The Gay Prince

Chapitre 12

La lune tout entière, trônait dans le ciel étoilé, inondant de ses rayons argentés la vaste étendue sauvage et enneigée qu'était parc. La douce lumière de l'astre nocturne se reflétait sur la surface immaculée de la patinoire qui se profilait au milieu des arbres.

Jules, ensevelis sous d'épaisses couches de vêtements chauds, attendait déjà assit sur l'un des bancs qui entouraient le lac de glace. Il n'en pouvait plus de tournée en rond dans sa chambre et avait préféré se rendre à la patinoire en avance. Sous son regard vert, la silhouette de Sanjay apparaissait au loin, sortant de l'obscurité des arbres pour rejoindre la lumière immaculée de la lune et les lueurs bleutées des guirlandes électriques qui couraient sur les branches des arbres et tout autour de la glace.

— Tu es déjà là ? lui lança la voix de Sanjay, le crâne recouvert d'un bonnet de laine noire.
— Je voulais être sûr de ne pas être en retard, souffla Jules la mine triste.
— Tout va bien ? s'enquit le jeune libraire en s'asseyant sur le banc à ses côtés et posant sa main sur l'épaule du prince.
— Mon père est parti sans même me prévenir, il ne m'a pas adressé la parole depuis que... ne put terminer le jeune homme.
— Je suis désolé, compatit Sanjay. Si tu ne te sens pas bien, on peut remettre notre rendez-vous à un autre jour.
— Non ! Surtout pas, j'ai besoin de penser à autre chose et je me sens bien avec toi. C'est comme si le temps d'un instant plus rien n'existe autour de nous deux, je me sens véritablement moi-même et non le prince qui doit toujours être parfait et lisse.
— Plus je te connais et plus je t'admire, tu es plus courage qu'il n'y paraît, souffla Sanjay.

Sous la lumière bleutée des guirlandes électriques décorant les arbres, le jeune libraire s'approcha encore un peu plus de Jules. Il plongea son regard sombre dans les yeux verts du jeune homme aux cheveux châtains méchés d'or.

— Tu m'as promis que tu m'apprendrais à faire du patin à glace, souffla Sanjay dans un sourire.

Le visage de Jules s'éclaira soudain de la lumière solaire de son sourire, faisant apparaître ses deux fossettes aux creux de ses joues. Il replaça ses lunettes sur son nez et releva son regard vers le visage de Sanjay.

— Oui bien sûr, répondit-il en se mordant les lèvres.

Le jeune prince enfila ses patins et s'avança vers la patinoire. Jules s'élança sur la glace et se laissa glisser jusqu'à l'autre côté de la patinoire malgré ses jambes peu assuré. Il se tourna vers Sanjay et l'encouragea à le rejoindre.

— Tu es sûr que je vais pas me faire mal ! lui demanda le libraire avant de se lancer sur la glace.
— Mais non, tu risque rien ! lui répondit-il. Attends-moi, je viens t'aider.

Jules entamait son retour vers l'entrée de la patinoire, lorsque son équilibre l'abandonna et le fit tomber sur le sol.

— Je risque rien, t'es sûr ! s'écria Sanjay hilare se tenant immobile juste à la limite entre la terre et la glace.
— Bon, ça fait peut-être quelques années que j'ai pas patiné, rigola Jules en essayant de se relever tant bien que mal, mais retombant à chaque fois sur la glace.
— Tu voulais m'apprendre, mais si tu sais pas faire toi-même, on va jamais y arriver, lança-t-il entre deux éclats de rire.
— Je pensais que tu saurais patiner, j'avais pas prévu que t'ai vraiment besoin que je t'apprenne.
— Ah donc tu m'as menti pour que je vienne ! s'exclama le jeune homme d'origine indienne. Tu me déçois beaucoup ! plaisantait-il.

Sanjay se tourna et prit une poignée de neige recouvrant la rambarde de pierre entourant la patinoire. Il forma une boule dans sa main et la projeta sur le jeune homme. La boule de neige explosa dans une pluie de cristaux glacés et immaculés sur l'épaule de Jules. Il perdit l'équilibre un instant, mais parvint tout de même à se retenir de tomber à nouveau en écartant les bras.

— T'as osé faire ça, s'écria-t-il le regard revanchard. Tu vas me le payer !
— Faudrait déjà que t'arrive à revenir sur la terre ferme ! lui répondit Sanjay en lui jetant une seconde boule de neige en plein torse.
— Tu vas voir si j'arrive pas à revenir, menaça-t-il.

Jules s'élança à toute vitesse sur la glace, malgré le faible équilibre dont il faisait preuve. Il parvint à rejoindre la rambarde de la patinoire alors que Sanjay remettait ses chaussures sur le banc. Il prit un tas de neige dans ses mains et le jeta sur le jeune homme.

— Eh, t'as pas le droit ! J'étais pas prêt, hurla-t-il après avoir reçu la boule de neige en pleine tête.
— Moi non plus j'étais pas prêt, mais ça t'as pas empêché, répondit-il en riant. Bon, on est quitte maintenant, laisse-moi enlever ses trucs !

Jules se laissa tomber sur le banc et retira ses patins tout en gardant un oeil sur Sanjay, qui se tenait debout quelques mètres devant lui. Le beau libraire se baissa soudain, il forma une boule dans ses mains et se tourna vers le prince.

— Non, ne fais pas ça, je suis pas prêt ! s'écria Jules en refaisant les lacets de ses sneakers Nike, le plus vite possible.
— Détends-toi ! Je vais pas te la lancer dessus, répondit-il en jetant la boule de neige plusieurs centimètres au-dessus de la tête du jeune homme.
— Tu m'as complètement raté ! jubila Jules.
— Mais je t'ai dit que c'était pas toi que je visais.

Le jeune prince découvrit alors quelques petits flocons tombants sur sa veste.
— Il neige ! s'exclama-t-il en se redressant.

Il remarqua alors que le ciel nocturne était dépourvu du moindre nuage. Il se leva les yeux au-dessus de sa tête et tout à coup, la neige accumulée sur les branches de l'arbre qui surplombait le banc, se déversa sur lui.

— T'as fait exprès ! hurla-t-il recouvert de neige de la tête aux pieds. Tu vas me le payer !

Jules se leva du banc et jeta boule sur boule de neige sur Sanjay. Le jeune libraire recevait les projectiles en rigolant, avant se laisser tomber à genoux dans la neige, lui implorant d'arrêter.

— Je suis trempé et j'ai trop froid à cause de toi ! s'écria le prince.
— Désolé, j'ai pas pu m'en empêcher, s'excusa-t-il

Sous la lumière argentés de la lune, leurs deux visages s'approchèrent l'un vers l'autre, irrémédiablement attiré comme deux aimants. Leurs lèvres s'appelaient, cherchaient à s'effleurer, à se toucher, à se mêler.

Cette fois, Jules se laissa aller à la passion qui le dévorait depuis l'instant même où il avait posé son regard sur Sanjay. Il ne pouvait plus résister et ne le voulait pas. Leurs lèvres se rencontrèrent enfin dans une explosion euphorique. Leurs bouches s'entrouvrirent, leurs langues dansèrent un ballet passionné. Les doigts de Sanjay s'enfouir dans la chevelure de Jules tandis que les mains du prince se glissèrent sur l'épaisse veste recouvrant le corps athlétique du libraire.

Le temps s'était comme arrêté sur eux, un instant de bonheur, de plenitude à jamais gravé dans leurs mémoires.

— Tu veux qu'on aille chez moi pour sécher tes vêtements ? souffla Sanjay tout bas. C'est pas un palais, mais c'est pas loin et j'ai des Oreo !
— Si t'as des Oreo, comment je pourrais refuser, répondit Jules.
— Tu sais pas ce que c'est, n'est-ce pas ? fit-il en le prenant par le bras.
— Aucune idée, ria-t-il.

***

Les deux jeunes amoureux quittaient lentement le parc Aaron King. Sautant de l'arbre dans lequel il était perché, Hubert Lork regardait avec délectation les nombreuses photos qu'il avait prises, avant de s'élancer à leur suite.