Chapitre 1

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Les rayons dorés du soleil d'hiver se levant sur la ville, pénétrèrent dans la chambre du jeune prince Jules par les trois grandes fenêtres perçant les épais murs de pierre beige du château royal se dressant aux abords de la grande place, entre les hôtels de luxe et les bâtiments officiels.

Le prince Jules se réveillait lentement dans les draps de soie blancs de son immense lit. Le jeune homme de tout juste dix-huit ans, au beau regard vert foncé passa une main dans ses cheveux châtains, aux pointes léchées de mèches blondes pour tenter de dompter sa chevelure en bataille. Ses doigts tâtonnèrent alors sur la table nuit à la recherche de ses lunettes aux verres ronds et aux montures noires et dorées pour les poser sur son nez.

Une main frappa soudain à la porte de bois noir de la grande chambre princière.

— Entrez, s'écria Jules en s'asseyant en tailleur sur ses draps et appuya son dos contre la tête en bois massif de son lit.

La porte s'ouvrit sur Monsieur Harold, le majordome attitré du jeune prince dans le château. L'homme âgé d'une cinquantaine d'années, vêtu comme à son habitude d'un strict costume noir et blanc, c'était toujours occupé de Jules. Depuis sa naissance, Harold avait été placé au service du prince, avait été présent auprès de lui lors de voyages aux quatre coins du monde de ses parents.

— Prince Jules, vous avez de la visite de votre amie Ariana Grande, annonça-t-il de son ton hautain qui exaspérait le jeune homme depuis toujours.
— Quoi ? Ariana est ici ! s'étonna le jeune homme alors que son visage s'illuminait tel un soleil.
— Elle vous attend dans le petit salon, Votre Altesse, ajouta-t-il.
— Dites-lui que je la rejoins dans cinq minutes !
— Votre Altesse est peut-être optimiste sur le temps qu'il va prendre pour être presentable, opina-t-il en jetant un regard moralisateur le torse nu et le bas de pyjama à carreaux que portait le jeune homme.
— Vous me connaissez si bien Harold, commença-t-il avec un sourire qui dévoila ses adorables fossettes aux creux de ses joues. Il me faudra peut-être plutôt une dizaine de minutes, souffla-t-il en réfléchissant déjà aux habits qu'il allait mettre.
— Je porte votre message immédiatement, fit Monsieur Harold en s'inclina avant de refermer la porte derrière lui.

Un sourire toujours affiché sur ses lèvres, le beau prince s'extirpa de ses draps de soie et sautilla de joie jusqu'à son grand dressing. Il enfila une chemise blanche et un pantalon beige. Après s'être regardé dans le grand miroir en pied de sa chambre, il décida de retirer la chemise pour la replacer par un pull crème à col roulé. Il changea alors le pantalon pour un jean slim noir avant de finalement revenir au pantalon beige.

***

Le regard brun foncé, à la limite du noir d'Ariana Grande se posait tour à tour sur les cadres photos disposés sur les murs du petit salon du château. Tous les membres de la famille royale étaient ainsi représentés dans des photographies de familles aimantes. La chanteuse mondialement connue s'attarda sur les photos de Jules enfant, accompagnée de ses parents et de son frère Andrew. Comme tout le monde, elle avait toujours suivi les péripéties de cette famille régnante, même si elle n'avait plus véritablement de pouvoir politique depuis des dizaines d'années. Jamais elle n'aurait pensé pouvoir compter le prince Jules, dont elle avait vu les premiers pas, parmi ses plus proches amis.

La porte du petit salon s'ouvrit enfin sur Jules après une bonne demi-heure d'attente. La jeune femme, vêtu d'un pull oversize blanc et d'un slim de la même couleur, s'avança vers le jeune homme en sautillant sur ses hauts talons.

— J'ai cru que tu ne viendrais jamais ! s'écria-t-elle en serrant le prince dans ses bras.
— Désolé, la ponctualité n'a jamais été mon fort, avoua-t-il. Je suis si heureux de te voir, mais je savais pas que tu venais ! s'écria-t-il de joie.
— Eh bien, je donne un concert en ville demain soir et après j'ai deux semaines de pause avant la reprise de ma tournée européenne. Je me disais que je pouvais rester et passer un peu de temps avec toi. J'adore cette ville à l'approche de Noël, puis c'était l'occasion de se voir.
— C'est génial !

— Je dois y aller, je dois répéter pour mon show, commença-t-elle en lissant sa queue-de-cheval haute entre ses doigts. Je voulais juste te dire que j'ai privatisé le bar de mon hôtel ce soir, ça serait bien si tu pouvais venir. Il n'y aura que moi et quelques danseurs et choristes.
— J'adorais, s'écria le prince avec un grand sourire dévoilant ses belles dents blanches.
— Cool ! On se voit ce soir alors, bisous, le salua-t-elle en soufflant un baiser à Jules avant de quitter le château.

***

La bonne odeur provenant des cuisines du château emplit les narines du Prince Jules lorsqu'il entra la salle à manger. Sa mère Anna, l'héritière de la couronne et son père Léon étaient déjà assis autour de la longue table se dressant au centre de la pièce richement meublée.

Le couple avait une cinquantaine d'années, ils avaient toujours essayé d'élever Jules et son grand frère comme des enfants normaux, malgré le titre que leur conféraient leurs naissances. Parfois cela avait été dur, notamment avec les nombreux voyages officiels qui les éloignaient de leurs enfants durant des jours et parfois même des semaines.

— Si vous êtes près, nous allons commencer à servir le repas, entonna Harold.
— Très bien Harold, répondit Anna de sa voix douce.
— On attend pas grand-mère ? demanda Jules étonné.
— Non, elle mangera dans son bureau, en tant que Reine, elle a beaucoup de travail, tu le sais, lui répondit son père.
— D'accord, souffla-t-il déçu, lui qui était très proche de son ancêtre.

Alors que les domestiques plaçaient les entrées devant les membres de la famille royale, Anna posa son regard enjoué sur son fils.

— Il paraît que tu as reçu la visite d'une jeune femme ce matin... fit la voix rieuse de sa mère.
— Oui, c'était Ariana. Elle est de passage en ville, elle m'a invité à aller la voir à son hôtel ce soir, répondit-il en plantant sa fourchette dans son plat.
— Tu as l'air proche de cette Ariana... continua Léon, la voix pleine de sous-entendus plus qu'évidents.
— C'est juste une amie, lança Jules lassé de toutes ces allusions.
— Tu sais que si c'est parce qu'elle est chanteuse, ça ne nous pause pas de problème. Et le peuple a très bien accepté que ton oncle se marie avec une actrice, alors une chanteuse ne devrait les déranger beaucoup plus, ajouta Anna un large sourire aux lèvres.

Jules préféra ne pas répondre, se contentant de lever les yeux aux ciels. De toute façon, quoi qu'il pouvait dire, cela ne changerait rien.

***

La journée se finissait sur la ville. Jules retourna dans sa chambre, affichant un large sourire sur ses lèvres. Il s'avança lentement vers la grande fenêtre, derrière laquelle tombaient de nombreux flocons de neige sur la grande place illuminée. Son visage, habituellement souriant et solaire s'assombrit soudain. Il tourna son regard vers un portrait de sa mère, posé sur sa table de nuit.

— Comment pourrais-je vous dire que ce que vous attendez de moi n'arrivera jamais, comment pourrais-je vous dire que je ne suis pas celui que voulez que je sois... souffla-t-il tout bas, couvrant de ses yeux verts le si doux visage de sa mère. Je n'en peux plus de faire semblant, de prétendre que cela va arriver... mais comment parler de quelque chose que l'on ne comprend pas soi-même. J'aimerais pouvoir te le dire, maman, j'aimerais pouvoir t'expliquer, mais je ne sais même pas moi-même ce que je ressens au fond de moi, murmura-t-il une larme perlant aux coins de ses yeux.

Les rayons clairs du soleil couchant, perçant à peine les épais nuages se reflétaient dans le regard triste de Jules. Ses lèvres s'ouvrirent et laissèrent un chant de sa voix mélodieuse s'échapper de sa bouche.

🎶 The sun is setting
And nobody is by my side
I hear them laughing
But I'm not in the mood tonight
Every day, every night
I feel like I'm lying to my heart... 🎶

(Ariana Grande - Moonligth)

The Gay PrinceWhere stories live. Discover now