Chapitre 26 (partie I)

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Je prends une grande inspiration, tire les pans du rideau, et avance sur l'estrade. Tous les regards se posent sur l'arme dans mes mains.

- Le prix de départ est fixé à...

Alors que les neufs invités frémissent d'impatience, les mots de Mr.Startenver se perdent dans une assourdissante explosion.

Je baisse immédiatement la tête et protège mon visage de mon bras libre mais je m'effondre au sol sous la pluie de verre brisé du plafond vitré. Ma tête rencontre le marbre du sol avec une telle force que je sens un mince filet de sang couler le long de ma nuque. Je relève la tête lentement mais je n'arrive qu'à distinguer quelques silhouettes affolées. Je me lève tant bien que mal en m'aidant de mes avants-bras mais retombe immédiatement sentant des dizaines de morceaux de verre se planter dans ma peau.

Soudain, quelqu'un m'attrape par les épaules et me relève d'un coup sec du sol. Un frisson me parcourt lorsque je sens une lame froide se poser sur mon cou. La scène qui s'offre alors à moi me laisse bouche bée. Une lame est placée sur la jugulaire de chacun des invités, y compris Mr. Startenver. La moitié du visage de nos assaillants tout de noir vêtus et armés jusqu'aux dents est dissimulée sous un foulard rouge sang. Plus personne ne fait un geste tandis que seul le bruit de nos respirations se mêlant en chœur brise le silence. Mon cœur bât tellement vite que j'ai l'impression qu'il va sortir de ma poitrine. J'essaie de comprendre ce qui se passe mais mon cerveau refuse de fonctionner. Tout ce à quoi je peux penser se résume à la lame tranchante posée sur mon cou, et sur celui des dix autres personnes de cette pièce qui sont immobiles.

Je fixe chacun des invités dont les yeux sont emprunts d'un mélange de peur et d'incompréhension jusqu'à tomber sur Morgane. Son regard est inexpressif. Froid. Sa poitrine se soulève et se rabaisse d'une lenteur alarmante. Prédateur. C'est le seul mot qui me vient à l'esprit en la regardant. Elle semble attendre le moment parfait pour sauter sur sa proie et lui enfoncer ses crocs dans son cou. Sauf que pour le moment, elle devrait plutôt avoir peur pour son cou.

Le temps semble s'arrêter. Les secondes s'étendent sur les minutes, et les minutes sur les heures. Alors que je suis sur le point de craquer sous l'atmosphère insoutenable, un homme atterrit du plafond brisé, faisant trembler le sol sous lui. Tous les regards se dirigent sur celui que je comprends être le chef. Il ramène lentement ses deux mains à sa capuche et découvre sa tête. Il ne porte pas de foulard rouge, si bien qu'on peut aisément voir l'épaisse cicatrice qui orne sa joue en partant de son œil gauche. Il tourne lentement la tête de gauche à droite, puis de droite à gauche, faisant craquer son cou dans un affreux bruit qui me glace le sang.

- Bonsoir.

Sa voix grave me paralyse. Jamais un homme ne m'a autant effrayé en toute une vie. Une aura de meurtre et de sang semble émaner de lui, rendant l'atmosphère plus épaisse et l'air presque difficile à respirer.

Il s'avance lentement vers Mr. Startenver d'un pas confiant, dos à moi.

- Alors, John? On a oublié de m'inviter à sa petite fête privée?

Mr. Startenver se raidit un peu plus et essaie de garder contenance tandis que l'homme à la cicatrice s'avance toujours vers lui. Arrivé à sa hauteur, il lui assène un crochet du droit si rapide que je crois rêver. John Startenver se courbe sous la douleur tandis qu'il est pris d'une quinte de toux. Il se relève doucement en se tenant le ventre et plante son regard ampli de haine et de mépris dans celui de l'homme à la cicatrice. En une fraction de seconde Mr.Startenver se reçoit un nouveau coup en plein visage cette fois-ci et un mince filet de sang s'échappe de sa bouche.

Une des invités étouffe soudainement un sanglot, brisant le silence.

- Mais non, voyons... inutile de se mettre dans tous ses états!

Regarde-moi.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant