[Taekook] Get me out of my blues

Partie 1

Taehyung regardait le tarmac d'un air rêveur. En cette belle journée d'août, il faisait une telle canicule à Séoul que le monde semblait avoir pressé le bouton « pause ». Les oiseaux ne chantaient pas, les cigales crissaient avec toute la peine du monde, tout semblait bouger au ralenti. Une brume de chaleur s'élevait du sol et faisait onduler la tôle des véhicules utilitaires qui stationnaient sur la piste, ainsi que la façade de l'unique bâtiment de l'aéroport.

— Il est en retard, grogna Namjoon.

Taehyung tourna un regard distrait vers son collègue, qui, debout à côté de lui, inspectait une dernière fois les placards de la cabine avant du jet. Ils avaient bien entendu assisté à une réunion d'information sur la sécurité, comme avant chaque vol, et inspecté tout le matériel, mais Namjoon, chef de cabine, était du genre à revérifier chaque détail à l'infini. Ce qui était plutôt une bonne chose – Taehyung était content de travailler avec quelqu'un qui prenait son métier au sérieux.

Contrairement à Hoseok, le troisième steward de leur petit équipage de cinq, qui était en ce moment même assis de tout son long sur le canapé en cuir blanc destiné au client.

— On devait partir il y a une demi-heure. Ces stars, je vous jure, grogna-t-il.

— On a désinfecté ce canapé, grommela Namjoon en sortant la tête de son placard. Lève-toi tout de suite et passe une lingette.

— Ça va, je me suis lavé ce matin ! s'exclama Hoseok, outré. Et mon uniforme est propre.

— Tu vas le froisser si tu restes assis là, répondit Taehyung avant de tourner à nouveau son regard vers l'extérieur. Et en plus, il arrive.

Effectivement, plusieurs silhouettes venaient d'émerger de l'aéroport ; Taehyung ne parvenait pas encore à distinguer leurs traits, masqués comme ils l'étaient, mais il savait de qui il s'agissait : Jeon Jungkook, le chanteur qui avait réservé le jet privé, accompagné de son petit ami, dont Taehyung avait lu le nom sur le contrat de confidentialité qu'il avait été obligé de signer, mais qu'il avait oublié entretemps ; sans compter deux gardes du corps, pour l'instant reconvertis en tireurs de valises. Le reste du groupe était constitué du personnel de l'aéroport et de leur pilote, Seokjin, qui devait mourir de chaud dans son bel uniforme. (Yoongi, le co-pilote, attendait déjà dans le cockpit climatisé.)

Pendant que Hoseok se levait d'un bond et passait vivement une lingette désinfectante sur le canapé, Taehyung sortit par la porte ouverte de l'avion et descendit les marches pour accueillir son client au sol.

— Bienvenue chez Bangtan Air, entonna-t-il lorsque Jeon Jungkook ne fut plus qu'à quelques pas de lui. Merci d'avoir choisi de voyager en notre compagnie.

Malgré le sourire avenant qu'il avait plaqué sur ses lèvres, Taehyung n'avait pas de grandes attentes en ce qui concernait Jeon Jungkook. Il travaillait comme agent de bord depuis sept ans, d'abord sur des vols commerciaux, puis, depuis trois ans, en tant que personnel naviguant dans une compagnie louant des jets privés aux particuliers. Il était habitué à fréquenter l'élite, qu'il s'agisse de directeurs de banque, d'acteurs, de politiciens, de chanteurs, et il savait maintenant parfaitement à quoi s'attendre : de l'indifférence au mieux, de l'arrogance souvent, du harcèlement au pire. Parfois, il avait une bonne surprise – quelqu'un qui lui disait bonjour, qui lui souriait poliment sans que ce soit dans une optique de drague, mais on ne pouvait pas dire que l'occurrence soit fréquente.