ÉPISODE 109 - (partie 1/8)
Durant le trajet Darney-Pinsburry, Rudy essaya de mettre de l'ordre dans ses pensées. Classer ses sentiments, étiqueter ses émotions. Ranger le bordel dans sa tête et son cœur l'aiderait à tenir une conversation productive avec Rey. Heidi avait eu raison, la franchise lui aurait épargné ces tourments. Il aurait dû dire à sa moitié ce qu'il éprouvait, car à force de dissimulation, il nourrissait les insécurités de Rey.
— Je passerai toujours au second plan, Rudy. Tu ne me ferais pas ça si tu m'aimais. Tu as... de l'affection pour moi. Tu me tolères.
Comment rattraper cela ? Un « je t'aime » tomberait à plat, dans ces circonstances. Ce serait « commode », cliché. Et Rey pourrait le mettre au défi : « prouve-le, romps ces fiançailles ». Un amour que l'on démontrait sur injonction de son partenaire était bancale. L'amour sur commande n'avait rien d'authentique. Ni de romantique...
Tu cherches encore une échappatoire, Rudy. Soit. Il prendrait Rey dans ses bras, lui dirait tout son amour – aussi cliché cela sonne-t-il –, et rechargerait ses batteries. Il l'attendrait toute la journée à son appartement, s'il le fallait. Par crainte d'être éconduit, Rudy avait préféré ne pas avertir son petit-ami de sa venue. De plus, il ne voulait pas que Rey l'attende sur le pied de guerre, ses boucliers levés.
Il était temps que ce jeune homme assimile qu'il n'aimerait jamais un autre. Que Coop Company© utilise leur relation à son avantage ne porterait pas préjudice à leur couple. Rudy n'avait aucune loyauté envers White Enterprise©, pour prendre cela comme une trahison. Au contraire, « sauver » la société Lee-Cooper, par tous les moyens possibles, aurait été une belle preuve d'amour. Au lieu de quoi, il s'était braqué, révolté, comme si Rey lui avait demandé de vendre son âme, de bafouer des principes nobles. Pire encore, quand les siens étaient responsables des déboires de son beau-père.
C'était douloureux de réaliser la puérilité de ses réactions sous le coup du choc et de la colère. Que savait-il vraiment du problème des Lee-Cooper ? Sur quelle base pouvait-il décréter que la promesse de Rey, faite à son père, signifiait qu'il l'abandonnait ? Son petit-ami était assez mature pour s'engager sans trahir leur amour. Il aurait dû avoir foi en Rey, mais il lui avait failli. C'était lui, le traitre.
En endossant la position d'héritier W. Ent., il espérait rétablir la situation de Coop-Com©. Cependant, c'était un beau projet dans le meilleur des mondes. La réalité n'était pas aussi simple. Parce que servir les intérêts de son homme reviendrait à trahir ceux de son père. Dean n'avait pas fui l'emprise de l'Empire Leblanc pour que son fils revête la cape de successeur de Vince.
Rudy soupira, le cœur lourd. Les choix cornéliens dans sa vie l'amenaient peu à peu à comprendre le point de vue de Junior. Parfois, ses principes agissaient comme des entraves. Ils alimentaient ses conflits internes et ses contradictions. Sans l'insistance de ses amis, il n'aurait jamais su prendre du recul, de la hauteur, pour voir les choses sous une autre perspective. Il devait de la reconnaissance à ceux qui l'élevaient en soulignant ses défauts sans détour.
Mir avait appuyé là où ça faisait mal : sa propension à imposer ses décisions à Rey. Son père avait déjà soulevé le fait qu'il ait choisi la destinée d'Heidi sans lui demander son avis. Quid de Regan, et son adhésion forcée à A.M.I.E. ? Au fond, il n'était pas si différent des siens ; des hommes et femmes capables d'instrumentaliser les leurs. Une dynastie de maîtres marionnettistes.
Mais Rey a capitulé trop facilement, aussi ! Ouais, il se cherchait encore des excuses... Assumer ses responsabilités était un acte de maturité. Il était temps de grandir.
Tout à son introspection, Rudy ne vit pas filer la route et se retrouva sans le réaliser sur le parking de la résidence où logeait Rey. La silhouette élancée d'un jeune homme, de dos, l'interpella. La Mercedes GLK contre laquelle il appuyait une épaule finit de lever le doute. Incapable de réprimer son sourire, Rudy le rejoignit à pas de velours. Effrayer le caïd T-eyes était un de ses petits plaisirs ; l'entendre glapir d'une voix stridente n'avait pas de prix. Mais son « boo » puéril ne vit jamais le jour, avorté par la teneur de la conversation téléphonique.
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HOT CHILI - saison 4 ▄ PARTIE II
Romance. Quand le rock se marie au classique, les Beat'ONE font des rencontres bénéfiques à l'évolution de leur carrière. Mais l'une d'elles semble vue d'un mauvais œil par Dean, qui pressent des complications pour son couple. ...