Chapitre 23

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J'entends le rire d'Éros et ce son me fait immédiatement tourner la tête vers lui. Son sourire a l'air sincère et c'est un soulagement de l'entendre rire après cette révélation. Je m'étais préparée à tout sauf à cette réaction qui me tire un léger sourire à mon tour.

— Ces créatures sont vraiment prêtes à tout, même à mentir pour arriver à leur fin.

Mon sourire se fane et j'ai l'impression de recevoir un coup de poing dans le ventre. J'avais un infime espoir, celui qu'il se souviendrait quand la vérité lui aurait été révélée ou même que notre lien lui apparaitrait telle une évidence... J'avais nourri un espoir vain, encore une fois... Quand il surprend mon expression, la sienne se détériore à son tour.

— Tu n'es pas en train d'essayer de me faire croire que c'est la vérité ?!

— Je n'essaie pas de te faire croire quoique ce soit... je passe ma langue sur mes lèvres cherchant mes mots. J'aurais aimé t'en parler plus tôt, mais le choc, ton retour, l'emprisonnement, tout ce sang, je ne savais pas quand aborder le sujet.

— Mais tu as dit que ton âme sœur était morte. Alors je ne sais pas à quel jeu pervers tu essaies de jouer et comment tu as convaincu des Varas Kare de t'aider, mais ça ne marche pas.

— Mais tu es mort.

Je n'arrive plus à mentir. J'aimerais tout réparer. Je fais un pas vers lui, mais me stoppe en surprenant son regard.

— Je n'y crois plus. J'ai peut-être douté quand Léandre me l'a affirmé, mais je sais à présent que ce n'était que des affabulations pour me manipuler. Comment pourrais-je être mort et ressusciter sans m'en souvenir ? Pourquoi mon père ne m'aurait-il rien dit ?

Je me rapproche de lui de quelques pas et il ne bouge pas. Le convaincre me paraît complètement illusoire.

— Je t'assure que ce n'est pas un mensonge.

— Tu as dit que ton âme sœur était morte d'une épée enfoncée dans le cœur. Je pense que si j'avais été cette personne j'aurais une cicatrice. Je ne sais pas si tu essaies de me faire du mal, de me manipuler ou si tu essaies de te convaincre toi-même, mais tu devrais arrêter ça. Ça en devient pitoyable.

J'ai un mouvement de recul. Je secoue la tête pour ignorer mon esprit qui s'affole et se demande si je suis réellement pitoyable.

— C'est impossible que tu n'aies pas de cicatrice.

— C'est bien ce que je dis.

Je fronce les sourcils, ne comprenant manifestement pas ce qui se passe dans cette forêt gelée.

— Je veux voir.

Je me sens tellement désespérée. Ma voix me dégoûte. Comment puis-je tomber si bas ? Il y a encore quelques heures, nous nous étranglions, mais maintenant qu'il sait j'ai l'impression que notre lien est plus que réel. J'arrivais à me persuader qu'il était mort et enterré en pensant qu'il était un autre. J'arrivais à me persuader que c'était ainsi et je comptais m'y faire. À présent, je me rends compte que je me berçais d'illusions et que malgré sa perte de mémoire et le fait qu'il veuille me tuer, je l'aime.

Je ne sais pas pourquoi il fait ce que je lui demande, mais il retire les premiers boutons de sa chemise. Il doit me trouver pathétique au point de me prendre en pitié. Lorsqu'il arrive au bouton au niveau du cœur, je retiens ma respiration. Il le retire et découvre son torse. Je sillonne sa peau à la recherche d'une cicatrice, mais elle est lisse. Mon cerveau refuse de comprendre cette information. Je m'approche encore pour mieux voir comme si ce mouvement allait changer quelque chose. Je déglutis péniblement et lève la main pour toucher son torse. Je me mords la lèvre inférieure. Il n'esquisse aucun mouvement comme pour me permettre d'accepter la chose. Je l'ai vu... J'ai vu l'épée ressortir par son torse. J'ai vu son corps frapper le sol ainsi que l'épée d'Ezra souillée de son sang. Je n'ai pas pu rêver de ce malheur, je n'ai pas pu imaginer ma douleur.

Le Joyau de Nostraria, tome 3 : la naissance d'une légendeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant