Chapitre 3

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Je pose ma tête contre la vitre teintée, et ferme les yeux avec une dernière pensée pour Aiden.

Je vous vengerai.

Ça doit faire des heures que nous roulons. Il fait déjà nuit noire et je suis incapable de dire où nous allons.

Alors que je m'apprête à replonger dans mon sommeil, la voiture s'arrête. Une longue minute s'écoule, et, comprenant que les hommes n'ont pas l'intention de sortir de la jeep, je soupire et descends.

À peine ai-je le temps de fermer la portière que la voiture fait demi tour. Bon, au moins je sais qu'à partir de maintenant, je suis vraiment seule.

Je regarde autour de moi mais ne distingue aucun détail à cause de la nuit. J'avance lentement sans savoir où aller quand tout à coup l'allée s'éclaire, me laissant découvrir l'endroit où je me trouve. Je réalise que je me tiens devant un portail doré de plus de trois mètres de haut qui entoure un gigantesque manoir. Ce n'est pas du tout ce que j'imaginais en terme de "lieu sûr". Je pensais plus à un endroit confiné, souterrain, dans lequel je me cacherait de mes ravisseurs. Surtout pas un bâtiment aussi exposé au monde extérieur. J'espère sincèrement que Aiden n'a pas prévu que je reste dans ce... manoir. D'un pas assuré, j'avance vers le portail et repère une plaque, que je soupçonne être en or. Il y est écrit... quoi?

Bienvenue à l'Elite Academy

Un internat?! Ça doit sûrement être une erreur. Aiden n'a pas pu m'envoyer dans une école. Soudain une voix métallique me sort de mes pensée.

- Nous vous attendions, mademoiselle Lein.

Je sursaute immédiatement à l'entente de mon prénom. Finalement, je crois que c'est bien ici que mon frère m'a envoyée.
Quelques secondes plus tard le portail doré s'ouvre silencieusement sur une immense allée bordée de cerisiers. Plus j'avance et plus l'allée s'éclaire devant moi, jusqu'à me conduire à une immense porte en bois, gravée d'inscriptions que je ne comprends pas. Alors que je cherche des yeux une sonnette ou autre objet susceptible d'annoncer ma présence, la grande porte s'ouvre d'elle même dans le même silence que le portail. Euh... d'accord. Je pénètre à l'intérieur en évitant la marche tandis que la porte se referme derrière moi, aussi vite qu'elle s'est ouverte. Elle doit être automatique... J'entends des talons claquer le sol d'une lenteur insupportable. Je décide de m'approcher afin de réduire la distance qui nous sépare et aperçois une grande femme d'âge mûr avancer vers moi. Elle fait presque deux têtes de plus que moi et je dois me tordre le cou pour la regarder dans les yeux. Elle dégage un tel charisme que s'en est intimidant. Vu son chignon stricte et sa posture aussi droite, je ne serai pas étonnée qu'elle ai fait l'armée.

Je me racle la gorge et rajuste mes lunettes sur mon nez. Un silence gênant s'installe pendant que la femme m'examine sous toutes les coutures. Elle me toise de haut en bas et me fixe intensément, comme si elle tentait de m'évaluer selon je ne sais quels critères. Son regard est si puissant que je crois qu'elle lit en moi. J'ai envie de lui hurler d'arrêter, de ne pas me fixer mais je me retiens, pour ne pas passer pour une psychopathe de première. Je sens mes yeux changer de couleur sous l'emprise de la frustration, mais la dame se décide enfin à ouvrir la bouche.

- Suivez moi.

Bon, d'accord, j'ai parlé un petit peu trop vite... Sur ses mots elle tourne les talons et je dois me presser pour rester à sa hauteur. Elle s'arrête brusquement devant ce que j'imagine être son bureau, et j'évite de justesse de lui rentrer dedans. Elle tourne la poignée de la porte et m'invite à entrer. Enfin, c'est ce que je comprends par son regard appuyé. Je fais un pas à l'intérieur et suis tout de suite frappée par la décoration du bureau. Les murs sont tapissés de toiles, aussi époustouflantes les unes que les autres, et le sol est recouvert d'un tapis aux gravures anciennes. Un vrai musée. Je suis sûre que mes yeux en sont jaunes d'émerveillement. Je n'ai même pas remarquée que la femme dont j'ignore le nom est maintenant assise sur un fauteuil derrière son bureau, l'air... non, sans aucun air sur le visage. Rien. Elle est l'indifférence incarnée.

- Asseyez vous, ordonne-t-elle.

En d'autres circonstances, je n'aurais probablement pas obéi, mais là... comprenez moi, je ne suis pas suicidaire. Je m'installe en face d'elle et plaque mes mains sur mes genoux.

- Je suis Mrs. Clinton, directrice de l'Elite Academy, commence-t-elle.

Mais bien sûr! Pourquoi je ne l'ai pas deviné plutôt? Sous ses airs de militaire, elle ne pouvait être que directrice.

- Vous en faites désormais parti. Ce qui signifie que vous devrez vous plier au règlements de l'école à la lettre, où vous en paierez les conséquences, dit-elle en appuyant sur le dernier mot.

C'est moi ou bien elle est ouvertement entrain de me menacer?

- Vous apprendrez tout ce que vous aurez à apprendre dans les jours à venir. Je ne vous en dit pas plus. Je vous laisse vous reposer, enfin, le temps qu'il vous reste, m'annonce-t-elle en me tendant une clé. Votre chambre.

Comment ça le temps qu'il me reste? On est en plein milieu de la nuit. Je récupère les clés en la suivant jusque la porte. Alors que je mets un pieds à l'extérieur, je l'entends m'appeler.

- Une dernière chose. Des lunettes, ce n'est pas très discret.

Et pour la première fois, je vois les coins de sa bouche se relever en un demi sourire.

Regarde-moi.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant