Chapitre 8

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La porte de la chambre de Jules claqua derrière son passage. Il se laissa tomber sur son lit encore tout habillé, s'en voulant d'avoir posé un lapin à Sanjay, de lui avoir proposé un rendez-vous et ne pas y être allé, sans lui donner la moindre explication. Il culpabilisait, mais malgré ses efforts, il n'avait pas réussi à vaincre sa peur et à passer les grilles du parc. Son regard s'échappa par l'une des grandes fenêtres de sa chambre, le soleil se cachait déjà au loin, incendiant l'horizon de ses rayons rougeoyants.

🎶 The sun is setting
But you're not, here my side
If only I was not running
But I couldn't beat my fear tonight
Every day, every night
I hope to stop lying to my heart... 🎶

(Ariana Grande - Moonligth)

Entonna-t-il tout bas. 

Ses yeux se refermaient lorsque quelqu'un frappa à la porte.

— Monsieur Jules, puis-je entrer ? fit la voix d'Harold, son fidèle majordome.
— Bien sûr, répondit-il tout bas sans prendre la peine de se lever de son lit.
— Monsieur Jules, reprit le majordome après avoir refermé la porte derrière lui. J'ai remarqué que depuis quelque temps, vous n'êtes pas très en forme, je me trompe ?

Le jeune prince se contenta d'un mouvement de la tête pour confirmer la pensée de l'homme de maison.

— Écoutez, vous avez des parents qui vous aiment plus que tout au monde, vous avez une grand-mère qui vous chéri plus que n'importe qui et des amis fidèles. Vous n'avez aucune crainte à avoir à leur dire ce qui fait véritablement battre votre cœur.

Jules, le regard scintillant derrière les verres de ses lunettes, se redressa sur son lit.
— Vous... vous êtes au courant ? souffla-t-il sans parvenir à comprendre comment il savait ce que lui-même avait ignoré si longtemps.
— Jules, je m'occupe de toi depuis ta naissance, je sais lire en toi comme dans un livre ouvert, répondit-il en le tutoyant pour la première fois de sa vie.
— Je sais pas si ça doit me rassurer, chuchota Jules avec un rire nerveux.
— En tout cas monsieur Jules, continua-t-il en s'asseyant au pied du lit. Sachez que, qui que vous aimiez, cela ne fait pas moins de vous, le petit garçon solaire et curieux que j'ai vu grandir. Je suis sûr que vos parents penseront la même chose que moi.
— J'ai tellement peur qu'ils me rejettent pour ce que je suis... souffla Jules les yeux baissés
— Il est toujours difficile d'être sûr, mais s'ils ne vous aiment pas comme vous êtes, généreux, souriant, cultivé et tant d'autres qualités, alors ils ne méritent pas de vous avoir dans leurs vies.
— Harold, je ne saurais jamais comment vous remercier suffisamment, chuchota-t-il quelques perles salées roulant sur ses joues.
— Si vous commenciez par ne plus me reprocher mon accent, ce serait déjà bien pour moi.

Enfin un sourire, un sourire rieur et sincère illumina le visage du jeune prince.
— Harold, pouvez-vous réunir ma famille dans le petit salon, il est temps que je leur parle !
— Tout de suite Majesté, répondit-il avec un sourire en disparaissant derrière la porte.

***

Le tintement de la cloche de la librairie résonna dans la petite boutique sur le passage de Sanjay. Le visage de Margaret, se tenant derrière le comptoir se leva vers le jeune homme.

— Tu es déjà rentré ? s'étonna-t-elle en posant ses lunettes sur son nez pour regarder le cadran de sa montre.

Viraj, le père de Sanjay, un homme âgé d'une cinquantaine d'années, qui arborait une chevelure grise tombant sur sa nuque et portait un Anand banc à l'encolure brodée de dentelle dorée, arrêta de ranger ses dernières trouvailles sur les étagères déjà bien remplies. Il s'approcha de sa femme pour écouter ce qu'allait dire son fils.

— Euh... oui. Enfaîte, il n'est pas venue... dit-il d'une petite voix témoignant de sa déception.
— Comment ça ! Pour qui il se prend celui-là pour poser un lapin à mon fils ? intervint l'homme d'une voix grave et théâtrale.
— Papa, lança-t-il avec un sourire amusé. Il se prend pour celui qu'il est, j'aurais dû me douter qu'il ne viendrait pas.
— Pourquoi ? C'est quelqu'un de connu ? demanda Margaret.
— Très connu et important, mais je peux pas vous en dire plus.
— Et pourquoi ça ? On est tes parents ! tonna Viraj.
— Non, c'est trop tôt, puis de toute façon je ne le reverrai certainement jamais !
— Comme tu veux mon fils. Puisque tu as la soirée de libre, tu vas m'aider à ranger mes nouvelles acquisitions, tu verras, j'ai trouvé de vraies merveilles.
— Si seulement il y avait des gens pour les acheter... souffla-t-il tout bas en le suivant jusqu'à la remise.

***

La porte du petit salon royal s'ouvrit sur Jules. Installés sur les canapés moelleux face à lui, Léon son père, Anna sa mère, Victoria sa grand-mère ainsi que son frère Andrew et sa fiancée Joséphine l'attendaient avec impatience.

Son grand frère était un jeune homme de vingt-cinq ans, aux cheveux bruns courts et aux yeux noisette. Joséphine, elle était une belle jeune femme plus jeune de quelques années, à la peau noire et à la longue chevelure ondulée tombant en cascade sur ses épaules. Le jeune couple n'habitait plus dans le palais, mais lorsque Harold leur avait demandé de venir pour écouter Jules, ils n'avaient pas hésité une seule seconde.

— Jules, tu es là ! s'exclama Anna en posant un regard rieur sur son fils.
— Ce n'était pas la peine d'en faire autant pour nous annoncer que tu fréquentes cette chanteuse, on t'a déjà dit que ça ne nous posait aucun problème, ajouta Léon.
— C'est vrai et elle a toujours été charmante lorsqu'elle est venu au château, ajouta Anna.
— De quoi vous parlez ? Je ne sors pas du tout avec Ariana ! s'exclama Jules, la voix pleine d'incompréhension.
— Vraiment ? Pourtant c'est à la Une de tous les magazines people, regarde, lui fit son père en lui tendant l'un d'eux.

Le regard vert du prince se posa sur la couverture, une photo de lui et Ariana se tenant par le bras devant le musée d'art contemporain. Il feuilleta les pages intérieurs, une autre photo le montrait entrant dans l'hôtel de son amie avec comme commentaire « Le prince Jules tombe sous le charme de la chanteuse Ariana Grande »

— C'est n'importe quoi ! On se tenait comme ça parce qu'il faisait hyper froid ce jour-là, mais on est absolument pas en couple, s'écria Jules en jetant le magazine au sol.
— Dans ce cas, qu'est-ce que tu voulais nous annoncer ? demanda Andrew.
— Je... je voulais vous dire que... commença-t-il en bafouillant, les yeux humides tournés vers le sol. Je n'en peux plus de vous cacher cela, de me le cacher à moi-même... continua-t-il joignant ses mains tremblantes. Si je n'ai jamais eu de petites amies, malgré toutes vos remarques, tous vos sous-entendus c'est... c'est parce que je n'aime pas les filles, je... je suis gay, révéla-t-il en levant ses grands yeux vert inondés de larmes vers sa famille.

The Gay PrinceWhere stories live. Discover now