Chapitre 19 - Partie II

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Roxane


Les battements de mon cœur résonnent longuement dans tout mon être. Le temps semble s'être figé tout autour de moi et mes lèvres tremblent encore du dernier nom qu'elles ont prononcé.

— C'est impossible, je...

— C'est elle ! Demandez-lui à elle !

Brusquement, Eddy se redresse et se débat dans les bras de son bourreau avec une fureur rarement égalée. Je me recule en direction de Robin, déboussolée. De quoi parle-t-il ? Que se passe-t-il ? La pièce oscille sous mes yeux effarés, me transportant du même coup dans un véritable cauchemar rythmé par de violentes sueurs froides et les chuchotements incessants qui résonnent toujours à mes oreilles. Lorsque je me retourne vers le maître des lieux, le regard empli d'interrogations, celui-ci retire son arme à feu de sa cachette puis la pose nonchalamment sur la petite table de marbre, avant de se laisser tomber dans le canapé en soupirant :

— Finalement, ramène-moi ce petit merdeux par ici. Je sens qu'il va m'amuser.

Obéissant aux ordres, le sbire traîne sa victime jusqu'au pilier central de l'estrade auquel il l'attache à nouveau. Je reste prostrée, incapable d'articuler le moindre mot.

— C'est elle, je vous en supplie, écoutez-moi ! J'avoue tout ! C'est elle !

Eddy ne cesse de crier après moi sans que je n'y prête une réelle attention. Mes yeux inspectent les plus petits recoins de la pièce, à la recherche d'une échappatoire à ce nouvel enfer, en vain. Un sentiment de déjà vu s'empare de moi et me donne la nausée. Mon cœur refuse d'admettre qu'il m'a de nouveau abandonnée à mon triste sort, aux mains d'un tortionnaire dont la prestance n'a d'égal que le cynisme. J'étais venue ici chercher la chaleur de ses bras, la douceur de ses lèvres... Je n'y ai trouvé que l'écho tragique de l'éternelle violence, sanctifiée par le psychopathe le plus sadique de cette ville. D'un signe de la tête, ce dernier ordonne à son homme de main de quitter la pièce, puis pose ses yeux de glace sur moi :

— Ma belle, je t'ai fait venir ici pour toute autre chose, mais au point où nous en sommes... Approche.

Je déglutis avec difficultés, retenant le torrent de larmes que je sens poindre en moi, puis m'avance lentement vers le petit fauteuil juxtaposé au canapé. Robin engloutit un nouveau verre de whisky, sans lâcher Eddy des yeux. Ce dernier continue ses supplications fébriles et ses accusations à mon sujet, mais tout cela m'est bien égal. Mes pensées sont uniquement tournées vers la déception, l'amertume et l'inquiétude qui tissent leurs toiles morbides au fin fond de mon crâne. Je prends une inspiration tremblante, sans parvenir à défaire mon regard du pistolet posé sur le plateau de marbre. Son propriétaire s'enfonce un peu plus dans le canapé et s'adresse alors à moi sur un ton anormalement calme et doucereux :

— Alors comme ça, vous vous connaissez tous les deux ?

— Oui ! C'est elle ! C'est Roxane Preston !

— Toi, tu la fermes ! Tu parleras quand je te l'aurai demandé.

Une cascade de frisson me remonte l'échine en même temps qu'un silence pesant s'installe à la suite du rugissement de Robin. Les battements de mon cœur s'emballent dans ma poitrine. Je bloque mes mains entre mes genoux et prends une brève inspiration tremblante avant de relever la tête vers lui, le regard fuyant :

— Oui, on... on était ensemble à l'université. Mais il n'a jamais été mon ami.

Le chef affiche un léger sourire rassurant dans ma direction avant de reprendre avec nonchalance :

Le Dernier Vol des Oiseaux de Sang | TERMINÉEWo Geschichten leben. Entdecke jetzt