Une once de tristesse dans ses yeux (Terminé)

Chapitre 22 : Peter

- Quel bande de connards, soupire Morgan en secouant la tête.

- Et encore, si Lucas ne m'avait pas retenu, je serai allé leur casser la gueule.

Will a refusé de venir avec nous. Il est resté seul. Après manger, nous sommes allés avec Lucas à la librairie.

Je ne sais plus quoi faire. Je sens bien qu'en ce moment il n'est pas bien du tout, et que ce n'est pas bon pour lui de rester seul, mais qui suis-je pour juger et aller le retenir ? Il y a une époque où moi aussi je restais seul, et refusais la moindre occasion de rester avec quelqu'un.

Soudain, la clochette retentit et Will rentre. Il se fige en nous apercevant et fait demi-tour.

- Tu devrais aller lui parler, signe Lucas.

- Pourquoi moi ?

- Parce que vous êtes proches.

- Pas plus que toi avec lui.

Il hausse un sourcil. Je n'aime pas la façon dont il signe et son sourire significatif.

- Va te faire foutre, je réponds avant de sortir de la librairie.

Je regarde autour de moi à sa recherche. Deux gamins se font disputer par une grande femme, un vieil homme qui marche lentement avec une canne et une femme d'une trentaine d'années fume une cigarette. Mais aucun signe d'un garçon de mon âge aux cheveux blonds et qui porte un vieux sweat à capuche.

Je parcours quelques mètres et m'apprête à re rentrer dans la librairie quand je l'aperçois.

Arrêté devant une vitrine d'un magasin de tatouage, il regarde à l'intérieur. Je le rejoins et lui tapote l'épaule.

- Tu devrais t'en faire un.

- J'oserai pas. L'aiguille doit faire mal.

- Si tu penses qu'à la peur, alors tu n'avanceras pas dans la vie.

Il hausse les épaules. 

- Qui te dis que j'ai envie d'avancer dans la vie ?

- Dis pas de conneries.

- C'est pas des conneries.

Il commence à m'énerver. Je sais que ce qu'il vit n'est pas facile, mais tout le monde a des problèmes, et il ne pense qu'à se plaindre et refuse d'essayer de passer à autre chose. Ca fait presque une semaine maintenant.

- Si tu arrêtais de dramatiser, tu t'en sortirai mieux.

- Pardon ? 

- Tu n'arrêtes pas de faire la gueule, mais nous on y est pour rien. Tu refuses de nous dire ce qui s'est passé, d'accord, ça te concerne. Mais arrête de vouloir être seul et de faire la gueule, parce que nous, avec Lucas, on a rien fait.

- C'est toi qui dis ça ? Alors que toi, dés que tu vois ton portable, tu fais la gueule. C'est pas toi qui y étais. 

- Tu n'en sais rien sur mon portable ! je m'écrie, énervé.

- Et toi tu ne sais pas ce que ça fait de voir ton père se noyer dans l'alcool chaque jour ! De devoir nettoyer sa merde, de prétendre que tout va bien alors que tu es seul !

- Parce que tu crois que quand mon père me battait, je me sentais pas seul peut-être ! Et de voir ta mère complètement dépressive devenir de moins en moins humain !

Je suis devenu tout rouge. Lui aussi.

- Tu n'es pas seul, et si tu arrêtais de te comporter comme ça tu le saurai !

- Va te faire foutre Peter. Va te faire foutre toi et ton pote ! Allez tous vous faire foutre !

- Tu sais quoi ? Je suis bien content que ces cons de Dave et Mark te harcèlent. Peut-être que tu finiras par te rendre compte que tu te comporte comme un sale gosse pourri gâté.

Et je fais demi-tour, furieux.