Envers et contre tous

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JANVIER 2018


- Camille va bien.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

- Je n'en sais rien, je suis seulement passée en coup de vent lui apporter des affaires et oh... tu sais quoi ? Je n'ai pas pensé à demander un rapport médical détaillé spécialement pour Julian Mercier !

- Je rêve ou tu m'en veux ? demandé-je vexé.

- Je ne t'en veux pas, soupire Anaïs à travers son portable. Son état m'inquiète, c'est tout.

- Alors je devrais m'inquiéter que tu t'inquiètes ?

- Tu es insupportable, si tu continues, je raccroche. Tu n'as qu'à passer la voir. Tu lui manques, elle ne veut voir personne d'autre que toi.

- Et si je croise ses parents ? T'es dingue, toi.

- Ouais bah tu n'avais qu'à réfléchir avant de tenir tête à ton beau-père. Et puis, elle t'a quand même confirmer par message que tu pouvais passer la voir en journée, non ?

- Oui mais-

- Alors fais-lui confiance, merde !

- Allô ? Allô ?!

Putain, elle a raccroché.

Je n'en peux plus, il faut que j'aille la voir, que je m'assure qu'elle va bien et qu'elle ne risque plus de recommencer. Merde mais comment peut-elle le savoir ?

Vêtu d'un jogging bleu clair avec un sweat à capuche de cette même couleur, je me dépêche d'avoir l'air présentable quand je quitte l'appartement. Il fait froid mais je n'ai pas le courage de faire demi-tour pour aller chercher mon manteau, ma capuche me protégera le temps d'arriver jusqu'à l'arrêt de bus. Par chance, je n'attends pas longtemps, le trajet n'est pas si long non plus, seulement une quinzaine de minutes et me voilà devant l'hôpital.

- Bonjour, dis-je à l'hôtesse que je trouve au premier comptoir. Je viens voir Camille Latour.

- Chambre 119. Veuillez remplir le formulaire de visite et vous désinfecter les mains, s'il vous plaît.

J'obéis, menace mon écriture lorsqu'elle flanche et m'empresse ensuite d'observer chaque panneau que je croise afin de me diriger vers le bon couloir.

- 119, me répété-je à moi-même avant de finalement tomber sur la bonne rangée de nombres.

Je la trouve, frappe deux petits coups et ouvre délicatement la porte pour observer les alentours. Quatre murs blancs, un petit lit d'hôpital qui m'a l'air tout sauf confortable et un petit fauteuil rouge à ses côtés pour tout de même accueillir les invités. Camille est allongée et je tente de m'approcher sans un bruit pour ne pas qu'elle s'effraie. Il me semble qu'elle ait de bonnes couleurs, ses joues sont légèrement teintées de rose, il fait chaud et ce n'est pas plus mal. Un plateau vide se tient sur sa petite table de nuit à côté de son portable qui ne cesse de s'allumer puis s'éteindre de par les messages qu'elle reçoit, heureusement qu'il est sur silencieux.

Je m'assois, approche le canapé rouge près du bout de son lit tout en prenant sa main de la manière la plus douce possible. Ce geste a le don de la réveiller et je pense plus qu'elle somnolait qu'autre chose, Camille n'a pas l'habitude d'avoir le sommeil léger.

- Julian, murmure la blonde en souriant.

Elle se redresse, un peu trop vite à mon goût, pour me sauter au cou et je n'hésite pas un seul instant avant de la serrer dans mes bras.

- Tu vas bien ? demandé-je en prenant son visage entre mes mains, inspectant chacun de ses traits.

- Oui. Je vais beaucoup mieux maintenant que tu es là, me sourit la blonde.

- Qu'est-ce que les médecins ont dit ?

- Problème de tension. Trop de stress, je fais souvent des petites crises d'angoisse et la dispute avec mes parents n'a rien arrangé, je me suis trop énervée alors voilà le résultat, sourit toujours ma petite ami en me montrant sa robe de chambre.

Je la regarde tristement, sachant pertinemment que j'envenime fortement la relation qu'elle a avec ses parents depuis que je suis là.

- Ne dis rien, me dit-elle en caressant ma joue. Tu n'es pas fautif, je me bats pour toi. Pour nous.

- Et voilà le résultat, répété-je les sourcils froncés.

- Eh... me rassure Camille. Je n'ai rien, je vais bien, tu n'as pas à t'inquiéter, d'accord ?

À moitié convaincu, Camille le remarque et s'éloigne de moi pour me faire de la place dans son petit lit d'enfant. Je m'allonge à ses côtés, surélevant mon bras pour qu'elle vienne se caler contre mon torse et je l'abaisse pour resserrer son étreinte.

- J'ai eu tellement peur, lui avoué-je en attrapant sa main avec celle que j'ai de libre.

- N'y pense pas. Ça n'arrivera plus, je vais arrêter de m'en faire autant, je te le promets.

- Tant que nous serons ensemble, j'ai bien peur que ne se calmera pas, tes parents me détestent.

- Ne parons plus de ça... soupire la blonde.

Elle essaie de défaire sa main de mon emprise mais je l'en empêche doucement, signe d'excuse, pour jouer ensuite avec ses doigts.

- D'accord. Parlons d'autre chose. La bouffe est bonne, ici ?

Elle rit en secouant le visage, amusée.

- Répugnante. Je mange parce que j'en ressens le besoin mais sinon...

Camille insère deux doigts près de sa bouche pour faire semblant de vomir et je ricane.

- Je sors ce soir, mes parents passent me chercher après le boulot.

- Je suis content que tu ailles bien.

Elle se redresse sur le coude dans le but de m'embrasser et j'ai soudainement l'impression de réapprendre à respirer. Je prolonge le baiser pendant que nos mains se lient, comme par automatisme et nous sommes obligés de rompre le baiser lorsqu'elle n'a plus de souffle. Je pense qu'elle est encore fragile, qu'il ne faut pas la brusquer et qu'elle s'en remettra petit à petit.

- Julian ? me demande Camille en se couchant à nouveau sur le haut de mon torse.

- Mh ?

- Qu'est-ce que tu veux faire plus tard ?

- Bonne question, je souris. J'aimerais beaucoup continuer mes études dans le monde de la littérature mais c'est tellement vaste... Je suis aussi un grand manuel, j'adore réparer certaines choses, bricoler, tout ça...

- C'est marrant, dans ma tête, je te voyais professeur.

- Professeur ? m'étonné-je. Je n'y ai jamais pensé, les gosses, tout ça c'est... compliqué, je ris.

- Ah oui ? Tu n'aimes pas les enfants ? me demande-t-elle en levant la tête pour m'observer.

- Je n'ai pas dit ça. À vrai dire, je n'en côtoie pas beaucoup, mes parents n'ont pas de frère ni de sœur, donc pas de cousin. Ils n'ont jamais voulu d'un autre enfant, ce qui fait de moi un fils unique.

- Tu en veux, plus tard ?

- Des enfants ? Bien sûr.

Je baisse le regard, elle m'écoute attentivement avec toujours ce même sourire plaqué sur ses lèvres. J'embrasse son front avant qu'elle ne ferme les yeux.

- Et toi ? chuchoté-je.

- J'aimerais beaucoup. Un petit garçon, de préférence. Mais une petite fille me conviendrait parfaitement, tant qu'ils sont en bonne santé et qu'ils le restent en grandissant, souffle-t-elle toujours les yeux fermés.

- Tu as totalement raison. Et toi, qu'est-ce que tu veux faire plus tard ?

Elle ouvre les yeux sans pour autant me regarder, réfléchit et finit par hausser les épaules sans conviction.

- Aider les autres. Peu importe le métier tant que je peux faire des heureux autour de moi...

- Dans ce cas, tu es sur la bonne voie.

Près de toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant