Chapitre 4 : Contradictions.

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Chapitre 4.1 : Contradictions.

           — Cette porte conduit aux quartiers des dames.

Julia écouta attentivement le majordome lui dévoiler les coulisses de l'office. Pendant plus d'une heure, Monsieur Deveau l'avait guidée à travers les dédales du vaste domaine de Chantilly. D'innombrables chambres, des décorations somptueuses, des objets d'art et des ornements luxueux composaient le tableau de cette richesse indéniable et du confort qui en émanait. Les écuries et les jardins défilaient sous leurs pas, le tout enveloppé dans un silence uniquement rompu par les informations distillées par le majordome. Bien qu'ils aient marché côte à côte, l'atmosphère était électrique depuis l'incident devant les employés, qu'il n'avait sûrement pas apprécié. Il était contrarié, cela ne faisait aucun doute.

— Et cette porte ci, articula Henri Deveau en indiquant une autre entrée à droite de celle menant aux escaliers en spirale par lesquels ils étaient arrivés. C'est l'accès aux quartiers des hommes. Mademoiselle Lambert aura l'honneur de vous guider vers votre chambre lorsqu'il sera l'heure de clore la journée.

— Clore ?

— Effectivement. Les portes de chacun des quartiers se ferment à clé une fois que chaque occupant est à l'intérieur. J'ai la responsabilité de la clé du logement masculin. Vous, en revanche, êtes en charge de celle du côté féminin.

— Donc... Tout le monde se retrouve enfermé durant la nuit ? Personne ne peut circuler librement ?

— Exact, répliqua fermement le jeune homme. Vous vous réveillerez simultanément avec les aides de cuisine et aurez la charge d'ouvrir la porte. Je m'acquitte de la même tâche avec les palefreniers.

— Cela semble excessif... soupira Julia, bien qu'elle comprenne et trouve réconfortant que l'accès aux quartiers féminins soit sécurisé contre les intrusions masculines.

Monsieur Deveau prit une grande inspiration et se positionna en face de Julia, le dos droit et la tête haute, la dominant d'au moins une tête. Il abaissa le ton pour ne pas être entendu, mais son expression resta ferme et empreinte de sévérité :

— Écoutez... Je n'ai pas soulevé la question plus tôt afin de ne pas altérer votre crédibilité aux yeux des autres domestiques. Toutefois, je vous prie de ne plus jamais me manquer de respect.

— Je...

— Je suis votre supérieur, déclara Henri Deveau d'une voix plus forte, ne laissant pas Julia placer le moindre mot. La jeune femme déglutit difficilement, embarrassée. Certaines personnes peuvent penser que, du fait de ma jeunesse et de ma courtoisie, je suis leur ami, à tort. Je ne suis l'ami de personne ici, pas plus que le vôtre. Je suis votre supérieur, insista-t-il avec sévérité.

Les joues de Julia s'empourprèrent, son regard pénétrant la figeant sur place. Les paroles d'Henri la rendaient honteuse de sa conduite méprisante un peu plus tôt.

— Nous avons la possibilité de collaborer harmonieusement, ou de nous engager dans une lutte stérile. Le choix vous appartient. Cependant, soyez certaine que je serai celui qui en sortira victorieux. Le fait que vous ayez été engagée par Madame Dubois ne m'empêchera pas de vous renvoyer si je le juge nécessaire. Et sachez que Monsieur De Villiers place une confiance aveugle en moi. Il ne poserait aucune question. Tenez vous à cela.

Julia considéra la dernière remarque d'Henri Deveau comme une menace voilée, mais elle décida de ne rien répliquer. Ces paroles sonnaient comme un avertissement, mais elle avait bien l'intention de faire face à ce défi tôt ou tard.

— Bien, Monsieur, répondit elle simplement.

— Parfait, déclara le jeune homme en se détendant et en esquissant un sourire. Toutefois, ce sourire paraissait contraint comparé à ceux qu'il avait arborés plus tôt dans la matinée. J'ai des obligations à remplir. Néanmoins, si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas.

Révérences et Révoltes : Amour PartagéWhere stories live. Discover now