82. Mariam

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Je n'appellerai personne. Ni maintenant ni plus tard. Je veux juste qu'on me laisse tranquille.

Je me réfugie chez moi, dans ma chambre. Dans mon antre, mon cocon. L'endroit où je me sens bien, protégée. Je me roule en boule dans ma couette, les bras plaqués contre mon ventre à m'en faire mal. Je voudrais ne plus jamais quitter mon lit. Rester ici. À l'abri de tout le mal qui sévit à l'extérieur.

Je me sens épuisée. Vidée. À bout. Mon cœur martèle furieusement dans ma poitrine. Mon pouls bat douloureusement dans mes oreilles. Je suis au bord des larmes.

Je n'en peux plus.

Je veux juste que Juliette rentre, que tout redevienne comme avant. Qu'on se plaigne à nouveau d'Antis ensemble, qu'on parle de nos projets, de ce qu'on fera dans l'appartement qu'on louera toutes les deux après le bac, des petits boulots qu'on aura pour subvenir à nos besoin, des sorties qu'on fera dans tous les lieux qui manquent à Antis et des restaurants exotiques que l'on testera. On a tant de choses à vivre toutes les deux.

À certains moments, j'ai l'impression d'entendre sa voix dans ma tête. C'est comme si elle était toujours avec moi. Comme si elle m'accompagnait au quotidien.

Je suis morte de peur à l'idée de ne plus jamais revoir ma meilleure amie. Peur qui ne me quitte pas depuis le jour où elle a disparu. Quant à l'angoisse d'apprendre ce qui lui est arrivé, elle ne faiblit pas depuis le premier jour, au contraire. Elle monte lentement, insidieusement. Elle me prend peu à peu à la gorge. Chaque jour qui passe, j'ai la sensation de respirer un peu moins bien que la veille.

Je prends une profonde inspiration et m'oblige à relâcher mon souffle lentement. Je répète l'opération encore et encore. J'inspire. J'expire. Je ferme les yeux et tente de ne penser à rien. Derrière mes paupières closes, je ne vois qu'une image : le visage de Juliette. Son regard espiègle. Son sourire en coin. Son rire enfantin me manque. Tout comme ses coups de gueule, ses plaintes que je surnommais ses "petites geignardises". Mais aussi ses grands rêves qu'elle aimait me partager et dans lesquels elle m'incluait toujours. Peu importe ce que nous réserverait le futur, Juliette m'y voyait toujours à ses côtés. 

Elle doit rentrer. Elle le doit. Je ne suis pas capable d'affronter l'éventualité contraire.

Je sombre dans le sommeil. Je m'en rends compte quand j'en suis sortie par une sonnerie. Celle de mon portable, glissé dans ma poche. Je l'en extirpe et en découvrant l'heure, je constate que j'ai dormi un bon moment. Je me sens vaseuse. Mon cerveau a du mal à se mettre en route.

Mon portable vibre une nouvelle fois. J'ai reçu un texto. Je décide de le consulter. 

Keep It QuietWhere stories live. Discover now