MOOD| t i m o t h y

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ce petit passage ne sert à rien
( ou presque )
c'est juste pour vous annoncer le mood
donc vous n'êtes pas obligés de lire cette partie pour comprendre l'histoire

ce petit passage ne sert à rien ( ou presque )c'est juste pour vous annoncer le mood donc vous n'êtes pas obligés de lire cette partie pour comprendre l'histoire↯

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HIVER 1996

TIMOTHY PASSAIT POUR MORT. Assis au fond d'une vieille Peugeot 104 aux sièges esquintés, le garçon observait d'un air désincarné, ses genoux grêles s'entrechoquer à chaque secousse du véhicule, pendant que le monsieur —une cigarette en bouche— conduisait. La dame, quant à elle, jetait de temps en temps des regards attendris au petit garçon de neuf ans depuis le rétroviseur, et esquissait quelques sourires gras. Elle lui trouvait de mignons attraits, comme son nez retroussé, ses joues potelées rosées, sans oublier ses cheveux bruns doucement ébouriffés. Et puis il paraissait si sage, son sac serré contre sa poitrine, comme s'il se noyait et qu'il se raccrochait à une bouée.

D'une certaine façon, Timothy se noyait. Il avait la sensation d'étouffer dans sa propre angoisse. Celle de s'être retrouvé dans une Peugeot crasseuse en compagnie de deux inconnus: un homme intimidant aux yeux grands ouverts comme une chouette et une femme plus rachitique. Pour ne rien arranger, le siège râpeux sur lequel le garçon se tortillait semblait l'engloutir comme des sables mouvants, et il était aussi à peu près persuadé que la fumée nauséabonde de la cigarette de l'homme cherchait à l'avaler.

En réponse, Timothy enfouit sa tête dans son sac, comme si cela pouvait dissiper ses appréhensions vaporeuses. Il sentit l'anneau de sa fermeture éclair frapper contre son crâne, mais ignora la douleur pour se concentrer sur l'odeur de papier journal humide qui émanait de son cartable.

On est bientôt arrivés, annonça la dame d'une voix mielleuse.

Timothy l'ignora. Pas par dédain mais plus qu'il ne comprenait pas vraiment ce qu'elle lui racontait. Alors il patienta, longuement, presque une éternité avant qu'enfin, le monsieur actionne le frein en main. La voiture s'était si brusquement arrêtée que Timothy avait failli se prendre le dossier dans le nez.

Voici ton nouveau chez-toi! s'enthousiasma la dame, "home sweet home", comme on dit.

Home sweet home, répéta Timothy dans son esprit. Puis il fronça les sourcils, indigné. Non, cette maison en briques, ce n'était pas chez lui. Il ne reconnaissait pas le moins du monde cette porte aux motifs marbrés, et encore moins ces jardinières aux plantes desséchées, semblables à des sculptures métalliques. Timothy en était convaincu. Il habitait à l'orphelinat, pas chez ces parfaits inconnus.

On est ta nouvelle famille, sourit la dame.

Elle tendit sa main pour que le garçon l'attrape. Timothy la toisa sans broncher, et se cramponna davantage à son sac à dos. Il devait partir.

Tu viens? insista la dame.

Mais le petit brun demeurait figé. Ses pupilles tremblantes étaient empreintes d'une peur incurable. Elles vibraient comme deux écussons ambrés piégés entre deux paupières opalines écarquillées. Perdant patience, le monsieur écarta sa femme du passage, d'un coup d'épaule énergétique, et empoigna le bras de Timothy pour le tirer hors de la Peugeot. Pris de panique, celui-ci se débattit, et poussa des gémissements de terreur.

Arrête Christophe, tu lui fais peur!

L'angoisse de Timothy dédoubla, il tentait par tous les moyens de se raccrocher aux sièges. Le garçon frissonna lorsqu'il sentit son sang se glacer, comme si un fluide froid serpentait ses veines. La radio grésillante de la voiture s'éveilla aussitôt, mais le monsieur n'y prêta pas vraiment attention, trop occupé à tirer le bras frêle de Timothy.

Outch! s'exclama-t-il.

Ce que Timothy ne savait pas, c'était que le monsieur venait de se recevoir une vilaine décharge électrique et le garçon n'y était pas pour rien. Malheureusement, cela n'eut pour effet que d'exhorter sa colère.

Bon maintenant tu viens! hurla l'homme.

Il se jeta aussitôt dans la voiture, tandis que sa femme, les traits tirés, tentait de le contenir.

Timothy cria à son tour, et se réfugia en vitesse sous la banquette, le sac coincé entre les genoux. Son sang battait de plus en plus fort dans ses veines, il pouvait presque entendre son cœur frapper contre sa poitrine, galvanisé par une énergie gargantuesque. Elle coulait à flot entre le moindre de ses organes, et irriguait dans tout son corps une sorte de liquide glacé. L'homme tenta à nouveau d'attraper Timothy. Cependant, pendant une fraction de seconde, un fin halo d'étincelles sembla auréoler le jeune garçon, avant d'éclater en une raie éblouissante de lumière, qui propulsa l'homme sur une dizaine de mètres.

Oh mon dieu! s'écria la dame.

Elle porta ses mains à la bouche et jeta un regard horrifié à Timothy.
Le garçon, terrorisé, ouvrit discrètement la portière, et alors que la femme se précipitait sur le corps fumant de son mari, il dévala —aussi vite que ses petites jambes lui permettaient— les rues parisiennes enneigées.

Par où était l'orphelinat? À gauche? À droite? Timothy n'en avait pas la moindre idée. Des flocons se déposaient progressivement sur sa tignasse brune alors qu'il poursuivait sa course effrénée.

Il n'était pas spécialement rapide,
et pourtant,
Timothy avait l'impression d'être un éclair,
à serpenter les ruelles sans jamais s'arrêter.

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SÉLÉNITE ━ original storyWhere stories live. Discover now