Chapitre 7 - Inquiétude maternelle

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Quatre jours plus tard à Duart Castle

Cela faisait maintenant une dizaine de jours que le Deamhan mara l'avait débarquée sur l'île de Mull et Jamesina ne parvenait toujours pas à renouer avec la vie qu'elle menait avant son exil dans les Lowlands. Pourtant, peu de choses avaient changé en son absence ; quelques chaumières avaient été construites, les écuries avaient été agrandies, de même que les clapiers, et de nouveaux enclos pour les chevaux avaient été aménagés. Elle avait aussi eu grand plaisir à retrouver les habitants du château et les villageois. Ils avaient accueilli son retour avec joie, soulagés de la savoir en vie et bien portante. Malgré tout, elle ne se sentait plus chez elle à Duart. Il lui semblait qu'un fossé infranchissable s'était creusé entre sa vie d'avant et celle qu'elle avait menée ces dernières semaines. Elle n'arrivait pas à oublier ce qu'elle avait vécu à Tioram Castle.

Elle restait de longues heures, le regard perdu au loin, à la fenêtre de sa chambre en songeant à ceux qu'elle avait laissés derrière elle en s'enfuyant. L'affection touchante de Roddy, Shona et Bruce lui manquait. Ses jeunes frère et sœur étaient très câlins avec elle, mais Taran et Lilias ne la voyaient pas avec le même regard que les enfants MacDonald. Elle était nostalgique de leurs entraînements d'archerie ou d'équitation. Et plus que tout... Cailean lui manquait. Leurs joutes verbales, leurs affrontements à l'épée, la vision de sa haute silhouette musclée, le timbre grave de sa voix, la petite fossette qui creusait sa joue quand il lui souriait... tout cela lui manquait cruellement. Quand elle se concentrait, elle pouvait encore éprouver la sensation de ses mains calleuses sur sa peau, la fermeté de ses muscles et la douceur de ses cheveux sous ses doigts.

Lady Iseabail mettait tout en œuvre pour essayer de se rapprocher de sa fille, mais en vain. Affligée de la voir s'étioler au fil des jours, elle alla prendre conseil auprès de son ancienne nourrice.

— Je ne sais plus quoi faire, Eilidh ! Elle dépérit chaque jour un peu plus. Elle n'a plus d'appétit, ses joues se creusent. Elle sourit, mais c'est un sourire contraint, ses yeux ne pétillent plus. Ses traits sont marqués par la fatigue, elle ne dort pas suffisamment. Je pense qu'elle passe une partie de la nuit à pleurer, car ses yeux sont rouges et gonflés le matin. Elle s'endort parfois d'épuisement en plein milieu de la journée. Que puis-je faire pour l'aider à aller mieux ?

— Rien, à part l'entourer d'affection et l'écouter.

— Mais elle ne veut rien me dire !

— Pourtant, cela lui ferait du bien de s'épancher sur ce qu'elle a vécu.

Lady Iseabail se tordait les mains de désespoir tout en allant et venant devant le banc où était assise la vieille aveugle.

— Gavin a essayé de la faire parler, mais elle refuse de se confier à nous. Tu es mon seul espoir. Parle-lui.

Nay, j'ai déjà discuté avec elle pendant les deux jours où je suis restée au château et je n'ai pas eu plus de succès que vous.

— Maudits soient ces monstres qui l'ont enlevée ! Ils ont brisé ma Jamie.

— Elle a été traumatisée, certes, mais ta fille n'est pas brisée. Ta petite Jamie a toujours fait preuve de courage et de volonté. Elle est forte, elle se remettra. Rassure-toi, tu la retrouveras, elle a juste besoin de temps pour accepter ce qui lui est arrivé.

— Justement, nous avons besoin de savoir ce qu'il lui est arrivé exactement. J'ai peur que nous commettions un impair avec elle, que nous ravivions ses craintes ou ses souffrances par notre ignorance.

— J'ai une impression étrange à son sujet, marmonna l'aïeule.

— Quel est-il ?

Comme l'aveugle ne se décidait pas à parler, la dame MacLean se fit pressante :

L'épouse de la réconciliationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant