Partie 27✒

1K 48 0
                                    

Je me lève tôt aujourd'hui. C'est un jour d'école mais je suis particulièrement stressée. Un boule me pèse dans la gorge et le ventre. Je vais voir Jack et je devrais tout lui dire.

Sur le chemin, Bastien m'accompagne jusqu'à l'école.

- T'oublies pas ce que je t'ai dit hein ?

- Non, je n'oublierai pas...

- Tu lui dit que tu préfères que vous restiez amis. Et que ça n'ira pas plus loin.

- Oui.

Arrivés devant le portail, nous nous arrêtons et Bastien m'embrasse avant que nous nous quittions. Plus le moment approche, plus je stress. J'ai déjà tout prévu à l'avance. J'y ai passé la moitié de la nuit à y penser. Je vais tout lui dire en classe, comme ça personne ne pourra nous entendre avec tout le bruit du début de cours.

J'entre dans la cour de l'école et lance un dernier regard inquiet à Bastien, qui a déjà tourné les talons. Jack n'est pas encore là. Je m'assoie donc sur un banc en attendant la sonnerie. J'aperçois au loin Hanna et tout son groupe d'amis. Elle me regarde de temps en temps mais n'a pas l'air de se préoccuper de ma présence.

Le bruit sourd de la cloche retentit et tous les élèves se mettent à courir en rang par deux devant la porte de la classe. Je suis la dernière du rang et je regarde sans cesse derrière moi le portail où va peut être apparaître Jack d'un instant à l'autre. Mais rien. Il n'est toujours pas là.

Alors nous entrons dans la classe, accueillis par Mme Pourgault, la nouvelle institutrice que je n'ai eu qu'une seule fois. Tout le monde s'installe à sa place mais à côté de moi, il n'y a personne.

Au bout que quelques longues minutes sur les rois de France qui se battaient tous les trois, quatre matins, on frappe à la porte. Je retiens ma respiration, espérant encore que ça puisse être Jack. C'est bien lui. Il entre dans la pièce alors que vingt-deux pairs d'yeux sont tournés vers lui.

- Où étais-tu Jack ? Questionne Mme Pourgault.

- Chez moi, répond Jack avec un sourire malicieux.

Toute la classe se met à rire, sauf moi. Je suis bien trop angoissée pour rire aux bêtises de Jack.

- Ne commence pas à me faire perdre mon temps, Jack. Je suis patiente, mais il y a des limites, continue l'institutrice.

Jack ne répond pas. Il se contente de poser ses affaires sur ma table voisine. Je vois bien qu'il me lance des regards furtifs de temps en temps, mais je ne veux pas les croiser. Quand Jack s'assoie enfin et que Mme Pourgault se retourne vers son tableau, je joins mes mains et prend une grand inspiration, prête à tout lui dire, enfin.

- Comment ça va ? Me demande Jack.

- Ça va et toi ? Je demande à mon tour en continuant à ne pas le regarder.

- Qu'est-ce qu'il y a Ella ? Je vois bien que quelque chose ne va pas.

Je regarde derrière moi. Hanna est bien trop occupée à bavarder avec les garçons de derrière pour nous entendre.

- Jack... Je dois te parler.

- Bien sûre, vas-y, m'encourage Jack, tout de même inquiet.

- Ok... Hum... Je voulais te dire que nous deux... Je pense que...

Je suis soudainement coupé par un bruit sourd derrière la porte. Quelqu'un frappe à la porte avec une telle violence que tout le monde se tait et se lance des regards interrogateurs.

- Entrez ! Crie Mme Pourgault.

La porte s'ouvre à la volée et deux soldats allemands se retrouvent dans l'encadrement de la porte. Quelques élèves poussent des petits cris de surprise tandis que Jack est toujours retourné vers moi. Je pousse un soupire pour lui faire comprendre que je lui parlerai plus tard.

Je repporte mon attention vers la porte et mon sang ne fait qu'un tour quand j'aperçois Hattän. Il se tient derrière son camarade, plus âgé que lui. Je ne pense pas qu'il m'ait remarqué. Son regard se dirige sur Mme Pourgault qui n'a pas l'air de bien comprendre la situation.

- Que voulez-vous, lance t-elle sèchement.

- Nous devons vous parlez ! Hurle le soldat en sa direction.

Il a les traits tirés et paraît stressé. Il est plus petit qu'Hattän mais bien plus effrayant.

Les deux soldat font quelques pas en avant et se retrouvent maintenant dans la classe. Mme Pourgault pose sa craie sur son bureau avec une telle violence, qu'elle s'écrase en petites miettes, éparpillées sur le meuble et le sol. Un petit morceau de craie roule jusqu'aux pieds d'Hattän, qu'il ramasse rapidement.

- Vous devez faire sortir tous les gosses ! Continu de crier le soldat.

C'est alors qu'Hattän se retourne vers la classe et ses yeux se posent directement sur moi. Son visage affiche une expression de surprise et je déchiffre autre chose mais sans savoir quoi.

- Que tout le monde sorte, ordonne l'institutrice, sans bouger d'un centimètre. Elle cherche sans doute à montrer aux allemands qu'elle n'a pas peur, qu'elle est forte et ne tresaillera pas à la moindre occasion.

Le soldat reste planté devant elle, sans bouger lui non plus, alors qu'Hattän avance vers nous pour nous faire sortir de la classe.

- Dépêchez- vous, ordonne t-il, beaucoup moins fort que l'autre allemand.

- Et toi reste ici, me dit-il en me retenant pas le bras.

Je ne comprend pas. Est-ce à cause de moi, que deux soldats allemands sont entrés dans la classe ? Qu'est-ce que j'ai encore fait de mal ?

Jack passe la porte et se retourne inquiet. Je lui fait signe de la tête que tout va bien et qu'il peut rejoindre les autres dans la cour.

Hattän me fait signe de m'asseoir sur une chaise tandis que lui reste debout au dessus de moi. L'autre soldat est resté avec Mme Pourgault devant le tableau. Celle-ci me lance des regards inquiet, ne comprenant pas pourquoi un soldat allemand me retient dans la classe alors que tout le monde est censé aller dehors. Je les entends parler tous les deux, sans entendre quoi que ce soit.

J'avale difficilement ma salive et tout me paraît maintenant très loin. La boule que j'avais tout à l'heure dans la gorge est revenue, mais en dix fois plus grosse. Je ne peux retenir les quelques larmes qui commencent à couler sur mes joues.

𝙐𝙣 𝙖𝙢𝙤𝙪𝙧 𝙚𝙣𝙣𝙚𝙢𝙞                             { TERMINÉ  }Where stories live. Discover now