Pact with the Devil

Chapitre 7 - "Te repends-tu?"

Chapitre 7.

Une silhouette était agenouillée dans l'ombre, les muscles tendus, saillants, et la mâchoire crispée. De minces rayons de lumières faisaient briller les épaisses chaînes à ses poignets qui le maintenaient au sol. En plissant les yeux, on pouvait distinguer dans la pénombre deux grandes ailes qui, si elles avaient un jour été d'une blancheur éclatante, étaient maintenant lourdes et noircies de poussières noires. Des plumes arrachées parsemaient le sol. Et ses genoux étaient fêlés sur le plancher fissuré de pierres gelés.

À quelques pas de là, il y avait un autre homme. Il n'était pas bien plus grand que le premier, d'un ou deux centimètres seulement. Il possédait une épaisse et longue chevelure blonde chatoyante comme le soleil qui tombait par-dessus une paire d'ailes immense, blanche et douce. Son beau visage exprimait l'agacement. Il n'était pas en colère, il ne se mettait que rarement en colère, mais cette fois-ci, il avait atteint ses limites.

-Lucifer! Appela-t-il, sa voix grave ricochant sur les murs dans un écho sans fin. Te repends-tu?

Le prisonnier leva la tête. Ses yeux d'un bleu rare, bleu comme le ciel au petit matin, brillèrent dans l'obscurité.

-Me repentir? Répéta-t-il.

Mais pourquoi le devrait-il? Il n'avait rien fait de mal. Du moins, le croyait-il. De quoi devrait-il se repentir? Son seul crime avait été d'avoir aimé... Son Dieu lui avait pourtant toujours prêcher l'amour de son prochain, la gentillesse et la bonté. Il ne comprenait pas.

-Me repentir? Redit-il.

Cette fois, sa voix sembla déchirer le silence. Ce n'était plus qu'un cri plaintif, une plainte dans la nuit qui demandait à être entendue. Qu'on lui explique pourquoi ce qu'il avait fait était si mal, qu'on le lui dise!

Il n'avait rien pu faire. On l'avait envoyé sur la Terre pour veiller sur un petit humain, pour être son ange gardien, mais à la seconde où ses yeux s'étaient posés sur lui, son cœur avait flanché. Il ignorait alors qu'un tel sentiment pouvait l'étreindre. Il ne savait même pas comment cela s'appelait. Tout ce qu'il savait, c'était que son cœur battait à l'en défoncer la poitrine à? chaque fois qu'il le voyait sourire, puis rire. Puis, un jour, il s'était rendu compte que son humain ne riait plus, ne souriait plus. La vie l'avait rattrapé et la joie de vivre dont il avait fait preuve enfant s'était volatilisé comme elle était venue. Lucifer n'avait pas pu rester insensible face à ça. N'était-il pas son ange gardien?

Il avait posé ses lèvres sur les siennes, cherchant à aspirer chaque once de mal se terrant en lui. Comment Dieu pouvait-il le punir alors qu'il venait tout juste de goûter à la plus douce de toutes les lumières?

-Me repentir?

Cette fois-ci, ce n'était plus qu'un ricanement sarcastique, dénué de toutes émotions, un rire sans joie qui lui vrillait la gorge sèche.

-Tu t'y refuses donc? Tonna la voix du grand blond.

-Toi qui es sensé être si bon, tu me menaces, parce que j'ai aimé d'un amour sincère et profond un autre que toi, alors que tu me l'avais enseigné?

-Tu as brisé les fines règles qui régissent notre monde, Lucifer. L'équilibre doit être rétablie. Aimes-tu suffisamment pour y laisser ta vie, telle est la question?

-Qu'attends-tu de moi? Je ne te laisserai pas tuer un innocent pour ce que tu considères être mon pêché.

-Tu me déçois, Lucifer. Je t'avais choisi pour siéger à ma gauche et m'aider dans ma tâche, mais tu gâches les espoirs que j'avais placé en toi. Gabriel, lui, m'est toujours demeuré fidèle.

-Je n'ai rien gâché : c'est toi qui as trop espéré pouvoir me changer, mais j'ai toujours représenté tous tes mauvais côtés, ta colère, ta peine, toutes tes tentations et tous tes vices.

-Très bien. Alors, il est venu le temps que tu paies pour tout ça, car il y a toujours un prix.

-Ce n'est pas en m'éliminant que tu deviendras meilleur. Nos mauvais côtés finissent toujours par ressurgir un jour où l'autre et, en attendant, ils attendant en silence, tapis au fond de chacun de nous.

Lucifer tira furieusement sur ses chaînes qui lui entaillèrent les poignets, en vain. Dieu sortit une grande et brillante épée du fourreau pendant à sa ceinture, puis la leva au-dessus de sa tête.

-Dès à présent, je te chasse du Paradis et toi qui as trop aimé, tu n'en seras plus capable.

Et la lame de la vérité s'abattit.

Jason ouvrit brusquement les yeux d'un seul coup. Ses muscles étaient bandés et tout son corps en sueur. Peut-être même avait-il hurlé. C'était encore se fichu cauchemar qui, nuit après nuit, revenait pour le tourmenter dans son sommeil.

Il grogna et, serrant les pans de son large manteau autour de lui, il descendit du lit. Jetant un regard au sol, il aperçut Ethan qui le fixait, la bouche béante et les yeux grands ouverts : il avait probablement hurlé, tout compte fait. Jason jura. Pourquoi ce devait être lui?

-Arrête de me regarder comme ça où je pourrais comprendre que tu veux que nous reprenions là où nous nous sommes arrêtés hier soir! Déclara-t-il avec un rictus moqueur qui eut toute suite son effet sur Ethan qui baissa rapidement la tête, les joues sûrement rouges.

Le vampire gémit, puis gigota sur son oreiller. Le démon haussa un sourcil en se demandant ce qui n'allait pas.

-Soif? Finit-il par demander, pensant comprendre ce qui tracassait le suceur de sang.

Ethan secoua la tête. Il mentait, bien entendu. La vérité, c'était qu'il ne voulait pas se nourrir une fois de plus au cou de Jason.

-Vous criiez dans votre sommeil, fit-il remarquer à la place. Pourquoi?

Le démon se tendit.

-Ma condition à quelques désagréments, répondit-il, sa bouche se tordant.

Il se baissa et détacha Ethan pour lui permettre de se mettre sur ses genoux.

-Lève-toi.

Le vampire s'exécuta. Jason passa derrière lui et Ethan dut réprimer un frisson. Le démon souleva son chandail et observa son dos d'un œil d'expert. Il se pinça les lèvres.

-Tu en garderas peut-être des marques, mais tu cicatrises vite.

Un des nombreux avantages d'être un vampire.

-Il y aura une réception ce soir, je veux que tu m'y accompagnes. Je dois te présenter aux autres pour éviter que l'on ne te mette la patte dessus dès que j'aurai le dos tourné : tu sais comme les démons sont fourbes...

Ethan demeura silencieux, mais il finit par hocher « non » de la tête. Jason plissa les yeux de mécontentement.

-Tenterais-tu de me désobéir?

Son regard ambré était de nouveau rougeâtre.

-C'est vous-même qui l'avez dit : tout a un prix. Si je vous accompagne à cette fête, je veux quelque chose en échange.

-Tu n'es pas en position de marchander.

-Je sais.

Un sourire se forma sur les lèvres de Jason. Son vampire voulait jouer à ça, hein? Voilà qui devenait amusant.

-Très bien, finit-il par lâcher, curieux de savoir ce qu'allait lui demander l'autre. Que veux-tu?

-Vous l'avez dit : les démons sont fourbes et manipulateurs. Je veux savoir si c'est vous qui m'avez tué.