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Une source de chaleur tape sur ma joue. J'ouvre lentement les yeux et suis aussitôt aveuglée par les rayons du soleil qui filtrent à travers la grande fenêtre. Après avoir cligner plusieurs fois des yeux pour m'habituer à cette dernière, je me redresse aussitôt comprenant que je ne suis pas dans ma chambre. La décoration, bien que très belle, est beaucoup plus sombre que dans la mienne.

Alors que je prends le temps d'analyser mon environnement, l'objet de mes tourments passe sous mes yeux, avec pour seule habit une serviette de bain autours de la taille. Mes yeux glissent aussitôt sur les muscles de son torse. Je me mordille la lèvre afin de stopper le flot de réactions qui fusent dans mon cerveau en le voyant ainsi. Ezio est un bel homme je ne peux le nier, entre sa jolie petite gueule et son corps ciselé, il doit faire tomber plus d'une fille. S'il n'avait pas été un dangereux psychopathe j'aurai probablement craqué pour lui. L'italien ne me prête aucune attention et se dirige jusqu'au dressing de la chambre sur ma gauche.

Je prends soudainement conscience que je suis dans sa chambre. Des millions de pensées traversent mon esprit et je soulève aussitôt le drap sous lequel je suis. Mon débardeur et mon short de la veille sont toujours là, je pousse un soupir de soulagement. Mais si j'ai dormi ici, ça veut dire que j'ai dormi avec lui... Mon sang se glace rien qu'en pensant que j'ai pu être si proche de lui pendant tout ce temps.

Ezio réapparait dans la chambre habillé de son habituelle chemise noire et d'un jean. Ses cheveux sont mouillés et retombent légèrement sur son front. Sa barbe de la veille a disparu lui donnant ainsi, quelques années de moins.

- Est ce que... on a dormi ensemble?! Demandé-je aussitôt.

- Non, je n'ai pas dormi. Répond t-il en se déplaçant jusqu'au lit.

Il me tend le verre de jus d'orange qui était posé sur la table de chevet. Je le prend mais avant même d'en boire une gorgée, mon visage se déforme de douleur. Je porte ma main à ma joue comme si cela pouvait arrêter la soudaine douleur. Ezio s'assied sur le lit à mes côtés et me tend une petite pilule blanche.

- Des antalgiques pour diminuer la douleur...

Je prends le petit cachet n'ayant même pas la présence d'esprit de me dire que cela pourrait être autre chose. A l'heure actuelle il n'aurait aucun intérêt à me droguer ou à me tuer alors je prends une gorgée de jus d'orange afin d'avaler le médicament. Le simple fait d'avaler est un supplice tant ma mâchoire me lance.

- Je suis désolé pour ça, souffle t-il la mâchoire serrée, il n'aurait pas dû te toucher. Encore moins te frapper. Certains de mes hommes ont parfois besoin d'un petit rappel des ordres...

Je ne dis rien ne sachant pas quoi répondre à ça. La scène d'hier soir repasse dans mon esprit. C'est vrai qu'Ezio s'est interposé avant que son homme de main ne me fasse plus de mal. Je n'aurais jamais pensé qu'un jour il prendrait ma défense, mais il faut croire qu'il ne supporte vraiment pas que quelqu'un d'autre que lui pose les mains sur moi. Je me demande tout de même si cette histoire en est restée là ou non.

- Est-ce que... soufflé-je d'un ton hésitant, tu l'as puni?

- Le mot punir est un peu faible. Il a osé abîmer ton beau visage, répond t-il en caressant ma joue avec son pouce.

Je devrais me sentir mal pour l'homme de main d'Ezio. Mon petit doigt me dit qu'il en a prit cher. Malgré tout ça je ne ressens rien. Quoi qu'il lui ait fait ce n'est pas mon problème. Ce type d'homme ne mérite pas ma pitié. Il n'en aurait pas eu pour moi si Ezio n'était pas arrivé à temps.

- Concernant ce que tu as vu hier soir, reprend Ezio en prenant une expression plus sérieuse. Cette femme que j'ai tué, c'était une proxénète. Elle a enlevé plus d'une centaine de gosses de 14 ans pour les prostituer à ses riches clients.

Je reste sans voix face à ces révélations. Quelle horreur! On a tendance à croire que les femmes sont innocentes mais elles peuvent être tout aussi cruelles que les hommes, voire pire. J'ai toujours entendu ce genre d'histoires aux infos télévisés mais avoir les faits presque sous les yeux, cela rend les choses bien plus horribles encore.

- P-pourquoi tu me dis ça?

- Elle a enlevé la fille d'une connaissance de longue date, Anna. J'ai retrouvé son corps il y a deux semaines et je te passes les détails sordides. J'ai promis à sa mère de venger sa fille. C'est ce que j'ai fais. Si on touche à des personnes qui comptent pour moi, je n'hésite pas à dégainer mon arme.

- Qui était l'homme?

- Celui qui faisait le sale boulot.

Je réprime un juron. Quand je pense que j'ai eu de la pitié pour cette femme et cet homme alors qu'ils ont commis tant d'atrocités. Je ne suis personne pour décider de qui doit vivre ou non mais certaines personnes ne devraient même pas exister.

- Est ce que... tu l'as tué lui aussi ?

- Ouais.

Mon cœur manque un battement.

- Ces gens étaient mauvais, certes, mais tu ne peux pas liquider quelqu'un comme ça! Tenté-je de rester neutre.

- Tu crois quoi? Que la justice se serait chargée d'eux? Les juges sont corrompus jusqu'au cou ici! Ils s'en seraient sortis sans encombre! Au moins je suis sûr que d'où cette salope se trouve elle ne fera plus jamais de mal à des gosses! Je suis quelqu'un d'influent, j'avais de quoi les stopper alors je l'ai fais...

Il a donc un coeur. Un brin d'humanité. L'expression que je vois sur son visage me montre à quel point ce genre de chose le révulse. Je ne cautionne pas ces actes barbares et comprend les motivations de mon tortionnaire, aussi funestes soient-elles. Il me montre aujourd'hui une nouvelle facette, une facette que je ne pensais jamais voir chez lui.

- Je vais aller te chercher de la glace...

Il se lève sans attendre du lit et sort de la pièce. Je m'extirpe des draps et me dirige vers la salle de bain attenante à la chambre. La première chose que je vois est mon reflet dans le miroir face à moi. Je m'approche doucement pour mieux voir l'état dans lequel je suis. Un large hématome violacé s'est formé au niveau de ma joue.

- Il ne m'a pas raté ce salaud, murmuré-je à moi même.

Je ne reconnais pas la personne que j'ai sous les yeux. Mes yeux verts sont vides, mes cheveux sont en bataille, mon teint est blafard. En l'espace de 2 semaines j'ai changé du tout au tout, que ce soit physiquement ou mentalement. Mes joues sont beaucoup plus creusées et mon corps est beaucoup plus mince qu'avant. Mentalement j'ai l'impression que mon esprit se blinde chaque jour un peu plus contre les atrocités qui se déroulent sous mes yeux.

Ezio apparait dans mon dos une poche de glace à la main. Son regard glisse le long de mon corps et devient soudainement plus dur.

- Il faut que tu manges, tu ne tiendras pas à cette allure...

- Cesare risque de m'affamer à coup sûr alors que je meurs ici ou avec lui, le résultat est le même. Je serai morte.

- Il ne te laissera pas mourir, tu représentes un investissement pour lui.

- Je ne te comprends vraiment pas! Dis-je en me retournant subitement. Tu tues des proxénètes pédophiles mais tu me vends comme une vulgaire marchandise!

- On a déjà eu cette conversation Cara! C'est un échange de service, c'est comme ça!

- Un échange de service? On parle de trafic d'êtres humains bordel!

- Les choses sont comme elles sont, je n'ai pas besoin que tu comprennes ou que tu me donnes ta bénédiction. Je fais ce qui doit être fait c'est tout.

- Dans combien de temps il viendra me chercher?

- Ne pense pas à ça pour l'instant.

- Facile à dire...

Il réduit la distance entre nos deux corps et pose la poche de glace sur mon hématome. Notre soudaine proximité me fait frissonner mais cela n'a rien à voir avec le froid de la glace. Son souffle se mêle au mien tandis qu'il tapote toujours ma joue. Il semble si concentré sur sa tâche que je n'ose pas dire un mot.

Cet homme aux milles facettes me fait trembler. Un mélange de feu et de glace. Un cocktail molotov prêt à exploser à tout moment. Reste à savoir quand.

The Maestro - Partie I ( Terminé)Where stories live. Discover now