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Abel


J'ai encore beaucoup de mal à croire ce qui m'arrive ! Je ne sais pas si j'ai perdu la tête ou si c'est mes pulsions de mâle qui sont à l'origine de cette petite faiblesse. Je m'étais pourtant promis à moi-même de ne pas céder à cette délicieuse créature, du moins pas avant qu'elle me dise son secret... Mais la voir si triste et si désemparée, après m'avoir donné un minuscule bisou, je n'ai pas pu lui résister.

Je ne regrette rien pour autant, si c'est ce que vous vous demandez. Mais j'aurais aimé pouvoir me contrôler un peu plus.

Ça fait des jours que je lutte avec moi-même afin de me contenir, et j'ai loupé le dernier virage comme un jeune débutant. Elle était pourtant sur le point de tout me révéler... Qu'est-ce qui m'a pris ? Je suis une mauviette, voilà tout ! Je ne peux pas voir une femme en détresse, que je finis par lui redonner le moral dans mes bras. Elle était si chamboulée, que j'ai certainement eu peur qu'elle me fasse une syncope, ou est-ce peut-être la crainte de découvrir ce qu'elle me cache... Non ! Je veux bien être faible de temps à autre face à une fille, mais de là, à angoisser par ce que je ne sais pas, non ! Je suis seulement inquiet pour elle, c'est tout ! Quoi que ? Je n'arrive plus à raisonner correctement, surtout avec elle à mes côtés.

Inès est une femme extraordinaire, avec ses faiblesses bien sûr, mais c'est quelqu'un de bien, et ce qui ne gâche rien, c'est une belle, séduisante et brillante personne ! Je ne voulais pas me comporter avec elle comme avec toutes les autres, et pourtant, c'est ce que je viens de faire. Je ne suis pas quelqu'un de bien moi, je ne suis pas fait pour être en couple ! Comment je vais pouvoir lui dire, que tout ça était une erreur ? Franchement, après tout ce que j'ai fait pour qu'elle ne me déteste pas, maintenant, c'est évident, elle ne voudra plus de moi dans sa vie ! Je suis un crétin ! J'aurais dû contenir ma verge dans mon pantalon !

C'est à ce moment là, que la belle endormie se tourne vers moi, m'indiquant qu'elle est toujours là ! Si je voulais me convaincre que tout cela n'était qu'un songe, c'est loupé !

Je tends ma main afin de brancher ma petite lampe de chevet, je voudrais voir son corps une dernière fois avant qu'elle décide de m'envoyer paître, mais la tâche est plus compliquée qu'il n'en paraît, j'ai beaucoup de mal à trouver l'interrupteur dans cette sombre atmosphère. Une fois le doigt dessus, j'appuie et tout s'illumine. Cela donne un éclairage tamisé à la pièce. Mes yeux, eux, sont absorbés par le visage lisse et lumineux d'Inès, elle semble même sourire. Oui, ces lèvres bougent discrètement, ce qui lui donne beaucoup de charme. Est-elle en tain de rêver de moi ? Décidément, je suis vraiment un idiot ! Car si c'est vraiment le cas, cela voudrait dire que je n'ai plus aucune chance qu'on reste amis après ça...

Je dois me l'enlever de la tête. Je délaisse sa fine et adorable bouche pour regarder le plafond afin que cela soit plus facile pour moi, de me dire qu'elle et moi, ce n'est pas possible ! Non ! C'est certain !

Elle m'aime ! Je ne peux pas continuer à jouer avec ses sentiments. Il faut absolument qu'on trouve un terrain d'entente, ou sinon je peux dire bye, bye, à l'unique personne, à qui je tiens dans cette vie, bon, en plus de mon père. Comment lui apporter la chose sans la blesser pour autant ?

Il n'y a pas de miracle ! A moins de mentir encore, je ne vois aucune autre solution ! Mais je refuse de procéder à nouveau à ce genre de pratique. Quelle galère ! Pourtant affabuler sur mes sentiments, ça réglerait tous mes problèmes ! Mais non, je ne peux pas lui faire ça ! Elle compte bien trop pour moi, même si cela n'est pas de l'amour, ça y ressemble... J'ai une forte affection pour elle. Je la considère comme la petite sœur que je n'ai jamais eue.

Arrête tes âneries ! On ne couche pas avec sa sœur ! Elle me plaît, un point c'est tout ! Non ! Je vous y vois déjà en train de penser, que je suis foutu, que je l'ai dans la peau ! Mais vous vous trompez ! Je ne suis pas amoureux d'elle ! Je sais exactement ce qu'on doit ressentir dans ce cas là, je l'ai déjà éprouvé auparavant je vous rappelle, et je peux vous affirmer avec certitude que ce n'est pas de l'amour qui m'unit à Inès, c'est plus une belle complicité. J'adore être avec elle, où est le mal ?

Bref ! Il faut que j'arrête de réfléchir, et en plus, j'ai un petit creux. Il serait peut-être temps de réveiller la belle demoiselle endormie. Je me tourne vers elle, faisant glisser un peu le drap de son corps, les poils de son bras gauche s'hérissent instantanément.


— Aaaaaah ! je camoufle mon cri de mes mains. Comment est-ce possible ? Non ! Je suis en train de faire un cauchemar ! je débite dans l'incompréhension la plus totale.


Je me lève d'un bond comme si elle était devenue contagieuse. Je prends mes cliques et mes claques, m'habille à la va-vite et file direction la sortie, avant de me rappeler qu'elle est chez moi. Mais c'est plus fort que moi, je dois quitter cet endroit tout de suite, maintenant ! J'ouvre tous les tiroirs à la recherche d'un bout de papier et d'un stylo mais rien. Je suis maudit ! Tant pis ! Je lui enverrai un message quand j'aurais repris mes esprits, si j'y arrive un jour.

Je ne comprends pas ! Comment j'ai pu passer à côté de ça ! Je saisis mieux maintenant son surnom. La bête, lui va comme un gant ! Mais qu'est-ce que je raconte ? Je suis horrible ! On parle d'Inès, la femme avec qui je viens de coucher et surtout à qui j'ai ouvert mon cœur à plusieurs reprises. Elle a été la seule à ne pas me juger. Et moi qu'est-ce que je fais ? Je lui tourne le dos ! Je le savais ! Je ne suis pas une bonne personne, loin de là ! Il ne faut plus qu'on se voie ! Il le vaut mieux ! Je suis un exécrable ami !

Perturbé, je décide de ne pas prendre ma voiture et divague dans les petites rues du quartier.


— Vous ne pouvez pas faire attention ! me congratule un homme alors que je viens un peu de le bousculer.


Je ne réponds pas et poursuis mon chemin, qui me mène tout droit dans un bar. Je m'assieds au comptoir et demande une double dose de whisky, que j'avale d'une traite.

J'ai beau me dire que ce n'est rien, qu'il ne s'agit que de banales cicatrices, mais rien y fait, je trouve ça hideux, affreux, d'une laideur incomparable. Rien que d'y penser, j'ai envie de vomir.


— Un autre ! je demande au barmaid de me resservir. Vous pouvez laisser la bouteille ! je l'informe.


Mais il préfère remettre le flacon derrière le bar. Il a peut-être peur que je ne lui paye pas son dû, ce nigaud. Je n'y prête pas plus attention et vide mon verre. Je ne suis pas d'humeur à me prendre la tête. Je règle monsieur pour mes boissons et file vers la sortie. J'ai besoin d'air frais, j'ai l'impression d'étouffer entre quatre murs.

Pourquoi ce genre de chose ne se produit qu'à moi ? Je n'aurais jamais dû être dans cette situation. Tout ça est de la faute de mon père ! S'il n'avait pas eu à l'esprit de me marier, rien de tout cela ne se serait passé. Pourquoi veut-il tant gâcher ma vie ? 



Publié le mercredi 10 juillet 2019

ABEL ET LA BÊTEWhere stories live. Discover now