Chapitre 13: Ami?

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Aux pays des pleurs,

des cœurs sont des fleurs... fanées.

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Michelle

Ginger, je suis rentré. Bonne nuit James bondette.

Mes lèvres s'étirent en un sourire, mon cœur bondit dans ma poitrine. C'est bien la première fois qu'Harry m'écrit et qu'il ne s'agit pas de travail. C'est bien la première fois qu'il ne m'écrit que pour me donner des nouvelles et me souhaiter bonne nuit. Et pourtant, il est avec elle, ou il l'était. La joie minime qui avait animé mon cœur se noie de nouveau et mon cœur se serre, de la même manière que quand j'ai entendu sa voix tout à l'heure. Dès qu'il m'a quittée, il est allé la retrouver. J'ai parfois envie de crier quand je vois Harry : « Bordel, regarde-moi ».

Son indifférence me fait mal, atrocement mal parce que je ne gère déjà pas bien ce que je ressens, je n'ai d'ailleurs aucunement connaissance d'où vient tout ce flux de sentiments qui cognent mon cœur, mon pauvre petit cœur de cire. Je ne comprends pas cette attraction qui m'anime, cette attraction qui me broie les tripes, cette attraction qui me fout le tournis et me fait perdre la raison. Je ferme les yeux pour ravaler la vague d'émotions qui me submerge.

Après avoir inhalé une grosse bouffée d'air que je relâche lentement, j'éteins les lumières, jette un coup d'œil à la chambre où est couché Andrew puis vais me coucher. Andrew passe la nuit ici parce que j'ai obligé Ashley et Charly a passé la soirée ensemble, s'entraîner à faire des petits frères à Andrew et surtout se détendre. Ces deux-là ont l'air de porter une énorme tension sur les épaules, ils ont besoin de respirer. Allongée, je me mords les lèvres si fortement que je sens le goût métallique du sang sur le bout de ma langue.

Ce flot de tension, d'émotions et de désirs est plus fort que moi, je dois le dompter. Ce ne sera certainement pas tâche facile et me demandera sûrement autant de force qu'il en a fallu à Naruto pour dompter le démon renard, mais je dois le faire. Sinon Harry me fuira, me quittera, m'enterrera. Je soupire une énième fois avant de m'étirer pour déposer mon téléphone sur la table de nuit. Je fais violence sur moi pour ne pas répondre, au risque de passer pour une personne sans vie sociale, au risque de passer pour celle qui l'a dans la peau. Je noie alors mon regard dans le noir parfait de la chambre, l'obscurité qui attise mes désirs les plus sombres.

Le lendemain, je me rends chez le coach. L'avoir revu a réveillé des souvenirs en moi : certains bien trop extraordinaires, d'autres bien trop douloureux. Il a été un père pour moi à une époque où je n'avais plus de repères, à une époque où je ne savais plus qui j'étais. Une époque où mon père ne m'acceptait pas encore telle que j'étais. Plus jeune j'étais vraiment attardée parfois, dans l'extrême de toutes mes émotions, trop joyeuse, trop triste, trop volcanique, trop timide, trop Michelle.

Puis j'ai perdu ma mère alors que j'étais malade, trop brisée. Parce qu'elle m'avait abandonnée, parce que je me sentais vide, je m'étais réfugiée dans un monde à moi et le coach avait été le seul à vouloir le découvrir. J'ai perdu le coach de vue lorsque je suis rentrée au Bénin comme avec la plupart de mes connaissances américaines. Le coach est aussi béninois, mais n'y a jamais vécu. Il a été l'épaule qui a soutenu ma tête-fontaine, la voix qui m'a chantée que tout irait bien, les mains dans lesquelles j'ai glissé les miennes pour ne pas m'effondrer, le pilier du bâtiment instable que je représente.

Abdou s'est proposé pour me conduire, le trajet s'est fait en un silence qu'il n'a pas osé briser. Sans doute, à cause de l'ombre qui plane sur mes traits qui crispés. Mes idées étaient replongées dans le passé. Il m'avait de nouveau engouffrée. Dès que nous arrivons devant la demeure, je secoue ma tête pour remettre mes idées en place. « Le passé reste le passé. J'ai une belle vie. Je n'ai pas à me plaindre, m'intimé-je ».

Tentation en éditionWhere stories live. Discover now