Chapitre 14 : Chase

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-"lève toi !"

Une voix rauque m'arrache au sommeil.

Je me retourne, étouffant un grognement mécontent, peinant à émerger du sommeil, seul refuge aux damnés de mon espèce qui cherchent un semblant de réconfort.

Je tente de me relever, le corps tiraillé de douleur, les muscles engourdis, je ne suis même plus capable de correctement reprendre ma respiration.

-"lève-toi !" répète la voix, moqueuse, teintée d'une cruauté non dissimulée.

Je grogne une nouvelle fois, trop faible pour pouvoir articuler le moindre mot.

Je suis épuisé, à bout de force et la douleur est si intense que je suis tenté de simplement me laisse dépérir sur ce sol pouilleux et sale.

Une forte pression au poignet me tord de douleur, on tente de me relever mais je m'écroule, las, souffrant.

-"lève-toi si tu veux assister à l'exécution de ton ami"

J'ouvre grand les yeux, catastrophé, apeuré par ce que viennent d'entendre mes oreilles. L'espace de quelques secondes, je prie le ciel d'avoir mal entendu mais l'expression de cruauté qu'affiche mon bourreau anihile mes doutes dans un moindre temps. 

-"quoi ?" dis-je au prix d'un immense effort, la gorge sèche.

J'ai envie de hurler mais je ne le supporterai pas, j'ai envie de pleurer mais il n'y a plus de larmes dans mon corps que je pourrai verser.

-"le patron est là, il veut que tu sois présent"

Je déglutis péniblement puis avec la force de désespoir je me relève, manquant de vaciller sur le côté et reprendre ma place d'origine. Je boite lentement derrière mon ravisseur, je ne prends pas le temps d'admirer le tableau qui m'entoure, trop fatigué pour pouvoir porter un quelconque jugement. Tout ce qui m'importe en ce moment est Lorenzo, comment va-t-il s'en sortir ?

Va-t-il seulement s'en sortir ?

Je préfère ne pas trop y penser. Si je venais à perdre ce frère si cher à mon cœur, cet ami de si longue date, je ne m'en remettrai jamais. Lorenzo a été présent dans chaque étape de ma vie, il m'a soutenu, m'a encouragé et m'a aimé comme son propre frère.

Merde ! Il m'a même embrassé alors qu'il était ivre mort et moi, un peu trop curieux.

Je marche, sentant le sol se dérober sous mes pieds à chaque pas, mes yeux s'emplir de larmes dont je ne soupçonnais plus l'existence. J'ai tellement envie de m'en sortir, de reprendre une vie normale, je prendrai ma mère dans mes bras, la serrerai si fort qu'elle devra me repousser pour que je la lâche, je m'excuserai auprès de mon père pour toutes les fois où je l'ai déçu, auprès de ma sœur également et lui dirai qu'envers et contre tout, je l'aimerai toujours.

J'inviterai Emma à dîner et lui décrocherai la lune pour me faire pardonner si l'idée saugrenue fleurissait dans son esprit, je m'excuserai jour et nuit pour tout ce que je lui ai fait et passerai le reste de mes jours à lui prouver ma bonne foi. Je l'embrasserai également, pas qu'une fois, pas que sur les lèvres.

Je m'excuserai auprès de toutes les personnes que j'ai maltraitées, sans exception : Jacob, Sydney, Matthew, John, mon ancienne équipe de hockey : absolument tout le monde.

Mais pitié ! J'ai simplement envie de rentrer chez moi.

Je ne crois pas en dieu mais en cet instant, alors que la vie me tourne le dos, je lève les yeux vers le haut et me mets à prier.

-"plus que ça putain !" s'écrie l'homme agacé.

D'un geste rageur, il me pousse à l'intérieur d'une pièce à peine éclairée. Je tombe à la renverse, épuisé.

-"enfin un spectateur"

Je lève les yeux vers le détenteur de cette et reste pétrifié l'espace de quelques secondes devant l'homme qui vient de parler. Un homme plutôt petit, hagard, chauve mais dont la présence est terrifiante.

À ses pieds se trouve Lorenzo, à genoux, attaché telle une bête sauvage, un phénomène de foire, il est complètement nu et sur son corps gît une infinité de marques, d'ecchymoses et bien évidemment du sang. Ses yeux rougis sont enflés et son visage tellement tuméfié que j'aurai presque du mal à le reconnaître.

-"Lorenzo !" crié-je aussi fort que je le pouvais, le voix nouée par l'émotion.

L'homme au costume blanc se lève, de sa démarche assurée, il se penche vers Lorenzo et lui ébouriffe ses cheveux sous les regards amusés de ses hommes de main.

-"qu'est-ce qu'il a fait ?" demandé-je suppliant.

Il se tourne vers moi puis esquisse un dangereux rictus qui me glace d'effroi.

Il se saisit de mon ami par les cheveux et le renverse, se délectant visiblement de chaque plainte de douleur qui s'échappe de lui. 

-"Lorenzo ici présent a pensé que ça serait une bonne idée de s'attaquer à moi" commence-t-il d'une voix posée, monocorde.

Lorenzo se relève.

-"après ce que Bernardo a fait subir à ma mère et ce que tu fais aux jeunes filles des bidonvilles, c'est normal que je me débarrasse de pourritures comme toi"

-"qui t'a donné l'autorisation de parler ?" contre-t-il en lui assénant un coup aux côtes.

Le corps de Lorenzo se tord de douleur, sa respiration s'accélère et les gémissements d'agonie qui lui échappent me sont insupportables.

-"je suis sûr que son père est disposé à payer !" fis-je rapidement en voyant le mafioso se pencher sur le corps inerte de sa victime.

Il arque un sourcil amusé.

-"tu ne semble pas comprendre ce qui se passe amigo"

Il allume une cigarette, tire quelques taffes puis reprend :

-"Lorenzo Aaron De Hayos a pensé être plus malin, il ne savait pas qu'il avait en face de lui quelqu'un de plus fort"

-"laissez-nous partir"

Il secoue la tête.

-"toi, tu peux espérer sortir mais lui, n'y compte pas"

Il se tait quelques secondes puis d'un geste las, écrase son mégot encore allumé contre la peau de Lorenzo.

-"tu veux sauver les putes des bidonvilles ? Tu veux rendre hommage à ta mère ? Cette pétasse que mon frère a défoncée ? Sa chatte n'en valait pas le coup"

J'ecarquille les yeux, abasourdi.

Lorenzo éclate de rire, un rire sardonique, empreinte de folie et soudainement, je l'admire. Jamais je n'ai vu quelqu'un d'aussi courageux que lui, l'espace d'une seconde j'aurai juré voir son père en lui, implacable, même face à une mort imminente.

-"je vais te tuer fils de pute !" hurle Lorenzo, fou de rage.

-"je vais t'arracher la bite et te l'enfoncer si fort que tu vas étouffer !" continue-t-il de hurler en bougeant dans tous les sens, difficilement retenu par les hommes de main de celui qui semble être le patron.

D'où peut-il encore tenir cette force ?

L'homme au costume blanc secoue la tête.

-"le seul qui va mourir ici, c'est toi"

Lorenzo est encore une fois mis à genoux sous mes cris de désespoir. L'homme sort une arme de sa poche et la pointe sur le front de mon ami, ce dernier ne cille pas, au contraire, de ses yeux ébène il fusille son assaillant du regard, tel un fauve majestueux.

-"baisse les yeux !"

-"jamais"

Je ferme les yeux.

Un coup de feu retentit.

Bientôt suivi d'un autre...


Dévoile-moi Tome2Where stories live. Discover now