41/ Acheter la paix

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Olimpia réintègre l'appartement le lendemain avec deux petits paquets dans son sac. Le premier contient un téléphone. Le second un livre.

Azzo lui a confié l'appareil, sachant que Céleste ne refusera rien venant de son amie. Quant au livre, il s'agit de celui qu'elle a consulté dans la bibliothèque d'Alessandro Malatesta. Par ce geste, la famille tend un calumet de la paix que Céleste, il l'espère, ne pourra repousser.

– Pia... ce téléphone... c'est Galeazzo qui te l'a donné pour moi ?

– Tu peux dire Azzo, tu sais.

Céleste ne peut pas révéler à Pia qu'elle préfère le prénom entier. Elle aime le dire. Galeazzo. C'est comme un roulement harmonieux et doux. Rien à voir avec son propriétaire. Mais bon, le prénom lui plaît.

– Pia ?

– Bon, ok. C'est lui qui me l'a donné pour toi. Mais c'est normal, Céleste ! Il a cassé l'autre ! C'est comme si c'était l'assureur qui le remplaçait !

– Sauf que ça n'est pas l'assureur, et que je lui ai spécifiquement dit que je ne voulais rien lui devoir...

– Mais tu ne lui dois rien puisqu'il répare une erreur... D'ailleurs, c'est vrai que tu as failli avoir une crise cardiaque ?

– Tu changes de sujet ! J'y crois pas !

– Oh ! Ça va Céleste ! Tu vas faire comment sans téléphone ! Je dois pouvoir te joindre à toute heure du jour et de la nuit ! On est amies ! Tu te souviens !

Céleste éclate de rire et ouvre le paquet qu'elle tient sur ses genoux. Pia a raison. Elle a besoin d'un téléphone et pas seulement pour l'appeler. Elle découvre un modèle dernier cri... et se demande si elle saura s'en servir. Elle est spécialiste du moyen-âge, pas des nouvelles technologies...

Elle dépose la boite ouverte sur le lit et s'attaque au second paquet.

– Oh ! Ça, je ne peux pas accepter... Ce livre a sans doute de la valeur ! Ton père ne peut pas me l'avoir offert. Pas de son plein gré, en tout cas !

– Mais si... En fait, Azzo lui a demandé s'il pouvait le prendre pour le vendre. Et Papà lui a dit oui sans même regarder. Tu sais, la plupart des livres qui se trouvent dans la bibliothèque sont là depuis avant mon père. Ce sont des trésors familiaux dont il ne connaît pas toujours l'existence. Je crois qu'il ne sait même pas ce qu'Azzo a pris.

– Raison de plus pour le lui rendre...

– Arrête ! Céleste ! Il faut savoir accepter des cadeaux... D'autant plus, quand c'est pour acheter la paix.

– Acheter la paix ? Ton frère croit qu'il peut tout régler avec un livre et un téléphone ! Il va falloir qu'il fasse beaucoup plus que ça... Mais qu'est-ce que je dis, moi ? N'importe quoi ! Je ne veux rien qu'il règle ! C'est bon, je prends les cadeaux...

Pia s'est levée avec un grand sourire aux lèvres. Alors comme ça, Azzo va devoir faire plus d'efforts ? L'armure de Céleste commence à se fissurer sérieusement. Ça risque de devenir intéressant.

– Attends, Pia, moi aussi j'ai quelque chose pour toi.

– Tu as quelque chose pour moi ? Mais je ne t'ai pas fait de cadeau... c'est Azzo...

– C'est ta famille... Et comme je ne peux faire un cadeau à chacun d'entre vous, j'ai choisi de t'en faire un à toi... En plus, c'était plus simple pour moi.

Céleste dépose entre les mains de son amie un petit paquet plat et mou enveloppé dans du papier de soie rose. Pia se rassoit aussitôt pour l'ouvrir.

– Madre de dio, mais c'est... somptueux !

Pia n'a pas l'habitude d'utiliser des adjectifs aussi grandiloquents, mais rien d'autre ne lui est venu en voyant ce qu'elle tient maintenant devant elle. Céleste lui offre un ouvrage arachnéen fait de fils délicats et soyeux. C'est un châle. Un châle absolument magnifique de la couleur préféré de Pia : carmin.

– J'ai cherché un peu avant de trouver la bonne couleur, mais j'ai fini par trouver... la laine vient de la région de Milan, je crois...

– Comment... tu veux dire que c'est toi qui l'as fait !!!

– Heu.. Ben oui... Je l'ai fait pour toi...

– Mais c'est incroyable ! Tu as de l'or dans les mains ! Tu le sais, ça ! Je n'ai jamais rien eu d'aussi précieux et délicat ! J'ai l'impression de posséder un trésor...

– Il ne faut pas exagérer quand même Pia. C'est juste un châle. Et certains rangs ne sont même pas réguliers ! Je suis plus douée en broderie qu'en tricot... mais j'ai pensé que ça te serait plus utile qu'un foulard.

Pia ne répond rien. Elle dépose précautionneusement son châle sur le lit et saute au cou de Céleste pour la remercier. Giuseppe arrivant sur ces entrefaites, en profite pour avoir sa part de câlins. Toujours là au bon moment ce Giù !

Romance à l'italienneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant