Dévoile-moi Tome2

Chapitre 9 : Emma

Nous arrivons vers un camps de fortune une petite heure après avoir embarqué dans ces voitures tout-terrains. Loin de toute trace de grand ville ou de technologie. Ici, tout ce que je vois est un camps où visiblement, il y a beaucoup plus de malades que de médecins et la situation commence à devenir urgente.

La nature humaine me laisse sans voix. Comment peut-on laisser nos frères à leur sort de cette façon ? Comment pouvons-nous nous qualifier d'humains alors que l'humanité a cessé d'exister il y a des années de cela ?

Des petits enfants accourent vers nous, souriants, arborant sur leurs visages d'anges des sourires innocents, curieux de nous voir. Ils nous approchent, rigolent et nous parlent un peu. Ils ont cette force de caractère à un si jeune âge, cette expérience de la vie brutale dans sa forme la plus cruelle et pourtant ils sont là, devant nous avec le cœur sur la main. Ils nous accueillent comme si nous étions des héros alors que les véritables héros, ce sont eux.

Je me sens soudainement idiote, bête de penser que mes problèmes de la vie sont insurmontables, je ne vaux rien face à ces enfants qui sont plus courageux que tous les citoyens d'Amérique réunis.

On devrait prendre exemple sur eux, ils nous enseignent une belle leçon de courage.

On nous fait entrer dans une tante prévue pour l'occasion et on nous explique que nous allons ausculter des malades qui ne tarderont pas à venir.

Teddy se tient près de moi, souriante, prête à faire de son mieux pour aider les autres.

-"je crois que je viens de comprendre une chose" me chuchote-t-elle à l'oreille afin que je sois la seule à l'entendre.

-"quoi ?"

-"je viens de comprendre que j'aime ces enfants" me répond-elle, le regard attendri rivé vers un petit garçon chétif qui lui fait des signes de la main.

-"ils sont formidables"

-"je voudrai en adopter" laisse-t-elle échapper très sérieusement.

-"vraiment ?" quesionné-je incrédule, nous venons tout juste de débarquer.

-"j'y pense simplement"

Je hausse les sourcils, surprise puis me concentre sur le premier malade qui suscite mon aide, c'est une jeune femme dans la fleur de âge, le corps fatigué, la mine défaite mais les yeux incendiaires, brillants de vie et de courage.

Elle me décroche un faible sourire lorsqu'elle me montre l'endroit où la douleur la fait souffrir.

Quelque part au fond de moi, à mesure que les visages défilent, que mon cœur se comprime, je comprends que le monde a mal, que  l'humanité a mal. Toutes ces personnes innocentes malades et tout ce que je voudrai faire pour les aider sans en avoir les moyens. Si seulement, je pouvais faire plus.

Chase est debout de l'autre côté de la pièce, il converse avec un homme d'un certain âge, sûrement le chef du village dont les traits fatigués sont le signe flagrant d'un raz-le-bol général. Il plaide sa cause à Chase, le seul qui soit véritablement en mesure de faire bouger les choses, le seul qui puisse les aider et à ma plus grande surprise, il semble l'écouter avec une attention que je n'ai jamais vue chez lui. Il a réellement l'air d'être inquiet du sort de tous ces habitants.

Une petite fille s'approche timidement de lui et lui tend un objet que je n'arrive pas à identifier. Chase lui sourit et se met à genoux, elle lui passe un collier autour du cou, au bout duquel pend un petit cœur.

-"arrête de le mâter comme ça" murmure une voix suave à mon oreille.

Lorenzo, s'étant faufilé derrière moi, me décroche un clin d'œil moqueur.

-"je ne le mâte pas du tout" me défendé-je presque immédiatement en m'appliquant à panser les blessures d'un jeune homme blessé au cours d'un combat.

-"avoue qu'il ne te laisse pas indifférente tout de même" me lance-t-il en haussant ses sourcils d'un mouvement suggestif.

Je lève les yeux au ciel.

-"tu délires complètement, maintenant si tu le veux bien, j'aimerai travailler"

-"tu travailles bien non ?"

-"tu me déranges" répondis-je dans un grognement sonore qui le fait rire.

-"très bien, très bien" finit-il par dire en levant ses deux mains en signe de capitulation.

-"mais laisse-toi te dire simplement une chose avant de partir"

Ma curiosité piquée par ce qu'il vient de dire, j'acquiesce, l'invitant par la même occasion à me parler.

-"Chase est malade"

Je m'esclaffe.

-"comme si je ne le savais pas !" répliqué-je en ricanant, le corps traversé par un étrange sentiment.

Lorenzo secoue sa tête, la mine soudainement assombrie.

-"tu n'as pas l'air de comprendre. Chase est réellement malade, il a besoin d'une greffe"

Je suis un peu surprise par les révélations de Lorenzo. Bien qu'au courant de la situation de Chase, je ne pensais pas qu'il était dans un état aussi avancé de sa maladie.

-"pourquoi faire ce voyage dans ce cas ?!" m'exclamé-je.

-"il veut changer, devenir quelqu'un de bien et à présent que tu es là, il veut s'excuser"

J'éclate d'un rire sardonique, cruel.

-"qu'il aille au diable"

Lorenzo sourit.

-"je suis sûre qu'il t'a fait souffrir par le passé mais crois-moi, il a changé" plaide-t-il, légèrement dépassé par son accent suave et charmeur.

-"on ne change pas si facilement"

Lorenzo secoue la tête, la mine dépitée.

-"crois-moi, ce que Chase a vécu ces dernières années ont le pouvoir de transformer même les plus renfermés"

Je hausse les épaules, nullement impressionnée, simplement bornée, têtue, telle une enfant qui refuse d'écouter ce que les autres ont à lui dire.

-"je n'ai pas envie de le savoir"

Cette fois-ci, c'est à Lorenzo de froncer les sourcils. Il n'a pas l'air d'être très coopérateur, ni patient et mes réponses ont le don de l'énerver.

-"écoute moi bien querida, je suis simplement venu te parler, pas la peine d'en sortir tes crocs et si tu penses m'impressionner, il faudra revenir dans un millénaire parce que j'ai été élevé par la plus belle des diablesses"

Et il s'en va sans prendre la peine d'attendre une quelconque réaction ou réponse de ma part. Je le suis des yeux alors qu'il sort et me rends compte que Chase me fixe, les sourcils arqués, le regard interrogateur.

Je détourne la tête et me concentre sur ce que je faisais depuis le début : soigner des gens dans le besoin. Je n'ai besoin d'aucune distraction pour accomplir ma tâche alors Chase et Lorenzo n'ont qu'à aller se faire voir !