Partie 12✒

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Je suis assise sur les cailloux, adossée contre le mur de la maison. Le soleil commence à descendre de la ligne d'horizon lentement.
Après la dispute de tout à l'heure entre mes parents et Bastien, j'avais besoin de sortir un peu.

Le but était que je m'aére l'esprit mais je ne pense qu'à une chose : la fusillade à laquelle j'ai assistée quelques heures plus tôt avec mon frère. Les images défilent dans ma tête. Le bruit sourd des fusils, les corps qui tombent simultanément. Et tout ce sang. Je repense à l'horreur sur tous les visages, cette incompréhension que nous partageons tous.

Je suis encore dans mes pensées quand une main se pose sur mon épaule. Je me retourne brusquement. C'est James.

- James... tu ne devrais pas rester là. Si quelqu'un passe devant chez nous... Il pourra te dénoncer et...

- Ne t'inquiète pas, je fais attention, me répond-il sûr de lui.

- D'accord.
Un grand silence s'en suit. Après plusieurs longues minutes, James décide de parler.

- Tu es allée en ville cet après-midi n'est-ce pas ?

- Oui... Comment tu le sais ?

- Bastien m'en a parler. Il m'a dit qu'il t'a emmené à la fusillade. Mais il est désolé tu sais. Il voulais juste retrouver vos parents. Il ne savais pas...

- Je sais... ce n'est pas grave. Il ne pouvais pas s'en douter.

- Tu as vraiment tout vu ? Me demande James.

- Oui, tout. C'était horrible. Je n'avais jamais assister à quelque chose comme ça. Pourquoi ils ont fait ça ?! Ils étaient innocents ! Je connais Mr. Thibault, et Mr. Lebeau aussi, je sais qu' ils n'ont rien fait ! Je me met à pleurer. De tristesse ou de colère. Je ne sais pas. Peut être les deux en même temps...
Ces hommes et ces femmes sont morts pour rien, parce qu'ils sont français sans doute, et que les allemands n'aiment pas les français. Surtout en ce moment pendant la guerre.

James passe un bras autour des mes épaules.
- Tu sais les Allemands sont horribles, c'est comme ça depuis longtemps. Tes parents ou tes grands-parents t'ont peut être raconter la grande guerre ? Ce n'est pas nouveau...
Mais je suis sûr qu'on va encore une fois, la gagner cette guerre. Je te le promet ok ?

Je souris en essayant de m'imaginer la victoire. Il y aura une fête en ville, sans doute organisée par Mme Lebeau. On mangera du gâteau et on dansera toute la nuit sous la lumière des lampadaires.
Je m'endors soulagée d'avoir pu parler avec quelqu'un qui me comprend.
...

J'ouvre les yeux éblouie par les rayons du soleil. James est parti. Mais il a laissé sa veste sur moi, pour ne pas que j'attrape froid.
Je me redresse et cours dans la cuisine me chercher à manger. Je n'ai rien avalé depuis hier midi.
Je dis bonjour à mes parents et à James, lui rendant sa veste par la même occasion.

J'ouvre plusieurs placards sans rien y trouver. Je finis par trouver un reste de pain et un peu de beurre.
Après avoir manger ma tartine, je vais dans ma chambre enfiler une robe.
Il y a un bazard immense autour de moi : des vêtements traînent par terre, mes cahiers sont empilés partout sur mon bureau et même au sol. Je me décide à ranger tout ça. Je passe même le balai. Mes parents vont être fiers de moi.

Au moment où je replace mes affaires dans l'armoire, je prévois des bruits dans la cour. J'entend aussi des voix d'hommes.
Je me précipite à la fenêtre de ma chambre pour voir ce qu'il se passe.

Deux voitures allemandes viennent de se garer dans notre cour. Plusieurs soldats en sortent, je ne sais pas trop combien ils sont, je suis trop préoccupée pour les compter. En plus de leurs armes, ils tiennent de gros sac en tissus.
J'aperçois mon père s'approcher d'eux avant que je me précipite dans le couloir pour prévenir James.

Je frappe à la porte de la chambre d'ami et entre avant même que James me le demande. Je suis tellement stressée de ce qui va se passer ensuite que je failli trébucher sur le parquet.

- James ! Les allemands sont là ! Va vite te cacher !

- Ho... heu ok j'y vais.
Il semble paniqué lui aussi. Mais il se dépêche d'ouvrir la fenêtre et se glisse de l'autre côté. Je le regarde accéder au dessus de la fenêtre, sur la continuité du toit.

- Reste la jusqu'à ce que je vienne ouvrir la fenêtre ok ?

Je referme la fenêtre et retourne dans ma chambre. Les allemands sont toujours là et semblent mener une discussion mouvementée avec mes parents. Je préviens Bastien des événements et nous allons les rejoindre dans la coure.

- Vous n'avez pas le droit ! Lance mon père.

- Oui ! Vous êtes déjà venus deux fois cette semaine ! C'est n'importe quoi, peste ma mère.

- Nous avoir le droit ! Nous sommes supérieur à vous français, repond un soldat allemand.
Un autre allemand présente à mon père ce qui semble être une lettre.

- Regardez ça, nous avoir le droit de prendre nourriture chez vous, lui dit-il.

Mon père lui arrache la lettre des mains et la regarde attentivement.

- Vous vous foutez de nous ?! C'est écrit en allemands bordel !

- Parce que nous être allemands, repond un soldat en donnant une tape amicale sur l'épaule de deux autres.

Ils sont cinq. Cinq pourritures d'allemands venus nous voler de la nourriture que nous n'avons même pas.
Face à cette impasse dans laquelle sont mes parents, mon frère décide, lui aussi de s'opposer aux allemands. Après tout, nous sommes résistants.

- Vous allez faire quoi ? Nous prendre la poussière de nos placards ? On a plus rien ok ? Alors dégagez de chez nous c'est clair !

Un des soldats, le plus grand et le plus âgé aussi se place juste devant lui, leur visage ne sont plus qu'à quelques centimètres l'un de l'autre.

- À quoi joues-tu gamin ?
Celui-ci parle très bien français, contrairement aux autres qui l'accompagne.
Il lance à mon frère un regard de défi.

- Je ne joue pas. Juste vous allez dégagez vos salles gueules de chez moi avant que ce soit moi qui le fasse ! Sans que personne ne puisse s'y attendre, Bastien crache au visage du soldat.

Ma mère pleure dans mes bras de mon père tandis qu'il m'ordonne de rentrer à la maison.

Je rentre dans la cuisine. L'allemand ne bouge toujours pas, choqué de ce qu'il vient de se passer. Bastien commence à tourner les talons mais il est rattrapé par un autre allemand qui le plaque violement au sol.
Je ne peux me retenir de pousser un cri d'effroi.
L'allemand attache les mains de mon frère et le relève.
Il l'emmène ensuite en direction des voitures. Ils vont tuer Bastien ! Ils vont le tuer !

Je me précipite sur eux et retiens mon frère par le bras.
- Non Bastien ! Pourquoi tu as fais ça ? Ils vont te tuer bon sang !

- Ela... parfois on a pas d'autres choix que de se défendre. Surtout face à des bouffons dit-il en lançant un regard meurtrier aux soldats.

- Mais je ne veux pas que tu parte ! Dis-je en pleurant.

- Je te promet que je reviendrai, me dit-il en s'approchant de moi. Je me serre contre lui et il m'embrasse la joue.

Je n'ai pas le temps de réagir que les voitures allemandes s'éloignent déjà dans le chemin. C'est sûr, je ne reverrai plus jamais Bastien... Il va être fusillé comme on a pu le voir hier.

𝙐𝙣 𝙖𝙢𝙤𝙪𝙧 𝙚𝙣𝙣𝙚𝙢𝙞                             { TERMINÉ  }Kde žijí příběhy. Začni objevovat