Après tous les efforts du monde, nous n'arrivons pas à battre ces gamins, ils sont bien trop forts contre nous deux. Inès s'est retrouvée à plusieurs reprises au sol, mais je parie qu'elle s'est bien amusée.


— Je suis désolée ! Je ne suis pas une grande sportive !

— L'essentiel est de participer !

— Abel Faro perdre ! Je doute que cela soit arrivé beaucoup de fois ?


Jamais ! Mais depuis que je la connais, je n'arrête pas ! Déjà face à elle, je manque souvent de courage. En plus, elle m'a gagné haut la main, lorsque j'ai manigancé le stratagème pour la faire venir jusqu'à moi, à mon entreprise. Au boulot, je suis pourtant considéré comme le meilleur, je ne perds jamais une affaire, et ce jour-là, je me suis fait avoir en beauté. Décidément, il faut que je me ressaisisse, je ne suis plus le même Abel Faro, l'homme tout puissant que tout le monde à peur d'affronter. Bon, j'exagère un peu ! Mais je suis très doué, et ça, dans beaucoup de domaines.


— Quelques unes à mon grand regret !

— En tout cas, moi, je me suis bien divertie !

— Moi aussi ! Tu as vu leurs têtes, quand je leur ai piqué le ballon par surprise ?

— Oui ! C'était grandiose ! On a bien rigolé.


Je ne sais pas si elle se moque de moi ou si elle me félicite ? Je crois qu'il y a peut-être un peu des deux. Car un sourire narquois s'affiche sur son adorable visage. Je décide de passer outre et de l'inviter :


— On va boire un verre ?

— Pourquoi pas !





Publié le mercredi 19 juin 2019

ABEL ET LA BÊTEWhere stories live. Discover now